Mark Tluszcz continue de croire dans la puissance d'internet et ses modèles d'activité. (Photo: Christophe Olinger)

Mark Tluszcz continue de croire dans la puissance d'internet et ses modèles d'activité. (Photo: Christophe Olinger)

La success story de Mangrove Capital Partners, construite il y a 15 ans autour de trois associés, Mark Tluszcz, Hans-Jürgen Schmitz et Gerard Lopez, semble se poursuivre.

Les 12 derniers mois ont en effet permis de concrétiser trois opérations d'importance, une entrée en bourse, une cession industrielle et une vente à un fonds private equity, sur des sociétés du portefeuille du fonds capital-risque, pour une valeur totale cumulée de plus d'un milliard de dollars.

«Au vu des entreprises sur lesquelles nous pourrions miser, nous pensons que la prochaine année à un milliard n'est pas si loin», estime Mark Tluszcz, CEO et managing partner de Mangrove. Suite au départ de Gerard Lopez en octobre dernier de la gestion opérationnelle de l'entreprise, M. Tluszcz, 48 ans, en est devenu le visage, le porte-parole au quotidien.

Ce triple succès remonte même à la fin de l'année dernière, avec l'entrée au Nasdaq de Wix, levant plus de 127 millions de dollars. La plus grosse IPO d'une entreprise internet israélienne. «Wix est un plus grand succès financier que Skype», ajoute Mark Tluszcz. Une comparaison qui présage du potentiel de la société puisque Skype, qui reste le coup de maître historique de Mangrove, avait été racheté en 2005 à eBay pour 4,1 milliards de dollars, deux ans après sa création, portée par un investissement de 20 millions d'euros.

Mangrove a cru dès 2007 dans Wix, basée à Tel-Aviv, en devenant progressivement l'un de ses principaux actionnaires. Wix revendique sur son site internet plus de 57 millions d'utilisateurs, reposant sur un modèle simple: la possibilité pour les clients de créer gratuitement un site internet auquel sont adossés quelques services connexes qui sont eux payants.

Deuxième opération au palmarès 2014, la cession en septembre dernier du spécialiste de la sécurité informatique Lumension, issue de la fusion de PatchLink et du luxembourgeois Securwave (le 1er investissement de Mangrove, il y a plus de 13 ans), au fond américain Clearlake Capital.

Fin octobre, Nimbuzz – le principal service de messagerie instantanée en Inde – dont Mangrove est alors l'actionnaire majoritaire est quant à lui repris par le Britannique New Call dans le contexte de la création d'un nouveau conglomérat télécom en Inde. Un deal qui porte la valeur de la société à quelque 250 millions de dollars selon les observateurs.

Réussir la sortie

Ces trois opérations confirment que la sortie d'un portefeuille reste le moment qui permet de jauger la capacité des acteurs du capital-risque à créer de la valeur. «Nous analysons 2.500 dossiers par an, pour investir dans cinq voire six sociétés. Nous voulons rester précis en nous penchant sur les domaines que nous connaissons», indique Mark Tluszcz.

L'expérience, la concertation en équipe, une part d'intuition et, forcément, un brin de chance sont nécessaires pour prendre la décision qui permettra d'obtenir des résultats notables qui se mesurent généralement au bout de sept à huit ans.

Depuis 2000, l'Europe a généré 35 champions mondiaux d'une valeur égale ou supérieure au milliard de dollars. 14 d'entre eux ont été dans un premier temps soutenus par du capital-risque. Deux d'entre eux, Skype et Wix, l'ont été par Mangrove, entré dans le club fermé des acteurs capables de répéter ce type de succès.

L'aide ménagère, version en ligne

Mangrove entend dès lors poursuivre sur cette lancée en diversifiant ses investissements pour être moins dépendant d'un seul «coup», en restant focalisé sur les domaines connus, en Europe, en ce compris la Russie et Israël. Au rayon des secteurs prisés, les services en lignes figurent en haut de l'agenda. À l'instar de Helping, une plateforme de réservation en ligne d'aides ménagères née à Berlin.

Pour sa première levée de fonds de 13,5 millions d'euros, la société (lancée le 29 mars 2014) active dans huit pays en Europe et en Amérique latine a été soutenue entre autres investisseurs par Mangrove, Phenomen Ventures, Point Nine Capital et Lukasz Gadowski.

«Nous ne sommes qu'au début de la révolution d'internet qui va atteindre toutes les industries, estime Mark T. Le 'freemium' qui propose beaucoup de services gratuits et des services annexes payants est clairement un modèle porteur.»

Prochaine cible: le secteur financier. «Nous en avons assez de payer, sans aucune raison, des frais qui ne sont pas justifiés, déclare, sans détour, Mark Tlusz. Les banques sont loin d'être innovantes et il n'y a pas de raison que les changements induits par internet ne les concernent pas.»

Pérenniser la structure

Déployée depuis le Luxembourg, l'aventure Mangrove conserve son port d'attache et ajoute une représentation régulière en Russie où, via son associé David Waroquier, l'équipe s'est taillée une réputation solide en investissant dans le leader local du commerce en ligne, KupiVip.

Le marché israélien est quant à lui coordonné sur place par Roy Saar. Avec l'arrivée successive de plusieurs associés depuis 2007, puis le départ de Gerard Lopez (il demeure actionnaire à hauteur d'un tiers), Mangrove, qui emploie une dizaine de personnes, entend regarder vers l'avenir, au-delà de ses dirigeants historiques ou actuels.

«Nous voulons construire la firme afin qu'elle soit pérenne au-delà des fondateurs», note Mark Tluszcz. Sans pour autant changer fondamentalement la philosophie de communication, en préférant que les entreprises dans lesquelles Mangrove investit parlent pour le fonds via leurs réussites.