Situation géopolitique tendue avec le dossier ukrainien, statistiques économiques américaines mitigées, croissance atone dans la zone Euro, incertitudes sur la croissance chinoise etc….Tous ces paramètres n’ont pas empêché les marchés d’actions d’afficher en février un gain significatif avec une hausse mensuelle de 4.49 % de l’Eurostoxx 50 et de 4.31 % du S&P 500 américain. Situation que beaucoup d’experts qualifient de paradoxale, ces derniers soulignant également que les prix d’autres classes d’actifs, traditionnellement décorrélées du prix des actions, ont également monté à l’image des obligations d’État, des obligations d’entreprises, de l’or… Nouveau miracle ou simple mirage?
L’ explication principale de ce phénomène est probablement à trouver dans la persistance de taux d’intérêt extrêmement faibles dans les principaux pays développés; quel «intérêt» d’aller placer son argent sur des bons du Trésor à 3 mois allemand rapportant un taux annualisé de 0.08 % (hors frais), français (0.18 %), américain (0.03 %), voire italien (0.28 %). L’achat sur des durées de placement à 2 ans vous rapportera un peu plus : 0.16 % en Allemagne et 0.27 % en France!
Dans un tel contexte que d’aucuns qualifieront d’incitation à la prise de risque, voire de pousse au crime, les marchés des actions sont devenus le nouvel eldorado. Les afflux de liquidité poussent les prix à la hausse à un rythme bien supérieur à la croissance des profits (à titre d’exemple, le S&P 500 a progressé de 30 % en 2013 avec une hausse des profits limitée à environ 6 %). Les obligations d’État longues ont aussi connu un regain d’intérêt depuis quelques semaines, les taux qui avaient été atteints sur les échéances longues (3 % sur la maturité 10 ans aux USA en début d’année) devenant attractifs comparés à la maigreur des taux du court terme.
Pour que la fête continue…
La question clé pour que la fête continue (ou ne s’interrompe pas trop brutalement) est donc de savoir si les taux d’intérêt directeurs des banques centrales vont rester bas longtemps (ce que les banquiers centraux qualifient de «extended period of time»).
Si l’on commence par les États-Unis, il semble y avoir dans le discours plutôt «colombe» de la nouvelle présidente de la FED une dissociation entre ce qu’on qualifie de «tapering» (autrement dit la réduction progressive de la politique monétaire d’assouplissement quantitatif) et une éventuelle remontée des taux. Madame Yellen insiste également sur le fait que la cible d’un taux de chômage à 6.5 % (qui devrait déclencher selon la «forward guidance» de la FED un début de normalisation des taux), n’est plus d’actualité, car trop réducteur de la réalité en ne tenant pas compte, par exemple, des emplois à temps partiel. La présidente de la FED prépare ainsi le terrain à une poursuite de la politique de taux zéro pour encore longtemps surtout que les chiffres d’inflation restent modérés (+1.6% en glissement annuel pour les prix à la consommation).
Concernant la zone Euro, la BCE a laissé inchangé son taux directeur à son niveau historiquement bas de 0.25 % jeudi dernier. La BCE a par ailleurs relevé très légèrement sa prévision de croissance pour 2014 à 1.2%. Concernant l’inflation, les prévisions de la BCE s’inscrivent dans un tableau de marche un peu idyllique, avec une progression des prix de 1 % en 2014, de 1.3 % en 2015 et de 1.5% en 2016; mais les faits sont têtus et pour l’instant les chiffres d’inflation sont bas, +0.8 % en glissement annuel pour les prix à la consommation dans la zone Euro avec des poches quasi déflationnistes comme l’illustre la situation de l’Espagne dont le taux d’inflation frôle zéro (voir graphique); la menace déflationniste ,angoisse ultime de Mr Draghi, n’est pas une chimère et dans un tel contexte la politique de taux bas, l’oxygène actuel des marchés financiers, sera encore présente un bon moment.