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L'IRM, ou comment donner à une entreprise e-business, via la Toile, les moyens d'optimiser la gestion de sa relation avec ses internautes-clients.

Un acronyme ambigu

Au rayon des abréviations qui ont le vent en poupe dans la sphère du CRM, l'IRM («Internet Relationship Management», également connu sous le nom e-CRM'ou de GRI, décliné en «Gestion de la Relation sur Internet» ou «Gestion de la Relation à l'internaute») creuse petit à petit son nid, et le marché devrait atteindre, selon les prévisions d'IDC, 5 milliards de dollars en 2003.

Les spécialistes ne s'accordent pas toujours sur les réalités qui se cachent sous ces trois lettres, et le présent article prendra le parti de se pencher sur l'IRM en tant qu'ensemble de solutions de gestion de la relation client basées sur l'utilisation d'Internet et destinées aux entreprises branchées de près ou de loin (des sites d'e-commerce aux sites plus ou moins vitrines en passant par les portails) à la Nouvelle Economie.

 

IRM et CRM, même combat'  Oui et non. Un intérêt et une ligne d'horizon communs (connaître au mieux les clients d'une société pour atteindre au plus vite la rentabilité) et des armes différentes (utilisation ou non du Réseau), voilà tout. Internet, par son évolutivité, laisse en tout état de cause présager la création de véritables nouvelles applications de gestion de la relation avec leurs clients, innovantes et diversifiées, que nous aborderons un peu plus loin de manière pratique, mais dont la substantifique moelle a déjà été «théorisée».

Pour reprendre les termes utilisés par Octo Technologies, qui a publié en septembre dernier le bien nommé «Livre blanc de l'IRM», la nouveauté fondamentale qu'apporte Internet tient en la possibilité d'industrialiser de bout en bout une relation personnalisée avec le client. Et les auteurs du rapport de continuer, précisant que les nouveaux outils IRM ultra modernes permettent de retrouver sur Internet la même qualité de service que chez le petit épicier de quartier qui anticipait tous vos désirs? A cette différence près que l'épicerie est désormais mondiale. Les mots sont lâchés, lourds de signification: industrialiser de bout en bout une relation personnalisée, qualité de service proche de celle des commerces de proximité.

Là où le CRM est basé sur une judicieuse complémentarité homme-informatique, le «vendeur», qui utilise une solution CRM, et le client, l'IRM quant à lui planche sur une relation informatisée (via Internet) depuis le début jusqu'au stade le plus élevé de développement de la relation. Internet y intervient en qualité non pas de complément, puisqu'il tient plutôt le rôle de canal constant d'interaction. Les caractères constant et immédiat étant justement à l'origine d'une ultra-personnalisation de la relation, plus poussée qu'en CRM.

L'arbre qui cache la forêt

Vaste programme pour trois petites lettres. Internet porterait en lui tous les germes susceptibles de perfectionner le service personnalisé au consommateur, aussi bien en matière de B2B que de B2C. Or personne ne peut nier que l'avenir de nombreux sites commerciaux tient au bout du fil de leur capacité à capitaliser la valeur économique de leurs clients à long terme par la fidélisation optimale, et que le défi de l'IRM est justement de mettre au point les meilleures stratégies afin de parvenir à ce but ultime des entreprises Internet, surtout dans le contexte actuel: parvenir (enfin) à la rentabilité, plutôt que d'uniquement engranger quelques revenus.

Nous n'établirons pas ici une typologie exhaustive des solutions IRM disponibles sur le marché, mais examinerons brièvement quelques cas d'entreprises qui ont choisi telle ou telle solution basée sur Internet et permettant de transformer leur site en véritable outil de vente, et de laisser bien loin la vitrine commerciale.

On remarque d'emblée que les balbutiements de l'IRM, telles que la possibilité de communiquer via e-mail avec réponse type préformatée, la signature d'un livre d'or sur le site web de la société, sont reléguées aux oubliettes, et que l'IRM est en route vers la maturité, bien qu'il ne soit pas encore généralisé et que la solution globale d'une plate-forme IRM qui couvrirait l'entièreté des besoins n'existe pas.

Actuellement, ce sont principalement les techniques de collecte d'informations sur les utilisateurs du site qui tiennent le haut du pavé, ce que l'on appelle de manière générique le «profiling». Pour ce qui est du renvoi de contenu ciblé en fonction du profil, il faudra encore attendre un peu avant de passer à une pratique courante étendue.

Le Web Call Center virtuel

Linkeasy. Depuis janvier 2001, le groupe Marmara, spécialiste du voyage, a mis en place «Linkeasy», un Web Call Center virtuel sur son site web, créé par Linkeo sur le modèle ASP. Marmara avait constaté que de nombreux internautes quittaient le site avant d'avoir terminé leur réservation, car ils se trouvaient confrontés à une difficulté. Le contact humain destiné à retenir le visiteur manquait, et cette absence est désormais comblée par «Linkeasy», qui utilise la voix comme canal de communication.

Il s'agit de boutons d'appel disposés sur les pages tout au long du processus de réservation, et qui permettent de mettre en relation, gratuitement, le visiteur qui le désire avec un conseiller de la firme. Il suffit donc à l'internaute de cliquer sur le bouton-lien, d'entrer son numéro de téléphone dans la fenêtre qui apparaît, et d'attendre quelques secondes que Marmara lui prodigue ses conseils et réponde à ses questions.

Les premiers résultats sont positifs, le taux de transformation des visiteurs en clients ayant augmenté grâce à ce nouveau service. En outre, du côté des coûts, Linkeasy offre l'avantage de facturer en temps réel les communications téléphoniques engendrées chez Marmara, ce qui permet de maîtriser les dépenses en permanence.

L'agent de voyage compte étendre le service à sa newsletter, en y disposant un bouton d'appel permettant aux 29 000 abonnés de contacter immédiatement Marmara dans le cas où une des promotions décrites les intéresserait.

Linkeasy a déjà été choisi par 40 clients, dont le broker on-line français Fimatex (www.fimatex.fr).

Chat et / ou forum

Les procédés dérivés du call center classique sont légion et, dans le même genre, le site de comparaison de prix Laventis (qui est devenu www.leguide.com) utilisait d'ailleurs une solution de Dialog Online, qui se propose de «réinventer le service client sur Internet» pour les entreprises en mettant à leur disposition des call operators qui se relayent pour dialoguer avec les e-clients. Dans le cas de Laventis, le contact s'effectuait via un chat. Hélène Foucteau, de Le Guide.com, nous a expliqué que le Web Center a été abandonné pour la bonne et simple raison qu'il n'était pas rentable.

En lieu et place, la société a installé un service baptisé «Conso Forum», forum sur lequel  les internautes peuvent poster leurs messages («Partagez vos expériences d'achats en ligne!», «Demandez une médiation juridique avec un site marchand en cas de problème!», «Demandez des infos juridiques sur l'achat en ligne à notre juriste!»). Le forum permet aux internautes d'échanger leurs avis, de se donner mutuellement des conseils face à leurs expériences d'achats? et au Guide de connaître jour après jour qui sont ses clients et ce qu'ils veulent. Les abonnés à la Newsletter peuvent même demander un conseil personnalisé à la juriste spécialisée dans le droit de la consommation, qui livre ses conseils et modère le Forum. Un rendez-vous de médiation en ligne, via un chat direct, peut être organisé par Le Guide.

Logiciels de personnalisation de l'offre et communication entre canaux

Quand on parle de connaissance du visiteur dans le domaine de la personnalisation, on ne se limite pas aux informations recueillies grâce à la personnalisation, par exemple, d'un portail.

Le sommelier en ligne Wine and Co (www.wineandco.fr) n'a pas hésité à investir lourdement dans l'IRM, Marc Perrin, son PDG, considérant que l'IRM est tout bonnement leur seule valeur ajoutée sur le créneau des vendeurs de vin en ligne. Outre un logiciel qui permet aux employés du site de basculer d'un canal d'accès au client (centre d'appel, fichier client des commerciaux, données recueillies sur le Web par les e-mails, l'analyse de l'audience, le forum,?) à l'autre, un sommelier automatique a été mis en place. Il s'agit en fait d'un logiciel de personnalisation de l'offre. La personnalisation one-to-one y est possible, grâce au module «collaborative filtering», qui envoie par e-mail des conseils à un client en s'inspirant des goûts et habitudes de consommation de l'ensemble des consommateurs du site, recueillis grâce aux divers outils précités.

Jouer sur la complémentarité

Mais quels outils doit donc choisir une entreprise de la Nouvelle Economie pour gérer sa relation client? Une solution CRM? Une solution IRM globale? Plusieurs outils IRM? Un mix IRM-CRM? Il semble judicieux de ne pas mettre tous ses ?ufs dans le même panier. Comme le signale le décidément très complet Livre Blanc de l'IRM, les études récentes montrent qu'une des clés du succès pour les «dot com» consistera à (?) être capables d'avoir des interactions autres que le web avec le client.

D'ailleurs, du côté des créateurs de solutions CRM bien implantés, tels que Vantive, Clarify ou Siebel, on travaille dur pour ajouter la dimension Internet aux outils CRM existant. Plutôt que de passer le flambeau, le CRM devrait à terme fusionner avec l'IRM, pour la plus grande satisfaction des porteurs de projets en applications IRM. Quelles seront les modalités de la fusion' A l'avenir de nous le dévoiler.

En tout état de cause, du côté des entreprises qui achèteront ces solutions, la règle numéro un devrait être la suivante: replacer le service au client au centre des priorités, puisque c'est lui qui fera la différence entre l'offre de deux sites équivalents pour le reste. Même si la toute récente enquête sur le commerce électronique et Internet dans les entreprises menée par la Chambre de Commerce et le CRP Gabriel Lippmann révèle qu'actuellement seulement 8% des entreprises interrogées (parmi lesquelles à la fois des entreprises de l'économie traditionnelle et de la Nouvelle Economie) estiment qu'Internet influence le comportement d'achat de leurs clients'et 40% pensent qu'Internet n'influencera pas ce domaine, même à très long terme. 

Annexe:

1Du CRM à l'IRM

Au commencement était le CRM, né de la nécessité pour toute entreprise de l'économie traditionnelle de positionner son client au centre de ses préoccupations, étant donné notamment qu'un client satisfait est plus facile à fidéliser, et qu'un client acquis coûte moins cher en termes de promotion qu'un client à recruter.

Des outils informatiques ont vu le jour au fil des ans: gestion de Centres d'Appels, Automatisation des Forces de Vente, toutes aides spécifiques aux équipes commerciales sur le terrain. Soit dit en passant, il existe d'ores et déjà des solutions CRM destinées aux personal digital assistants.

Quid d'Internet et des sociétés de la Nouvelle Economie? L'ampleur du développement d'Internet ne pouvait bien sûr pas échapper au marché du CRM, puisque le nouveau média présente des atouts choc en termes de relation et de gestion de la base clients. Pensez donc! Internet permet à la fois d'entrer en contact avec le client de manière directe et suivie avec chaque client, quel que soit le continent où réside le client?

2       Le CRM mis K.O.?

Le moins que l'on puisse dire est que la thématique du client sur Internet et du client et Internet ne laisse pas indifférent. De là à conclure que dans le monde des sociétés relevant d'Internet la gestion de la relation client par le sixième média va damer le pion au «classique» CRM, être préféré unanimement par ces sociétés, il n'y a qu'un pas'qui aurait peut-être été franchi, il y a encore quelques mois, au beau temps où certains voyaient en Internet un raz-de-marée qui dépoussiérerait sur son passage les concepts les plus solides de l'économie.

Pourtant, dans le supermarché de la relation client, le rayon des bémols au crédit du marché IRM n'est pas vide. Le holà doit d'emblée être mis, puisque les outils IRM présentent encore des coûts prohibitifs (parfois plusieurs millions pour une solution dite «complète») et que le marché est encore immature (même si les grands du CRM s'y positionnent, l'IRM est encore souvent le fait de start-ups aux dents longues).