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La huitième édition du MILIA, le Marché International des Contenus Interactifs, une création Reed Midem, s'est déroulée du 10 au 14 février sous les palmiers et le soleil de Cannes. Plus de 7000 décideurs, représentant 2.500 entreprises de quelque 50 pays, issus des secteurs des loisirs interactifs, de la télévision interactive, des télécommunications, des médias mobiles et sans fils, des réseaux à large bande et d'Internet se sont côtoyés lors de cet important rendez-vous afin de conclure des accords stratégiques de partenariat, de présenter de nouveaux produits et de démasquer de nouvelles tendances. Conférences, salon professionnel, concours de start-ups, concours de jeunes créateurs, village des développeurs de jeux, conférences de presse, présentation "zapping" des meilleurs sites Internet, espaces rencontres, cocktails, tout y était pour faire de ce rendez-vous un lieu privilégié d'échanges et de découvertes. 

Cette année, en partenariat avec Forrester Research BV, le Think Tank Summit accueillait plus de 2000 participants attentifs aux deux pistes thématiques: stratégie de développement et nouvelles tendances technologiques. Conçues pour permettre aux professionnels d'appréhender l'évolution constante des innovations technologiques et des nouveaux modèles économiques sur le marché des contenus interactifs, les conférences font défiler sur scène les leaders mondiaux de cette industrie. Cette année ne fut pas une exception. Parmi les thèmes saillants, les réseaux à large bande, la télévision interactive, le "wireless", les jeux et les nouveaux modèles économiques ont provoqué des discussions animées.

Dans le panel sur les réseaux à large bande, on a pu entendre Dr. Marcus Englert de Kirch New Media affirmer qu'à force de s'acharner à vouloir trouver la "killer application', on passait à côté de l'essentiel, c'est-à-dire, imaginer des "killer attributes" pouvant faire de notre produit ou service quelque chose de convoité. Parmi ces attributs, notons par exemple l'exclusivité de contenu, la personnalisation ou encore l'aspect divertissement. Quant à lui, M. Vanderborght de Canalweb questionnait la viabilité des modèles économiques actuels et préconisait un modèle de contenu payant en association avec les télécoms, où chacun empocherait 50%: application du modèle Minitel au "large bande". (Canalweb se trouve d'ailleurs en difficulté financière et a annoncé après le Milia que son contenu deviendrait payant. Actuellement, il est accessible gratuitement et ce n'est que la publicité qui génère des revenus, mais apparemment pas assez?) Candace Johnson de Europe Online Networks participait également à ce panel et affirmait que ce n'est qu'avec des standards ouverts qu'on irait de l'avant et que le "large bande" conquerrait l'Europe. Europe Online compte 1 million d'utilisateurs câblés et prévoit d'acquérir cette année 100,000 nouveaux clients qui profiteront de son offre satellite à la maison.

Matthew Nordan de Forrester Research révélait dans une discussion sur le "wireless" que 40% de la population européenne accéderait à des services UMTS en 2005. Cependant, les revenus générés par la publicité ne suffiraient pas (on s'en doutait !) à stopper les pertes financières des opérateurs télécoms qui ne commenceront à voir le bout du tunnel qu'en 2012. D'ailleurs, des fusions et accords de partenariats sont inévitables et déjà bien amorcés (Telia AB et NetCom AB en Suède, par exemple). Donc, de nouveaux générateurs de revenus sont indispensables. Selon M. Nordan, les opérateurs devraient explorer les pistes telles que des applications mobiles pour entreprises, des applications de collaboration, des applications permettant à deux ou plusieurs appareils de communiquer entre-eux (laissez libre cours à votre imagination !) ou tout simplement l'intégration de jeux dans l'offre de services.

Des jeux? Et bien oui. La société Mobiligence faisait remarquer qu'il existe neuf fois plus d'appareils mobiles que de télévisions, soit 212 millions d'utilisateurs en Europe en 2001. Et, malgré les critiques à propos du WAP, les jeux constitueraient un bon "business" WAP, tout simplement parce que le commun des mortels aime se divertir et que la clé de la réussite réside dans la personnalisation et le respect du contexte dans lequel se trouve l'utilisateur. John Riccitiello de Electronic Arts affirmait que le jeu atteint lentement mais sûrement tous les types de plates-formes. D'ailleurs, la firme américaine attaque les marchés français, allemands et britanniques cette année avec une offre de jeux impressionnante. Pour les clients américains, le jeu "Majestic" risque de créer un réel phénomène de société puisqu'il adopte le concept d'immersion totale: "Majes-tic'it plays you".. Attendez-vous à ce que Majestic s'immisce dans votre vie privée par tous les moyens?

Une critique générale portait également sur l'aspect assez "froid' du web. En effet, plusieurs sociétés parlaient de la nécessité "d'humaniser" le web à travers d'agents intelligents 3D (non, pas comme Miss Boo, on parle ici d'agents vraiment intelligents?) pouvant donner au web un visage, utile pour guider l'internaute sur un site, lui livrer des newsletters ou tout simplement l'accueillir.

Sémaphora, une jeune société parisienne, a développé une technologie permettant aux entreprises de non seulement adopter un agent intelligent à leurs couleurs, mais aussi de développer le répertoire de conversations et de réactions de l'agent sans pour autant détenir des connaissances informatiques. D'autres compagnies comme Cantoche et Virtools proposent des produits similaires.

Autre possibilité intéressante permettant une "immersion totale", la société Digimask propose, à partir de deux photos numériques, de vous livrer gratuitement votre tête en 3D. Imaginez les possibilités en commerce électronique où vous pourrez "essayer" les lunettes avant de les acheter ou encore assumer l'identité de James Bond dans un jeu et même envoyer votre tête parlante par GSM en guise de message? La jeune compagnie britannique proposera à terme votre corps en 3D. Et le business modèle? Gratuit pour les utilisateurs, les commerçants ou développeurs de jeux devront acheter une licence pour la technologie.

Zden, une start-up

luxembourgeoise au Milia

Reed Midem et Forrester Research avait organisé cette année un concours de start-ups dans les domaines du "wireless", de services ou technologies à large bande, de télévision interactive, de jeux ou de contenus. Une première sélection faite par des incubateurs en Europe ainsi que le résultat du tri des dossiers reçus directement représentaient plus de quarante jeunes entreprises. De ces quarante entreprises prometteuses, les dix gagnants ont eu l'opportunité de présenter leur stratégie aux quelque 2000 décideurs présents aux conférences dans l'espoir de trouver des investisseurs ou des partenaires. Parmi les gagnants, une entreprise franco-luxembourgeoise: Zden. J'ai rencontré M. Denis Harscoat, fondateur et CEO.

Créée début juin 2000, le lancement opérationnel n'a eu lieu que très récemment (fin décembre) mais Zden fait déjà beaucoup parler d'elle dans la presse générale et spécialisée internationale. La vision de Zden se base sur l'économie des fichiers numériques, la Z-conomie. Le principe de l'échange de fichiers joue un rôle de plus en plus important dans notre économie. Le procès contre Napster a braqué le projecteur sur cette pratique courante et controversée. Zden offre à ses membres une plate-forme de distribution et de stockage (500MB gratuits pour chaque membre) centralisée, sécurisée et? complètement légale. En effet, imaginé avec le créateur de contenu en tête, qu'il soit individu, société ou portail, le système permet à n'importe qui, de n'importe où de gérer, d'échanger ou de vendre ses contenus numériques avec un copyright et en toute sécurité. C'est le créateur qui décide du prix et du type de licence à accorder. Zden désire rassembler les personnes et les entreprises qui créent et distribuent du contenu ayant une valeur pour le marché et garantit que les contenus seront rigoureusement protégés. A l'heure actuelle, les fichiers les plus achetés et vendus sont principalement des photos, du web design, de la vidéo et des fichiers MP3. Cependant, tout type de contenu numérisé peut y trouver sa place: articles, présentations, rapports, livres, etc.

Devenir membre ne coûte rien et le système de micro-paiement se base sur l'unité du "Zee", où 1000 Zees valent 1$. La loi de l'offre et de la demande déterminera le niveau des ventes pour chaque membre. Tous les trois mois, le membre peut toucher en dollars le produit de ses ventes, moins une commission de 10 à 20% que perçoit Zden. Le délai des trois mois permet à Zden de réagir en bloquant le compte du membre s'il s'avérait qu'il vendait des contenus volés. "Mais cela sera rare", rassure M. Denis Harscoat, "puisque la confiance représente un élément important dans la communauté et d'ailleurs, lors de l'inscription, le membre doit jouer la carte de la transparence. On se méfiera de l'individu qui omet des informations sur sa personne." Afin de donner vie à la communauté, les membres actifs seront rémunérés pour leurs efforts, par exemple, en participant au système d'évaluation des fichiers achetés, semblable au système d'Amazon, ou encore en encourageant d'autres personnes à s'inscrire ("referrals").

En date du mois de février, Zden comptait déjà plus de 80,000 membres dans le monde entier. Convaincu que Zden a un rôle important à jouer dans notre économie planétaire et qu'elle répond à un réel besoin, Denis Harscoat et son équipe, composée de seize employés de dix nationalités différentes, ont réussi à se rallier à des partenaires technologiques et financiers solides, ce qui leur a permis de démarrer l'année avec Euro 1,000,000. Ils préparent maintenant leur premier round de Venture Capital et vous pourrez les rencontrer prochainement dans une soirée First Tuesday.

www.zden.com

Le dernier mot...

Seules trois sociétés luxembourgeoises affichaient présentes dans l'espace d'exposition. SES Multimédia (www. astra.lu/) présentait quelques utilisations possibles de son réseau à large bande comme la diffusion de riche contenu (voir par exemple le projet European Navigator sur l'histoire de la création de l'Europe, www. ena.lu), l'accès à Internet par satellite en Italie ou encore son nouveau système interactif bidirectionnel, le "Broadband In-teractive System'. Europe Online Networks (www.europeonline.com) montrait les avantages de téléchargement de fichiers volumineux par satellite et son offre "divertissement". Enfin, Luxsat (www.luxsat.com) exposait sa proposition de contenu multimédia "à la demande". A part les kiosques de ces trois entreprises, seuls six participants en provenance du Luxembourg s'étaient déplacés.

Le Milia se passe toujours dans un tourbillon d'idées, de découvertes et de rencontres. En trois ou quatre jours, on côtoie les leaders du domaine, on découvre les nouveautés et on anticipe le potentiel des technologies et des applications présentées, revenant même avec quelques bonnes idées pour son propre business?

www.milia.com