Malika Moukah, head of human ressources, SGG (Photo: David Laurent/Wide)

Malika Moukah, head of human ressources, SGG (Photo: David Laurent/Wide)

Madame Moukah, quelle est votre vision du métier de DRH?

«Pour moi, le responsable des ressources humaines est un peu le fou du roi. C’est quelqu’un qui, mine de rien, écoute et est écouté. C’est un conseiller proche des décisions stratégiques. C’est une interface, une forme d’intersection entre le personnel et ceux qui le dirigent. Le DRH prend la température, en permanence, auprès des salariés, et il sert de fil conducteur vers la direction. La communication est essentielle et elle doit fonctionner du haut vers le bas, comme du bas vers le haut, avec toujours les notions de confiance et d’équité érigées en vertus cardinales.

Quel serait le profil idéal du DRH?

«Avant de devenir DRH, je pense que l’on naît avec le sens de l’humain. Il faut aimer les gens et savoir se faire apprécier aussi. Avec cette base, on se construit beaucoup sur le terrain au fil du temps et de l’expérience. On peut alors se professionnaliser vraiment et passer des relations aux ressources humaines. Personnellement, je pense qu’il faut être capable de sourire, il faut être vraiment très à l’écoute, de tous et tout le temps. Capter les idées de tous, se construire sa propre idée, pour la défendre ensuite et la faire adopter.

J’ai envoyé récemment une note à mon équipe. J’y donnais les sept ingrédients de ce que j’appelle la potion magique qui fait le bon DRH: représenter la direction au sein du personnel, faciliter la communication dans les deux sens, faire respecter les règles de vie, participer et soutenir les stratégies de la société, aider les responsables à mieux encadrer le personnel, être le manager du budget HR et être gardien de la paix. Je pense que si on réunit et met en œuvre ces sept ingrédients, alors le challenge est gagné. Mais il faut accepter la critique constructive et savoir se remettre en question sinon la recette ne fonctionne pas.

Dans quel contexte exercez-vous vos fonctions au sein de SGG?

«Acteur de premier plan sur la place luxembourgeoise depuis plus de 50 ans, SGG a développé une véritable expertise pour servir au mieux ses clients en matière de corporate services et family office. Implantée au Luxembourg, nous disposons d’un réseau international de bureaux localisés dans une douzaine de pays, dont la Belgique, Chypre, les Pays-Bas ou la Suisse.

Nous avons un savoir-faire, des équipes multiculturelles et pluridisciplinaires, soit environ 270 personnes, avec les filiales. Toutes ces personnes, fiscalistes, comptables, juristes, sont organisées autour de pools de compétences et de langues. La société est en perpétuel développement. Nous avons ainsi recruté quelque 30 collaborateurs supplémentaires ces deux dernières années. Et tout est géré en interne, par le service que je chapeaute et qui compte quatre personnes, moi compris.

Mes filles, comme je les appelle affectueusement, reçoivent en plus l’aide précieuse d’un responsable des salaires rattaché à notre département finance. La recette ne doit pas être mauvaise si on en juge par les reconnaissances extérieures reçues: alors que le département en tant que tel a été mis en place en 2008, nous étions HR Team of the Year 2009, nommés aux paperJam Awards 2010, Best Place to Work 2011… Cette confiance que le marché nous témoigne est importante à nos yeux, d’autant que ‘trust’ est la devise de notre société.

Et l’entreprise continue à se développer avec des besoins précis?

«Oui, nous sommes une société toujours à l’affût de talents pour coller à notre développement. Nous avons le recrutement proactif. Nous avons besoin, dans notre secteur, de profils très différents et dans des niveaux de qualification aussi divers qu’intéressants. Nous sommes notamment très attentifs à la relève que nous devons organiser. Il faut la prévoir, comme il faut anticiper la diversification dans le secteur d’activité. Nous sommes donc en quête permanente de juniors et de bons profils. Nous avons d’ailleurs actuellement une dizaine de postes ouverts…

Rencontrez-vous des soucis pour le recrutement? Quelles sont les méthodes que vous préférez appliquer?

«Nous ne subissons pas de pression très forte, déjà parce que notre turn­over est tout à fait normal. Il y a des mouvements bien entendu. Mais il est déjà arrivé que d’anciens collaborateurs, qui avaient tenté leur chance ailleurs, se manifestent pour revenir chez nous. Certains ont même été repris! Mais nous n’avons pas de réels problèmes pour recruter puisque nous recevons beaucoup de candidatures spontanées, plusieurs dizaines par mois.

Nous avons un moment rencontré quelques soucis pour trouver certains profils pointus qui devaient aussi être germanophones. Ceci a été le lot de tous les recruteurs de la Place, mais ça va beaucoup mieux.
Quant aux méthodes, on utilise assez peu les annonces dans la presse, nous optons plus facilement pour les ‘best practices’, les nouveaux réseaux sociaux. Il y a aussi, de notre part, une veille permanente, très attentive quant aux différentes sources de recrutement.

Par-dessus tout, j’aime me rendre avec mon équipe sur le terrain, dans des foires et salons comme MooviJob. Il m’est arrivé également d’aller assister à une remise de diplômes. Je pense qu’il est important d’avoir une visibilité en tant que société, en tant qu’employeur potentiel. Et puis je me lance des challenges, pour dénicher des jeunes qui en veulent, qui apporteront un plus, des éléments qui ont des compétences et de la personnalité.

Que mettez-vous en œuvre pour fidéliser votre personnel ou attirer de nouveaux collaborateurs?

«Depuis trois ans, nous avons complètement revu le bien-être au travail dans tous ses aspects. Le package salarial et les avantages divers en font évidemment partie et nous sommes compétitifs sur la Place à cet égard. Mais nous avons aussi insisté sur l’environnement, sur l’esprit d’équipe, sur l’espace de travail, l’aspect sécurité-santé-hygiène, la souplesse et l’équilibre de chacun. Les quatre axes majeurs de notre politique RH sont la fidélisation, la valorisation, la reconnaissance et le développement personnel.

Nous donnons par exemple la priorité aux promotions internes. Nous insistons beaucoup sur la culture d’entreprise et défendons notre image d’une société ou il fait bon travailler. C’est d’ailleurs un facteur fondamental dans un processus de recrutement chez nous. Au-delà des compétences, j’aime m’assurer que le candidat potentiel adhère à nos objectifs et s’intègre facilement à nos équipes en place, à la culture de notre société. Nous engageons nos nouveaux collaborateurs dans l’optique d’une longue et fructueuse carrière.

Le métier a-t-il changé ces dernières années?

«Tous les métiers ont changé, se sont automatisés. Pour la plupart, c’est la technologie qui a apporté de nouvelles approches. Par contre, je dirais que les ressources humaines se sont… humanisées. Beaucoup de choses ont évolué, dans la formation, le coaching, tous les domaines qui touchent aux ressources humaines. On travaille volontiers sur le développement personnel, l’estime de soi, le sentiment d’appartenance. De plus en plus, on accompagne le salarié dans sa réussite, professionnelle et personnelle… En ce qui me concerne, je continue à être guidée par la bonne vieille méthode de la pyramide des besoins de Maslow qui conduit vers la réussite.

Les candidats changent-ils aussi?

«De mon expérience, je retiens des observations. Nous voyons clairement de jeunes diplômés qui en veulent. C’est une génération qui veut réussir, au risque de rester ‘job-addict’. Cette génération est très prometteuse, mais elle manque peut-être de patience…

Quels sont vos chantiers actuels en ressources humaines?

«SGG est en développement et le travail du département RH s’optimise. Nous avons des objectifs et un canevas: faire la même chose, mais à plus grande échelle. Les perspectives sont intéressantes et manifestement la société a trouvé les bons ingrédients.»

 

C.V. - L’expérience et le sixième sens

Malika Moukah, 45 ans, a le sens de la formule. «Je suis persuadée que l’on naît avec le sens des relations humaines pour devenir ensuite responsable des ressources humaines. Le grand bain des RH, je suis tombée dedans. J’ai appris à nager. Et je compte faire des compétitions.» Elle est dans le métier depuis près de 20 ans et a appris et progressé au fil des étapes de sa carrière. Après des formations universitaires en anglais et en psychologie, elle était entrée au service d’une start-up luxembourgeoise, très orientée finances. Bras droit du directeur des finances et du personnel, elle s’est occupée des RH, tout naturellement. Et elle y a pris goût. «Entre le capital financier et le capital humain, j’ai définitivement opté pour l’humain.» Entrée chez SGG (ex-Mercuria) en 2007, elle a gravi les échelons au service des Ressources Humaines et suivi beaucoup de formations spécifiques. «On m’a fait confiance. J’ai suivi mon sixième sens. On m’a permis de restructurer le service des RH après la fusion. J’en suis responsable depuis trois ans. C’est une belle expérience à l’école de la vie.»