Près de deux ans après les Panama Papers, Mossack Fonseca jette l’éponge. C’est ce qu’a appris l’International Consortium of Investigative Journalists (ICIJ), qui avait eu accès à 11,5 millions de documents et avait reconstitué une cartographie des sociétés domiciliées au Panama par des intermédiaires du monde entier au profit de personnalités de tous ordres.
L’ICIJ a publié mercredi une déclaration dans laquelle Mossack Fonseca écrit que «la dégradation de sa réputation, la campagne médiatique, les pressions financières et les actions irrégulières de certaines autorités du Panama ont causé d’irréparables dommages, avec pour conséquence fatale la cessation totale de l’activité commerciale».
Le cabinet ajoute qu’il «continuera à réclamer justice» et coopérera avec les autorités afin de «démontrer qu’aucune infraction n’a été commise».
Les deux antennes luxembourgeoises déjà liquidées
Mossack Fonseca a en effet eu maille à partir avec la police du Panama, qui a arrêté, en février 2017, ses deux fondateurs, Ramón Fonseca et Jürgen Mossack, soupçonnés d’avoir blanchi des capitaux dans le cadre du scandale de corruption Odebrecht, le groupe de BTP brésilien. Ils ont finalement été relâchés deux mois plus tard.
Selon l’ICIJ, Mossack Fonseca compte fermer l’ensemble de ses antennes dans le monde d’ici la fin du mois. Sachant que ses deux entités luxembourgeoises ont déjà été balayées. Mossack Fonseca & Co, enregistrée en 2010, avait été cédée en novembre 2016 par ses fondateurs Jürgen Mossack et Ramón Fonseca à leur autre société de droit luxembourgeois, MossFon. Laquelle l’a mise en liquidation le 2 février 2017. Le dernier bilan déposé au Registe de commerce et des sociétés luxembourgeois pour l’année 2015 indique des pertes cumulées de 23.742 euros.
Le même sort attendait MossFon. Le 28 décembre 2017, Jürgen Mossack, Ramón Fonseca et Samuel Fernandez Cortez ont comparu devant un notaire luxembourgeois afin de mettre la société MossFon, créée en 2009, en liquidation volontaire. Le bilan déposé le 31 décembre 2016 indiquait cette fois 3,5 millions d’euros de pertes cumulées. La radiation a été enregistrée par le RCSL le 11 janvier dernier.
Manne fiscale après le scandale
Ironie de l’histoire: la justice luxembourgeoise avait eu à toiser une citation directe de Mossack Fonseca Panama à l’encontre des dirigeants de Prime Corporate Solutions, qu’elle accusait de fraude fiscale au moyen de savants montages passant par Panama et le Costa Rica. Les juges avaient finalement estimé que le cabinet panaméen n’avait pas apporté la preuve de son préjudice.
Les documents analysés par l’ICIJ avaient mis au jour 214.000 sociétés écrans ayant existé au cours de la période 1977-2015, et dont la domiciliation au Panama a souvent permis à leurs bénéficiaires de contourner le fisc de leur pays. Du football à la politique, aucun milieu n’a été épargné, et les révélations ont permis à de nombreux États d’Europe, d’Amérique, d’Afrique et d’Asie de récupérer plus de 500 millions de dollars (404,6 millions d’euros) de recettes fiscales, selon le calcul de l’ICIJ.
Au Luxembourg, les investigations menées par la CSSF dans le sillage des Panama Papers l’avaient conduite à épingler neuf entités financières, dont quatre banques.
L’Administration des contributions directes avait également tenté de rebondir sur les révélations en demandant des comptes aux avocats cités par l’ICIJ, mais s’était heurtée à la résistance farouche du Barreau au nom du secret professionnel de l’avocat.