Romain Paserot, secrétaire général adjoint de l’Aica, pointe les nouveaux défis pour le secteur de l’assurance. (Photo: Nader Ghavami)

Romain Paserot, secrétaire général adjoint de l’Aica, pointe les nouveaux défis pour le secteur de l’assurance. (Photo: Nader Ghavami)

Comment décririez-vous les missions de l’Aica?

Romain Paserot. - «Nos membres sont des autorités de contrôle de l’assurance. Ils sont au nombre de 220, en provenance de 140 pays. Nous couvrons 97% du marché mondial de l’assurance. L’association a été initialement conçue comme un forum d’échange des défis communs des superviseurs, de la manière dont on exerce ce métier. Mais, petit à petit, c’est devenu un endroit où on essaie de définir en commun des standards pour assurer la supervision. Nous disposons d’un processus d’élaboration de ces standards, et nos membres s’engagent à s’efforcer de les appliquer.

Est-ce qu’on fait de l’assurance de la même manière partout dans le monde?

«Non, les marchés, comme les produits, diffèrent. Mais l’objectif du contrôle est similaire. Dans tous les pays, l’assurance repose sur une promesse de l’assureur de payer un montant en cas de sinistre. Notre mission, c’est donc de garantir la protection des assurés, de faire en sorte que l’assureur respecte bien sa promesse. Nous mettons donc en commun des règles, des méthodes, pour définir ensemble les bonnes pratiques du métier. Ce sont des standards minimums, chacun peut aller plus loin et les adapter à la réalité de son marché. En plus de cela, nous avons défini un langage commun pour les superviseurs de groupes internationalement actifs. Nous devons être certains de parler la même langue.

Ces standards sont contraignants pour les assureurs?

«Ce sont des règles que nos membres s’engagent à appliquer, mais elles ne sont pas automatiquement applicables. Nous ne sommes pas un Parlement. Dans chaque pays, c’est le travail du législateur de développer ces règles. Nos standards servent d’abord de référence. Mais nous obtenons aussi des engagements de la part de nos membres superviseurs. De notre côté, nous avons aussi une activité d’évaluation. Nous nous rendons chez nos membres afin de voir où ils en sont dans l’implémentation de nos standards. 

Le thème de votre colloque s’intitule «réinventer l’assurance». Cela sous-entend quoi?

«Ça renferme plusieurs aspects. Premièrement, suite à la crise financière de 2008, les règles qui s’appliquent aux acteurs du secteur financier en général, et donc dans l’assurance, ont été profondément revues. Nous avons donc eu un travail important pour revoir et développer de nouvelles règles en tenant compte des conséquences de la crise financière. Ce cycle arrive à son terme, et nous nous tournons activement vers de nouveaux défis: la digitalisation, l’impact des nouvelles technologies, les cyber-risques, le risque climatique…

Nous devons analyser l’impact qu’ils auront sur la manière de faire de l’assurance et, donc, sur la manière dont nous allons superviser le secteur. Les superviseurs sont attentifs à l’impact que ces changements provoquent sur la manière d’exercer leur métier. Pour tous ces risques, l’assureur est à la fois exposé et fournisseur de solutions. Il peut subir une attaque informatique, mais aussi développer des produits pour couvrir le cyber-risque.

En tant que superviseurs, à quel niveau êtes-vous impactés par ces changements?

«Nous devons réfléchir à la manière dont nous pouvons apporter une réponse à ces nouveaux défis. Nous devons être attentifs à ce qui se passe, déceler les évolutions. Nous réfléchissons à la manière d’établir le meilleur dialogue possible avec les assureurs sur ces sujets afin de pouvoir les aider. Nous développons aussi des documents d’analyse dans lesquels nous essayons de poser les problèmes et de proposer la meilleure manière de les appréhender.

On parle souvent du superviseur comme du «gendarme» du marché de l’assurance. C’est une image dans laquelle vous vous reconnaissez?

«Il y a une limite à la comparaison. L’objectif de nos autorités membres n’est pas la sanction. Ils ne sont pas là juste pour dresser des procès-verbaux. Notre but est de faire en sorte que l’assureur soit présent pour tenir les engagements qu’il a pris. Nos règles sont des moyens de parvenir à ces objectifs. Elles sont contraignantes, mais dans le bon sens. Pour l’assureur, tenir sa promesse est aussi capital pour la bonne marche de ses affaires. La confiance est essentielle dans ce métier. La relation doit donc être constructive, mais exigeante avec les assureurs.

Pourquoi le choix de Luxembourg pour cette 25conférence annuelle?

«La conférence annuelle termine une semaine qui réunit tous nos membres pour l’assemblée générale de notre association. Comme nous sommes une organisation mondiale, nous avons établi le principe de la rotation entre pays, plutôt que d’inviter tous nos membres à notre siège de Bâle. C’est donc le Commissariat aux assurances qui s’est proposé de nous inviter cette année, et cette proposition a été retenue. Nous en sommes enchantés, l’accueil a été excellent et, pour beaucoup de nos membres, cela a été l’occasion de découvrir la ville.»