Quels investissements choisir? Les experts prodiguent leurs conseils. (Illustration: Maison Moderne)

Quels investissements choisir? Les experts prodiguent leurs conseils. (Illustration: Maison Moderne)

En 2016, que choisir? Paperjam a sondé les contributeurs réguliers de sa chronique financière sur Paperjam.lu pour tenter d’obtenir des conseils, dans un environnement qui demeure incertain. Pas sûr en effet que la croissance globale soit au rendez-vous. Si l’embellie revient, elle ne sera que timide. Raison pour laquelle les banques centrales, hormis la Fed, devraient poursuivre des politiques monétaires accommodantes, avec des taux d’intérêt au plus bas, voire négatifs aux États-Unis. Du côté des bourses, les mouvements devraient s’apparenter à celui d’un yo-yo. Prudence et diversification doivent donc être de mise pour les investisseurs. Avec une prédilection pour les actions européennes et asiatiques.

Quelles sont les orientations dans un contexte de bourses relativement peu performantes et de taux d’intérêt bas?

Les rendements obligataires à des niveaux très bas

«2016 devrait rester marquée par un environnement de politiques monétaires globalement expansionnistes. Parmi les principales banques centrales, seule la Réserve fédérale américaine restera sur le chemin de la normalisation, même si le rythme de hausse de taux d’intérêt devrait rester très lent. L’inflation tardera à s’accélérer tandis que les niveaux de croissance des principales économies développées se maintiendront sous leur potentiel. Les rendements obligataires resteront donc à des niveaux très bas. L’environnement restera plus favorable à la croissance de bénéfices, ce qui s’explique principalement par la baisse des matières premières, le contrôle des coûts et des taux d’intérêt très faibles. Au niveau de la demande, c’est surtout le volet domestique dans les pays développés qui sera porteur.»

Guy Ertz
Responsable de la stratégie d’investissement
BNP Paribas Wealth Management Luxembourg

Investir dans leur entreprise plutôt que sur les marchés

«2015 a été décevante pour la plupart des classes d’actifs. Les performances boursières dans l’eurozone ont fait exception en raison du plan massif de QE de la BCE. 2016 s’annonce aussi difficile, avec des taux de croissance durablement ‘mous’ un peu partout et un ralentissement marqué des pays producteurs de pétrole et de matières premières. Les profits des sociétés ont atteint un palier aux États-Unis et continuent d’être de mauvaise qualité en Europe. Les politiques monétaires vont rester encore extrêmement accommodantes, y compris aux États-Unis. Cet environnement de taux est favorable aux actions sur des niveaux qui ont bien corrigé, en étant sélectifs sur le choix des fonds ou des valeurs. Compte tenu du risque, cette classe d’actifs devrait avoir une pondération neutre. Nous surpondérons toujours l’immobilier de qualité avec des belles opérations si on met un capital conséquent associé à une dette très basse (bureaux, hôtellerie...). Les entrepreneurs devraient investir dans leur entreprise plutôt que sur les marchés, et ceux qui peuvent se le permettre, rechercher des pépites dans des start-up prometteuses. Et éviter les marchés de taux à haut rendement.»

Jacques Chahine
Président
Sicav Digital Funds

Des opportunités dans le non-traditionnel

«Dans une période où les actions et les obligations affichent une forte corrélation, les investisseurs doivent réexaminer leur approche de diversification et doivent faire face à des défis systémiques mondiaux. Compte tenu de ces niveaux de corrélation, de la volatilité des marchés d’actions et des rendements très faibles observés sur les marchés obligataires, les classes d’actifs non traditionnelles – l’immobilier, les OPCVM alternatifs et les produits structurés – devraient présenter un attrait particulier en 2016. Au niveau des actions, les européennes et japonaises, favorisées par des tendances positives, devraient surperformer. Quant aux prix des matières premières, ils ont peut-être enfin touché le fond, mais la remontée s’annonce difficile, lente et inégale. Enfin, en ce qui concerne les devises, on devrait observer une plus grande stabilité du taux croisé.»

Stefan Van Geyt
Group chief investment officer
KBL European Private Bankers

Un rapport risque/rendement moins attrayant

«Notre scénario de croissance économique mondiale modérée reste tout de même inchangé. Pour l’instant, nous ne croyons pas que les éléments précités mettront en péril le redressement de l’économie mondiale. La création d’emplois aux États-Unis et l’augmentation de la confiance des entrepreneurs dans la zone euro, par exemple, en témoignent. En outre, le faible prix du pétrole peut donner un coup de fouet au comportement des consommateurs occidentaux. Sans tomber dans un pessimisme exagéré, nous estimons que le rapport risque/rendement pour les actions en 2016 sera moins attrayant que les années précédentes. L’époque où nous pouvions profiter de la moindre baisse des cours boursiers afin d’acheter des actions semble révolue. La politique de soutien des grandes banques centrales et la vaste présence de liquidités dans le système financier ne suffisent plus à contenir les pics soudains de la volatilité.»

Jean-Yves Leborgne
Portfolio manager
ING Private Banking

Quels sont les conseils généraux qui peuvent être prodigués dans ce contexte pour 2016?

Privilégier les marchés de la zone euro

«Les marchés actions et les obligations d’entreprises offrent les meilleures perspectives de rendement au sein des actifs financiers traditionnels. Les marchés actions à privilégier seront le Japon (avec couverture du risque devise), l’eurozone et les États-Unis. En ce qui concerne les obligations d’entreprises, nous privilégions les marchés de la zone euro, en particulier les obligations d’entreprises de qualité, celles à haut rendement et convertibles. Pour les deux dernières catégories, il est important d’investir par le biais de fonds diversifiés. Les fonds alternatifs Ucits pourront également faire partie d’un portefeuille diversifié, étant donné la flexibilité plus importante des gestionnaires. La divergence des politiques monétaires entre les États-Unis et l’eurozone suggère un potentiel de dépréciation pour la monnaie unique vis-à-vis du billet vert. Un objectif crédible serait 1,05 (valeur d’un euro en dollar) début 2017.»

Guy Ertz
Responsable de la stratégie d’investissement
BNP Paribas Wealth Management Luxembourg

Veiller à diversifier son portefeuille

«La croissance économique restera faible et fragile en 2016. Des tendances lourdes (endettement excessif, démographie moins porteuse…) freinent en effet le potentiel de l’économie mondiale. Par ailleurs, la sévère chute des prix pétroliers contribue à l’intensification des pressions déflationnistes. Dans ce contexte, les politiques monétaires devraient rester très accommodantes et les taux se maintenir à des niveaux bas. Les actions, en dépit de valorisations assez tendues, continuent dès lors d’offrir les perspectives de rendements les plus attractives en termes relatifs, ces dernières étant toutefois inférieures à leur moyenne historique. Seul l’investisseur disposant d’un horizon de temps suffisamment long et en mesure de supporter une volatilité élevée pourra se positionner sur cette classe d’actifs. L’investisseur veillera également à diversifier son portefeuille et à se montrer très sélectif en misant notamment sur des actifs de qualité.»

Damien Petit
Conseiller en investissement
Banque de Luxembourg

Poursuivre une stratégie sur le long terme

«Le moment n’est pas venu pour les investisseurs de jeter l’éponge. La Chine demeure une préoccupation. Cependant, ceci n’est pas nouveau. Les investisseurs doivent avoir conscience que l’année sera marquée par une croissance faible. Dans ce contexte, nous estimons que les actions offrent toujours davantage de valeur que les obligations. Pour les investisseurs actifs et avisés, la correction de janvier représente une opportunité d’achat. Il convient aux investisseurs de poursuivre une stratégie de placement à long terme, centrée sur la qualité et bien diversifiée. Des pressions s’exercent sur les marges des entreprises en raison de la faiblesse de la demande finale et des surcapacités dans un certain nombre de secteurs. Il est donc nécessaire d’opérer des distinctions entre les différentes classes d’actifs et au sein de celles-ci. La faiblesse du prix du pétrole est un point positif pour beaucoup d’entreprises en Europe. Nous nous concentrons sur les entreprises solides, avec un historique de rendement et de croissance durables.»

Claude Ewen
Sales director Luxembourg
Columbia Threadneedle Investments

Maîtriser ses émotions

«Les investisseurs doivent plus que jamais veiller à se constituer un portefeuille de placements diversifié, avec plusieurs types de produits investissant eux-mêmes sur plusieurs zones géographiques. Car une diversification optimale selon le profil d’investissement permet de maîtriser le risque d’un portefeuille et d’en préserver le rendement potentiel. Même en période d’excès de volatilité sur les marchés financiers. Les investisseurs ont donc intérêt à rester fidèles à eux-mêmes et à leur propre profil de risque. Ensuite, il s’agira de maîtriser ses émotions. Il ne faut donc pas perdre de vue qu’investir sur les marchés nécessite une vue à long terme pour éviter toute désillusion. Au niveau de la poche actions, nous maintenons nos préférences régionales pour les actions de la zone euro et du Japon qui, en relatif, affichent des valorisations moins élevées que les actions américaines. Au niveau de notre sélection de titres, nous nous concentrons sur les entreprises dont les bilans sont les plus sains et qui offrent une croissance du dividende durable. Sur le marché obligataire, le momentum est, selon nous, passé pour les obligations à haut rendement (high yield). En revanche, les obligations d’État et d’entreprises de qualité sont encore l’un des rares bons produits de diversification par rapport à une exposition aux actions.»

Jean-Yves Leborgne
Portfolio manager
ING Private Banking