Carlo Thill: «La croissance se trouvera dans l’acquisition d’une nouvelle clientèle et l’augmentation des crédits.» (Photo: Sébastien Goossens)

Carlo Thill: «La croissance se trouvera dans l’acquisition d’une nouvelle clientèle et l’augmentation des crédits.» (Photo: Sébastien Goossens)

Monsieur Thill, dans un environnement économique très changeant, peut-on dire que les banques sont obligées de se réinventer pour continuer à exister?

«Réinventer est tout à fait le bon terme. Les besoins des clients changent et aujourd’hui, il est clair que nous ne leur dictons plus la façon de consommer la banque. Ils peuvent la consommer quand ils veulent et où ils veulent, à travers une agence classique, un guichet automatique, une tablette, un smartphone ou leur ordinateur fixe à la maison. Nous devons donc être à même d’offrir le même niveau de service, quel que soit le canal que le client choisit.

Cette réinvention rime donc forcément avec digitalisation?

«Évidemment. Et cela implique aussi une revue complète de tous nos processes, afin de les rendre plus fluides, mais aussi identiques d’un canal à l’autre. Nous ne pouvons plus avoir un canal différent selon que le client soit en agence ou consulte ses comptes via une tablette. Le gestionnaire en agence doit avoir la même vue que le client. Nous avons un gros projet en cours de refonte du web banking: nous disposons actuellement de cinq plateformes différentes et nous sommes en train de les fusionner. C’est un projet qui se chiffre en plusieurs millions d’euros.

Nous sommes dans un environnement économique favorable.

Carlo Thill, président du comité de direction de BGL BNP Paribas

Cela constituera-t-il un levier de croissance pour 2017?

«Cela permettra en tout cas de réduire les coûts de fonctionnement. Pour le reste, la croissance se trouvera dans l’acquisition d’une nouvelle clientèle et l’augmentation des crédits. N’oublions pas que nous sommes dans un environnement économique favorable, avec une croissance de 4% et une population qui croît. Nous sommes d’avis que cela ne peut être que favorable au développement de notre business.

Avez-vous le sentiment que le secteur bancaire, d’une manière générale, est bien armé au Luxembourg pour s’adapter à la nouvelle donne?

«Si on prend l’exemple de la banque retail, au niveau du nombre d’agences, nous sommes au Luxembourg dans la moyenne européenne, avec environ 2.700 clients par agence. Mais dans les pays plus au nord, la situation est différente. Aux Pays-Bas par exemple, ce sont plus de 9.000 clients qui sont gérés par agence! Nous sommes certes plus traditionnels que ce genre de pays, mais on voit très bien quelle est la tendance.

Une récente étude de Deloitte a montré qu’il y a eu plus ou moins 25% de fréquentation en moins dans les agences en Europe. C’est évidemment dû aux nouveaux moyens de communiquer avec la banque. Cela nous oblige tous à revoir la façon dont fonctionnent nos agences. Les unes sont appelées à devenir plus légères, avec des conseillers qui se déplaceront davantage que par le passé. Les autres seront davantage spécialisées.

Comment vous positionnez-vous par rapport au développement des fintech?

«La question à la base est de savoir ce que sera la banque de demain. Est-ce qu’elle continuera à prester elle-même certains services, ou bien s’appuiera-t-elle sur les services de tiers? On se dirige probablement vers cette seconde option.

Au niveau du groupe, la question ne se pose plus. BNP Paribas a racheté, en début de semaine, la fintech Compte-Nickel qui permet d’ouvrir un compte dans un bureau de tabac en quelques minutes. Au Luxembourg, évidemment, la difficulté est de trouver la bonne opportunité pour investir. Alors nous préférons travailler étroitement avec certaines fintech. Nous sommes par exemple en train de développer une application MySelf au niveau du wealth management avec une société irlandaise, et ça se passe très bien. Mais nous restons évidemment vigilants aux évolutions sur ce marché.»