Français d'origine installé depuis 31 ans au Luxembourg, Serge Krancenblum dirige SGG depuis 22 ans. Son ambition est à présent d'étendre la présence du groupe à l'international. (Photo: Mike Zenari)

Français d'origine installé depuis 31 ans au Luxembourg, Serge Krancenblum dirige SGG depuis 22 ans. Son ambition est à présent d'étendre la présence du groupe à l'international. (Photo: Mike Zenari)

Prestataire de services fiduciaires international par essence, SGG a progressivement développé une présence active dans une vingtaine de pays, des Émirats aux États-Unis en passant par l’Asie. SGG, autrefois dénommé Services généraux de Gestion jusqu’en 2009, est officiellement né du rachat par Arthur Andersen, des activités de domiciliation et d’administration de sociétés de Kredietrust en 1998. En 2002, c'est le premier management buy-out de l'histoire de la société. Aujourd’hui, la part détenue par son management tourne autour de 25%. Ces dernières années, plusieurs acquisitions lui ont permis de croître de manière organique, dont IMFC en 2011 et ANT, un leader néerlandais dans les fonds, en 2012.

Large, la palette de services de SGG va de la corporate administration à l’administration de fonds, en passant par le family office ou des services en matière d’AIFM. Actuellement, les plateformes opérationnelles les plus importantes sont localisées au Luxembourg, aux Pays-Bas, dans les Caraïbes, ainsi qu’à Hong Kong.

Pour Serge Kracenblum, CEO du groupe depuis juillet 1993, le succès du groupe dont le siège est toujours au Luxembourg peut s’expliquer par la fibre entrepreneuriale et les compétences pointues de ses collaborateurs, au nombre de 600 dans le monde et 250 au Luxembourg.  

Monsieur Kracenblum, quelles ont été pour vous les évolutions marquantes dans l’histoire récente du groupe?

«Plusieurs grandes étapes ont façonné le groupe tel qu’il existe aujourd’hui. Je pense notamment à la prise d’indépendance de 1998 par rapport à Kredietrust. Le rachat de 2002 à Arthur Andersen a été un autre moment fort. Ensuite, avec les années et jusqu’en 2010, SGG est devenu un acteur luxembourgeois majeur. Nous avons construit un numéro un. En 2011 et 2012, grâce à l’acquisition d’IMFC et d'ANT, deux acteurs néerlandais, la société a doublé en très peu de temps. Il a fallu gérer la différence culturelle, ainsi que de taille. Cela a été une très belle réussite. En deux ans, nous avions complètement intégré leur business, tout en conservant leurs personnel et clientèle.

2010 marque la venue de Cobepa comme actionnaire majeur. Depuis le 1er janvier, nous entrons dans une nouvelle phase avec Astorg Partners, qui va nous permettre de croître davantage à l’international et de réaliser de nouvelles acquisitions. Nous voulons être plus actifs dans les endroits importants pour notre clientèle, notamment dans les pays anglo-saxons.

Astorg Partners est devenu votre nouvel actionnaire majoritaire. Quel est l’impact de ce changement pour vos collaborateurs? Ainsi que pour vos clients?

«Cobepa, qui était présent depuis cinq ans, vient, en effet, de céder ses parts à Astorg Partners, un groupe français. Je suis convaincu que ce nouveau partenaire va nous aider à atteindre nos ambitions en termes de croissance. En dehors de cela, il n’y aura aucun impact sur nos employés ni de conséquence pour nos clients. Le but d’une telle opération est de pouvoir leur donner plus de services. Le management reste toujours financièrement impliqué.

Qu’est-ce qui fait la force de SGG en 2016?

«Nos grands différenciateurs sont pour moi l’efficacité et la souplesse de nos services, notre vision à long terme, mais aussi et surtout notre esprit orienté solutions. C’est quelque chose qui s’entretient. Nous recherchons des entrepreneurs dans nos équipes. J’insiste pour que nos collaborateurs ne se limitent pas à la géographie où ils travaillent, mais aient une bonne compréhension d’autres marchés. C’est un état d’esprit à développer. SGG crée des solutions globales à des besoins toujours plus complexes. De nombreux clients veulent différents services dans différents pays. À nous d’y répondre. Les propriétaires de la société travaillent dans l’entreprise, c’est un gage d’engagement et d’implication.

Qui sont vos clients aujourd’hui?

«Il s’agit d’un mélange d’entrepreneurs, généralement européens, de sociétés plus internationales, et d’institutionnels dans le cas des segments private equity et immobilier. En termes de localisation, historiquement, notre première clientèle était européenne. Elle est aujourd’hui suivie de près par l’américaine, mais aussi par les pays émergents.

Comment envisagez-vous le rôle de vos managers?

«Je les considère avant tout comme des adultes, autonomes et responsables. Je leur fais confiance. Nous avons peu de niveaux de hiérarchie. Nous travaillons comme dans l’armée israélienne, les généraux sont devant. Ils montrent l’exemple et s’investissent. Je ne crois pas dans des managers qui ne font que manager. Chacun d’entre eux est 'hands-on' et dispose de clients à gérer. La notion de leadership est pour moi essentielle. On ne gère pas ses troupes par la peur, mais par l’empathie et la vision. Nos leaders d’aujourd’hui comme de demain doivent être investis et être capables de prendre des décisions rapides sur base d’informations imparfaites. Comme d’autres acteurs du secteur financier, un de nos grands challenges est d’attirer les bons talents. Nos managers contribuent à cet effort.

Nous ne vendons rien d’autre que de la matière grise.

Serge Krancenblum

Quelle est votre image en tant qu’employeur?

«Nous sommes un 'people’s business'. Dans notre métier, nous ne vendons rien d’autre que de la matière grise. Notre environnement de travail est particulièrement complexe, il nous faut les bonnes compétences. Nos métiers sont devenus plus sophistiqués et attractifs, c’est une chance. Si avant, il était difficile de faire venir certains profils dans une fiduciaire, ce n’est plus le cas. Nous avons à présent des talents issus des Big Four ou de grands cabinets d’avocats qui viennent frapper à notre porte. Ce sang neuf permet aux personnes déjà en place d’évoluer plus vite et de voir leur activité différemment.  

Amené à voyager environ 10 jours par mois, Serge Krancenblum met un point d'honneur à aller à la rencontre de ses clients internationaux. Ici un cadeau d'une partenaire kazakh.

Quels sont vos objectifs en termes de croissance?

«Nous tablons sur une croissance de 10%. Nous souhaitons faire doubler l’entreprise dans les cinq ans. Pour cela, il faut que SGG reste un employeur attractif. C’est indispensable pour son futur. Une autre ambition forte est que chacun de nos services offre une expérience cinq étoiles comme dans l’hôtellerie. Cet objectif traverse toute notre approche. Le service client et la culture du résultat font partie de l’ADN de la boîte.    

Rester en prise avec la clientèle est important pour moi.

Serge Krancenblum

Quel est votre rôle dans ce contexte?

«Je me consacre environ à 60% au développement du groupe, à 20% à différents clients importants un peu partout dans le monde, rester en prise avec la clientèle est important pour moi, et à 20% à la promotion de la profession et de ses différents métiers. Ma priorité est de déterminer qui sont les acteurs qui pourraient nous rejoindre et que nous pourrions racheter. Nous sommes particulièrement intéressés par l’administration de fonds spécialisés et les services de family offices.  

Vous êtes actif dans différentes associations professionnelles, vous présidez notamment la Limsa (Luxembourg International Management Services Association) et la Lafo (Luxembourg Association of Family Offices), ces mandats font-ils partie intégrante de vos missions?

«Français d’origine, je suis un fervent partisan de la Place. J’ai toujours perçu sa promotion comme une responsabilité collective. Je fais également partie des boards de la Luxembourg Private Equity Association et de la Fédération des professionnels du secteur financier Luxembourg. J’ai également eu la possibilité de réaliser plusieurs missions pour le gouvernement, dont sur la banque 2.0. La majorité de ma carrière s’est passée ici, je veux passer le témoin et m’assurer que la Place aille encore mieux après ma retraite. Promouvoir le Luxembourg à l’international est un devoir auquel je réponds à chaque fois que je vais à l’étranger.

La Place parvient à se réinventer à chaque modification de son environnement.

Serge Krancenblum

Grand défenseur de la Place, êtes-vous serein quant à sa croissance future?

«Je suis optimiste de nature. La Place parvient à se réinventer à chaque modification de son environnement. Elle a, par exemple, réussi à accepter et dépasser la fin du secret bancaire. Elle s’est aussi rapidement adaptée à la nouvelle donne internationale de Beps. La proximité entre le pouvoir politique, l’administration et les entreprises lui garantit une réactivité essentielle. Sa loi sur les sociétés est flexible et son terreau de professionnels est de qualité. La fameuse boîte à outils luxembourgeoise fonctionne sur différentes catégories de clients. Le Luxembourg est un petit pays pragmatique et volontariste avec relativement peu de corporatisme. Il n’a pas le choix que de réussir.

Percevez-vous l’avalanche réglementaire à l’œuvre comme un frein?

«Un acteur comme SGG vit de la réglementation. Si elle est intelligente et bien conçue, elle crée une sécurité sur le marché et donne du travail aux acteurs spécialisés. Aujourd’hui, la réglementation fait partie de toute bonne gestion. Elle n’est plus perçue uniquement comme une charge pour nos clients.»