Urbaniser au centre de la localité ou étendre le périmètre de logement à Leudelange-gare, c'était la question. (Photo: commune de Leudelange)

Urbaniser au centre de la localité ou étendre le périmètre de logement à Leudelange-gare, c'était la question. (Photo: commune de Leudelange)

Le plan directeur sectoriel «Logement» a été présenté dans le détail mardi 1er juillet. Leudelange, commune de 2.400 âmes tenue par le parti libéral à quelques encablures de la capitale, a été intégrée par le gouvernement dans les communes à développer en priorité, dans l’espoir de faire baisser les prix de l’immobilier résidentiel en périphérie de Luxembourg. Le plan directeur est disponible auprès de l’administration communale, mais personne n’avait encore eu la curiosité de le consulter individuellement. Il faut dire qu’une réunion publique de présentation, ayant eu lieu mardi, a visiblement satisfait la curiosité des habitants.

Comme il fallait s’y attendre, la zone (il s’agit en fait de deux zones séparées par la route principale) retenue, une trentaine d’hectares qui pourraient à plus ou moins long terme accueillir entre 600 et 750 logements supplémentaires, se situe en zone verte interurbaine, aux lieux dits Schleiwenhaff Est et Ouest, aux abords de la gare de Leudelange. Une partie de ces terrains (entre 9 et 10 hectares) est la propriété de Pitt Pirotte, fondateur du groupe immobilier Property Partners, et de Philippe Fettes, qui en ont hérité.

Pour autant, la sélection de ces deux zones peut étonner, lorsqu’on se rappelle qu’en février 2010, le ministre de l’Intérieur Jean-Marie Halsdorf (CSV), avait écrit au commissaire de district à Luxembourg pour lui dire qu’il n’était pas en mesure d’approuver une délibération du conseil communal de Leudelange du 28 avril 2008 (alors dirigée par le bourgmestre DP et ancien journaliste Rob Roemen, décédé depuis), qui avait adopté un projet de modification du plan d’aménagement général à Leudelange-gare.

Totalement inopportun

«Le projet», écrivait le ministre, «risque de manière substantielle d’hypothéquer un développement urbanistique selon les règles de l’art de la localité de Leudelange». Jean-Marie Halsdorf considérait alors que «l’intégration dans le périmètre d’agglomération des fonds en question, d’un ordre de grandeur de 9,3 hectares, est contraire aux principaux objectifs du programme directeur d’aménagement du territoire».

La lettre du ministre rappelait qu’il convenait d’abord d’aménager les terrains situés à l’intérieur de la localité avant d’entamer le grignotage des zones vertes. «Étant donné que Leudelange dispose à l’heure actuelle encore d’importantes réserves foncières, il s’avère totalement inopportun de créer un quartier quasiment à l’extérieur de l’agglomération et par conséquent il y a lieu de renforcer la structure bâtie», soulignait Halsdorf dans sa lettre du 3 février 2010.

Le ministre se rangeait ainsi derrière la position de la Commission d’aménagement au ministère de l’Intérieur, qui dans un «avis-conseil» du 20 janvier 2009, jugeait que les projets d’urbanisation au Schleiwenhaff constituaient une sorte d’aberration dans l’aménagement du territoire et le développement urbain. «La commission constate que le développement des terrains aux confins de la structure bâtie est désignée comme prioritaire et non le développement de terrains libres de toute construction à l’intérieur de la localité», lit-on dans l’avis que paperJam.lu a pu consulter.

Incitation sans proximité

Ainsi, il existe des terrains viabilisables à l’intérieur de la commune, mais ces surfaces «potentiellement urbanisables» au centre de Leudelange, selon les arguments de ses édiles communaux, sont «exploitées par des jeunes agriculteurs qui n’ont pas l’intention de créer des logements sur leurs terrains».

Les membres de la Commission d’aménagement étaient unanimes pour dire que la création d’un îlot d’habitations à l’écart d’une localité était «à éviter», d’autant plus que la création des lotissements à proximité de la gare, mais aussi dans le rayon du centre commercial City Concorde à Bertrange, n’était pas de nature à dissuader ses futurs habitants à prendre leur voiture.

Car si la gare pouvait inciter les gens à utiliser les transports en commun pour se rendre au travail, en revanche, cette proximité avec le centre commercial ne permet pas la viabilité économique des commerces de proximité. Pour aller chercher son pain, il est nécessaire de prendre sa voiture...

L'ombre de Daniel Miltgen

Les choses en étaient donc restées là et on se demande comment Leudelange a pu quand même, quatre ans après le refus du ministre de l’Intérieur, se retrouver dans les communes prioritaires.

À bien y regarder, on s’apercevra que le classement de Leudelange dans le Plan sectoriel logement (le plan-même remonte à 2001 et au règne du ministre du Logement et des Classes moyennes Fernand Boden, CSV) est un peu antérieur à la formation du gouvernement de Xavier Bettel, à une époque où un certain Daniel Miltgen était président du groupe de coordination interministériel Plan sectoriel logement. Le haut fonctionnaire, qui a conservé son grade de premier conseiller de gouvernement, a été dans l’intervalle écarté du ministère du Logement et n’est plus désormais que directeur du Fonds du logement... qui prévoit d’ailleurs de construire du logement social à Leudelange.

La ministre DP du Logement, Maggy Nagel, dont certains doutent de l'implication dans les questions de logement – vu une présence limitée à deux heures et demie par semaine au ministère, selon les mauvaises langues – pourtant décrété priorité du gouvernement Bettel, aura sans doute quelque mal à défendre la pertinence de l'intégration du Schleiwenhaff à Leudelange-gare dans le plan sectoriel logement.