Le Lëtzebuerger Land relate la naissance de l'offshore luxembourgeois. (Photo: Lëtzebuerger Land)

Le Lëtzebuerger Land relate la naissance de l'offshore luxembourgeois. (Photo: Lëtzebuerger Land)

Strange Fruit

Les banquiers privés et avocats d’affaires sont surpris que leurs connections panaméennes puissent surprendre. Évidemment que le Luxembourg, comme centre financier, apparaît dans les «Panama Papers». L’établissement de sociétés offshore est une des spécialités grand-ducales de l’opaque Holding 1929 à la (pas plus transparente) Société de gestion de patrimoine familial. Mais l’évasion fiscale, assurent-ils, ce seraient de «vieilles histoires» des «séquelles du passé», des artefacts de «tempi passati». Ils plaident des circonstances atténuantes et demandent qu’on replace cette affaire dans son contexte historique (c’est-à-dire il y a deux ans). Attention à l’anachronisme, disent-ils, il ne faudrait surtout pas juger le passé à partir des valeurs morales et fiscales actuelles. Au Luxembourg, 30 ans d’évasion fiscale systématisée et érigée en modèle d’affaires ont été maladroitement enterrés sous des hymnes à «la nouvelle ère de la transparence». Or, de leak en leak, par petits bouts, cet héritage encombrant – que personne ne veut assumer – remonte. Mais quelle histoire les «Panama Papers» et autres «LuxLeaks» racontent-ils sur le Luxembourg? Celle d’une stratégie transnationale de classe? D’un acharnement thérapeutique? D’un État compétitif qui a su tirer profit de la mondialisation? Ou simplement de la banalisation de l’offshore? Le Lëtzebuerger Land relate la naissance de l'offshore luxembourgeois.

L’espoir meurt en dernier

Le paquet «entreprises» de la réforme fiscale annoncée jusqu’ici reste loin derrière les attentes et revendications de l’Association des banques et banquiers, Luxembourg (ABBL). Selon les notes préparées par l’ABBL à l’attention du gouvernement, les banquiers réclament une baisse radicale du taux d’imposition pour les collectivités, à un taux global de 15%, et de ce fait une abolition de l’impôt commercial communal. C’est peut-être leur revendication la plus drastique, celle en tout cas dont la réalisation aurait des conséquences d’envergure aussi au niveau institutionnel. Les autres demandes – abolition de l’impôt sur la fortune, aménagement des dispositions mères-filles, levée de la retenue à la source sur les dividendes payés à partir du Luxembourg – ne sont surprenantes en ce qu’elles visent surtout les avantages pour leurs clients que pour les banques elles-mêmes. Peut-être parce que le taux d’imposition des banques après la réforme ne sera pas si mauvais en comparaison avec ceux appliqués en Irlande ou en Suisse? Reste à voir si le lobby des banques réussira à faire passer le message auprès du gouvernement libéral d’ici la fin du mois, lorsque le Premier ministre se prononcera sur l’état de la Nation.

L’amour et le partage

En théorie, tout va bien. Dans la belle Villa Mousset, route de Luxembourg, Ralph Waltmans, trentenaire dynamique, officiellement «coordinateur culturel» de la Ville d’Esch, est assis derrière une longue table en bois, sous une toile énorme de Fernand Roda représentant des champs de blé, son portable à portée de main. Les gens qui le connaissent disent qu’il travaille jour et nuit à boucler le dossier de candidature pour «Esch 2022 – capitale européenne de la culture», qu’il devra remettre d’ici le 22 mai. Enfin, ce n’est pas vraiment la candidature d’Esch-sur-Alzette toute seule, mais de toute la région Sud. Déjà, beaucoup de gens revendiquent être à l’origine de cette idée: Lydia Mutsch (LSAP), alors encore maire d’Esch, l’aurait lancée il y a deux ou trois ans, idée reprise ensuite par sa successeure Vera Spautz (LSAP) y affirme-t-on. Non, cela aurait plutôt été une idée du représentant de Bettembourg au syndicat Pro Sud qui en serait à l’origine, promet le maire Laurent Zeimet (CSV). «Nous aussi voulions nous porter candidat», raconte pour sa part le maire écolo de Differdange, Roberto Traversini. «Mais quand nous avons appris qu’Esch se présentait, nous nous sommes retirés en sa faveur – insistant toutefois que la région tout entière devrait être associée à l’organisation de cet événement.» La réglementation européenne prévoit qu’une municipalité définie dépose un dossier de candidature. Mais, confirme Dan Biancalana (LSAP), maire de Dudelange et président du syndicat Pro Sud, si les 10 autres communes du syndicat étaient initialement en faveur d’une telle candidature, elles ont toutes toujours insisté que cela devrait être un projet vraiment commun. C’est alors que la belle théorie commence à s’effriter. Le Land donne un bref aperçu d’une épopée politico-culturelle.