Paperjam.lu

 

En novembre 1990, le Grand-Duché de Luxembourg se dote d’une loi ayant pour objet la création d’un registre maritime public. Cette dernière permet de donner un cadre juridique, fiscal, financier et technique aux activités maritimes effectuées sur les eaux intérieures, principalement en Belgique et en Allemagne, et répond aussi à la demande des armateurs belges à la recherche d’un pavillon plus attractif et offrant tous les critères d’un pavillon national.

La loi, modifiée et complétée en juin 1994, apporte alors une autre dimension au registre maritime permettant l’enregistrement de yachts sur ce même registre maritime de marine marchande.

De ce fait, tous les navires inscrits ont l’obligation de battre le pavillon maritime luxembourgeois. Pratiquement, il s’agit des couleurs nationales portées à la poupe. Dans l’abstrait, il s’agit d’un lien de droit, analogue à la nationalité pour les personnes, reliant l’Etat à un navire, par le biais d’un certificat d’immatriculation. Ce dernier permet de définir le droit applicable sur l’objet qu’est le navire situé dans un espace, la haute mer, échappant à la souveraineté territoriale des Etats. Le pavillon constitue également un moyen de contrôle étatique, car l’Etat du pavillon est investi d’une mission de surveillance des navires.

Sur le plan économique, il va de soi que l’attribution du pavillon et l’inscription des navires sur le registre ont une incidence sur la cohérence de toute la filière économique, financière et juridique du secteur. Le Commissariat aux Affaires Maritimes (CAM), véritable autorité maritime du Luxembourg, a mis en place une organisation permettant de gérer les navires placés sous sa responsabilité et sous celle de l’ensemble des législations nationales, européennes et internationales relatives au domaine maritime.

Dans le contexte économique difficile du secteur de la marine marchande, qu’en est-il des yachts ou «navires de commerce de croisière»? D’après les sources du SuperYacht Market Intelligence, le nombre de navires vendus à travers le monde, au début des années 2000, s’élevait à 500 yachts répartis entre 100 constructions neuves et 400 ventes d’occasion réalisées par les courtiers.

Au début de l’année 2007, le marché avait doublé, soit 1.000 ventes réparties en 300 constructions neuves et 700 occasions. Quand en octobre 2007 la crise des subprimes heurte le secteur, on assiste à une dramatique voie d’eau du côté des ventes, qui atteignent le chiffre de 300 par an. Seulement 45 commandes sont enregistrées en 2009 et 53 depuis le début 2010!

Liquidations, fusions et acquisitions sont légion dans le secteur et le paysage de la construction navale va ainsi changer radicalement. Nous ne pourrons probablement plus jamais compter sur un marché engloutissant 1.000 ventes par an, mais seulement 300 à 400. Dix ans seront nécessaires pour redresser le marché de l’occasion.

Aujourd’hui, le Luxembourg est bien armé face à ses concurrents européens et, sur le registre maritime, viennent s’inscrire non seulement les navires de marine marchande mais aussi les yachts dotés du même statut.

Le CAM annonçait 286 sociétés maritimes agréées en 2005, contre 319 en 2009. Parallèlement, le nombre de navires enregistrés croissait de 131 en 2005 à 207 en 2009, le nombre de yachts représentant environ 40% du registre global.

Le pays a ratifié la Convention «Montego Bay» relative à la nationalité des navires, et est membre à part entière des organisations internationales, comme l’Organisation Maritime Internationale (OMI) et l’Organisation Internationale du Travail (ILO). Ainsi le registre maritime luxembourgeois figure sur la liste blanche du Memorandum of Paris (Paris MOU).

En conséquence, le Grand-Duché de Luxembourg, comme Etat du pavillon, est parfaitement en mesure d´exercer ses droits de souveraineté sur les navires enregistrés sur le registre marine marchande.

Pour accueillir les yachts sur ce registre, le CAM a édité des règles techniques spécifiques aux moins de 24 mètres et à ceux de plus de 24 mètres. Cela permet aux armateurs, à la recherche d’un véritable statut «marine marchande», de pouvoir immatriculer. Notons cependant que la certification anglaise MCA, référence en matière de grande plaisance commerciale, ne s’applique pas aux navires de marine marchande, lesquels sont inscrits sur un registre qui leur est propre.

Le CAM a également prévu, en accord avec les règles OMI/ILO, une qualification des marins selon la convention STCW 95 et un règlement de l’équipage minimum.

Pour les officiers et membres d’équipage, ressortissants de l’UE, la convention IMO/ILO impose une entrée dans le régime social de l’Etat du pavillon. Le système de protection sociale coûte 24% du revenu imposable du membre d’équipage qui, après dix ans de cotisation et/ou 65 ans, perçoit une retraite. Pour les non-résidents de l’UE, l’armateur doit être en mesure de prouver l’adhésion à une assurance sociale privée.
Tout yacht sous pavillon luxembourgeois est soumis à la réglementation européenne CE 3577/92/EEC du 7 décembre 1992, «Cabotage Act» concernant les armateurs communautaires. La déno­mination technique «navire de commerce de croisière» lui confère le statut de navire marchand et il perd ainsi ses qualificatifs d’objet luxueux… Les conséquences sont fondamentales, que ce soit pour le droit maritime, la TVA et la fiscalité directe.

Le régime de TVA applicable aux navires marchands est régie par:
– Les articles 15.4. 15.5. - 6e directive CE, articles 148 a) et c) du règlement CE 2006/12/112 prévoyant l’exonération fiscale pour les navires marchands (exploitation et entretien). Ces réglementations de l’UE sont pleinement applicables aux navires marchands appartenant à une compagnie maritime basée au Luxembourg (article 43 I de la loi nationale sur la TVA).
– Le décret gouvernemental du 22 décembre 2006 qui étend et confirme cette exonération de TVA aux «navires commerciaux de croisière».
Au vu de toutes ces dispositions légales, financières et techniques, notre pavillon maritime se prévaut d’un cadre opérationnel clair, lui permettant de rivaliser avec les meilleurs pavillons européens. D’autre part, il apporte sa contribution au dynamisme de la place financière.

Les armateurs de marine marchande ont rapidement su apprécier le bien-fondé du registre, même si son ouverture a pu présenter quelques imperfections de mise en place.

Aujourd’hui, un tel cadre législatif ne peut que fédérer les professionnels engagés dans la promotion du pavillon luxembourgeois, afin qu’ils véhiculent son sérieux, sa qualité et sa fiabilité.

Le Grand-Duché est donc désormais à considérer comme un acteur majeur dans le domaine maritime international.