Martine Schommer: «Dans le domaine politique international, on apprécie le Luxembourg pour son engagement profond en faveur du multilatéralisme et du droit international.» (Photo: ministère des Affaires étrangères)

Martine Schommer: «Dans le domaine politique international, on apprécie le Luxembourg pour son engagement profond en faveur du multilatéralisme et du droit international.» (Photo: ministère des Affaires étrangères)

Votre profession contribue au rayonnement du Luxembourg à l’international. Quand vous en êtes-vous rendue compte pour la première fois?

Martine Schommer. – «Je dois avouer que j’ai choisi mon métier – et j’estime qu’être diplomate est un métier à part entière, – parce que je voulais aider à mieux faire connaître le Luxembourg et à défendre ses intérêts. Vers 1975/76 avec le gouvernement Thorn, j’ai commencé à prendre conscience de la vie politique et publique et ai eu envie d’y participer.

Une des options était d’entrer dans la fonction publique et donc au service de l’État. Cela peut sembler très vieux jeu, mais c’est la réalité. Dans notre famille j’étais la première à choisir cette voie qui ne plaisait pas du tout à mon grand-père, issue d’une famille de commerçants et d’industriels.

J’ai par la suite trouvé qu’on pouvait tout un chacun aider au rayonnement du Luxembourg dans toutes les petites ou grandes missions et chacun selon ses moyens.

Quelle est la marque de fabrique du Luxembourg à l’international? Et en France en particulier?

«Le Luxembourg est apprécié pour son esprit européen et pour son engagement en faveur de la construction européenne. Les trois présidents de la Commission européenne d’origine luxembourgeoise y ont significativement contribué, tout comme la présence d’institutions européennes à Luxembourg. Il ne faut pas non plus sous-estimer la tenue des sessions du Conseil dans notre pays trois mois par an qui contribue à notre visibilité internationale.

La place financière du Luxembourg représente un atout par son professionnalisme.

Martine Schommer, diplomate, ministère des Affaires étrangères et européennes

Ensuite, nous sommes perçus comme une économie ouverte, en fait la plus ouverte de l’OCDE, et innovante, capable de répondre aux défis à dimension réduite en cherchant constamment de nouvelles niches. La place financière du Luxembourg représente un atout par son professionnalisme, même si parfois elle fait encore l’objet de critiques. 

Dans le domaine politique international, on apprécie le Luxembourg pour son engagement profond en faveur du multilatéralisme et du droit international. Notre présence il y a quelques années au Conseil de sécurité des Nations unies y a contribué considérablement.

En France, notre pays est aussi vu à travers le prisme des relations transfrontalières. Avec plus de 90.000 frontaliers de France et une forte communauté française au Luxembourg nous avons des liens très spéciaux à travers tous les secteurs de la politique et de la société. Et la France nous voit comme des voisins francophones et largement francophiles, y compris dans le domaine culturel. Le fait que des générations de responsables luxembourgeois dans tous les domaines aient étudié en France crée une proximité supplémentaire.

Luxembourg est un pays «fiable, dynamique et ouvert». Reconnaissez-vous Luxembourg dans ces mots-clés retenus par le gouvernement?

Oui, je me retrouve globalement dans cette énumération. La fiabilité me semble la valeur la plus précieuse pour la perception qu’on peut avoir d’un pays. Notre image de marque dépend en priorité de notre excellence et de notre professionnalisme, et de notre prévisibilité dans le moyen et long terme.

Je suis très fière de notre ouverture politique, économique et surtout sociétale.

Martine Schommer, diplomate, ministère des Affaires étrangères et européennes

Pour ce qui est du dynamisme je crois que nous avons encore des progrès à faire pour mieux le montrer et sans complexes.

Je suis très fière de notre ouverture politique, économique et surtout sociétale. Réussir à créer une telle vie en commun multiculturelle est une prouesse. C’est un atout que nous devons défendre jalousement contre ceux qui prônent un repli sur soi. Pour le Luxembourg, une telle démarche serait non seulement absurde, mais aussi contraire à tous nos intérêts.

Que vous disent vos interlocuteurs à l’étranger sur le Luxembourg?

On entend un peu de tout, et ce à tous les niveaux.

Il y a d’abord ceux qui ne nous connaissent pas du tout, alors qu’ils sont à quelques kilomètres de la frontière commune. Cela m’a frappé quand j’étais en Allemagne et maintenant en France. Nous avons des histoires à raconter à nos voisins et devons nous y mettre sans relâche.

Il y a aussi ceux qui ne nous connaissent pas très bien, mais nous jugent ou nous critiquent. C’est évidemment en premier lieu en relation avec notre place financière et la fiscalité. Là, une information ciblée peut avoir un impact. Mais il y aura toujours des jaloux...

Enfin, il y a les amis fidèles du Luxembourg que j’ai rencontré dans tous mes postes en Europe, en Asie et en Afrique. C’est merveilleux, par exemple quand Stéphane Bern vante les avantages du Luxembourg face à un public français sous le charme.

Et qu’est-ce que vous leur répondez pour leur donner envie de visiter le Luxembourg?

Je vante la beauté de nos paysages très divers, la richesse de la vie culturelle et multilingue et les rencontres avec des gens de toutes origines. Et je rappelle à nos amis parisiens que nous sommes une destination quasiment «exotique» à seulement deux heures de TGV.

Je suis très fière du Luxembourg et de son engagement exemplaire en matière d’aide publique au développement.

Martine Schommer, diplomate, ministère des Affaires étrangères et européennes

À quelle occasion êtes-vous particulièrement fier du Luxembourg?

J’ai été fière quand nous avons en 2005 tenu le référendum sur le traité constitutionnel. J’étais à ce moment-là représentant permanent du Luxembourg auprès de l’Union européenne et nous venions de finir notre présidence semestrielle au cours de laquelle la France et les Pays-Bas avaient voté contre le même traité. La décision luxembourgeoise n’a pas changé le sort de celui-ci, mais cela a affermi notre crédibilité dans l’UE pendant quelque temps. 

Et je suis très fière du Luxembourg et de son engagement exemplaire en matière d’aide publique au développement. Tant dans la coopération au développement que dans l’aide humanitaire, nous avons montré que nous pouvons faire une certaine différence, notamment en Afrique de l’Ouest. Quand nous sommes devenus le 2e ou 3e contributeur au Niger, un des pays les plus pauvres du monde, j’ai eu une grande satisfaction de voir ce que cela signifie pour l’accès à l’eau, l’éducation, notamment des jeunes filles et bien d’autres domaines.

Quel est votre endroit préféré à Paris?

C’est le musée national des arts asiatiques ou musée Guimet, et plus particulièrement la rotonde dans laquelle se trouvait du temps de mes études universitaires une riche bibliothèque d’œuvres anciennes sur l’Asie que j’adorais consulter. Aujourd’hui, on peut encore visiter la rotonde mais l’accès aux livres n’est plus admis.

Je signale au passage que Joseph Hackin d’origine luxembourgeoise avait été directeur de ce musée, et qui a, avec son épouse, effectué des fouilles archéologiques importantes en début de 20e siècle en Afghanistan. Le couple est décédé en 1941 lorsque leur bateau a été torpillé. Les deux ont été reconnus comme compagnons de la Libération.

Et votre endroit préféré au Grand-Duché?

J’adore aller au centre de Luxembourg-ville et attends avec impatience qu’une partie des nombreux chantiers arrivent à terme pour que ce centre retrouve son charme, notamment les samedis matins avec le marché sur la place Guillaume.

Qu’est-ce que vous aimez retrouver quand vous revenez au Luxembourg?

Quand je reviens au Luxembourg, je me réjouis de retrouver mon jardin. C’est mon havre de paix, et en même temps le lieu où nous produisons des légumes et fruits pour l’année, le tout de la façon la plus naturelle possible. J’ai aussi un jardin de fleurs que je soigne et transforme. J’ai toujours aimé toucher la terre et la travailler. Le succès n’est pas toujours assuré, mais en général l’effort porte ses fruits.