Selon KPMG, l'industrie des fonds luxembourgeoise pourrait pâtir d'un changement de convention fiscale. (Photo: Luc Deflorenne / archives)

Selon KPMG, l'industrie des fonds luxembourgeoise pourrait pâtir d'un changement de convention fiscale. (Photo: Luc Deflorenne / archives)

La France cherche à renégocier la convention de non-double imposition avec le Grand-Duché sur le volet de la taxation des plus-values immobilières. L'industrie luxembourgeoise des fonds pourrait en pâtir.

Rien n’est encore officiel, mais en coulisses, les administrations fiscales s’activent déjà. Motif : la France cherche à renégocier la convention de non-double imposition signée avec le Luxembourg.

Ce traité, qui date des années 50, avait déjà été amendé il y a quelques années sous la pression internationale afin d’y introduire le principe d’échange d’informations sur demande sur le modèle de la convention OCDE : une sérieuse entaille dans le secret bancaire.

À quelques mois des élections présidentielles et face à des contraintes budgétaires de plus en plus serrées, la France a adressé une nouvelle demande formelle à son voisin concernant un sujet spécifique.

« Aucun avenant au traité n’est encore disponible, mais la demande porte sur la renégociation de la clause sur les plus-values des sociétés à prépondérance immobilière. Pour l’instant, si une société luxembourgeoise cède les parts d’une autre société à capitaux français détenant un immeuble en France, le droit d’imposer la plus-value revient au Luxembourg. Or, au Luxembourg, on peut appliquer le 'régime mère-fille'. La plus-value peut donc être exonérée si les conditions de cette exonération sont satisfaites », explique Sandrine Degrève, director au département tax, real estate et infrastructure chez KPMG Luxembourg.

Stade préliminaire

En clair, la France, qui a ses pratiques dans le collimateur, voudrait s’octroyer le droit d’imposition des biens immobiliers établis sur son territoire de façon à récupérer des recettes fiscales.

Toutefois, rien n’oblige, a priori, le Grand-Duché à accéder aux demandes françaises. « Le Luxembourg n’a pas avantage à accepter cette modification. Il est probable que des considérations politiques entreront en ligne de compte », estime l'experte.

Selon KPMG, si le Luxembourg ne tire pas de recettes fiscales de ces montages, son industrie des fonds pourrait en pâtir. « Si cet avantage disparaît, cela pourrait faire pencher la balance vers des places financières concurrentes pour la localisation de fonds immobiliers. L’industrie locale des fonds pourrait y perdre quelques plumes, au profit de certaines places, comme les Pays-Bas, la Grande-Bretagne, voire la Belgique », explique Pierre Kreemer, partner au département tax, real estate et infrastructure chez KPMG Luxembourg.

Difficile de savoir quelles chances a la France de voir sa demande aboutir ou encore d’évaluer le manque à gagner fiscal occasionné dans l’Hexagone par ces structures. « Les montants en jeu sont sans doute considérables, mais à l’échelle d’un budget comme celui de la France, je ne pense pas que cela représente des recettes vraiment significatives », estime Sandrine Degrève.

Il n’y a en tout cas pas de calendrier prédéfini pour la date d’entrée en vigueur de cette éventuelle modification fiscale. Les négociations peuvent durer plusieurs mois. Le Luxembourg est aussi en droit de demander des contreparties. «On peut tout de même dire que la France a la volonté d’avancer vite », souligne Pierre Kreemer.

Les experts craignent aussi que Paris cherche à étendre les pourparlers vers d’autres aspects. « On espère que ce n’est pas le cas, mais nous n’avons aucune information sur l’étendue éventuelle des demandes de la France. Nous n’en sommes encore qu’à un stade très préliminaire », poursuit Sandrine Degrève.