Hors champ mais pas hors sujet, face caméra ou hors micro, la communication du pouvoir cherche sa juste place. (Photo : Christophe Olinger / archives)

Hors champ mais pas hors sujet, face caméra ou hors micro, la communication du pouvoir cherche sa juste place. (Photo : Christophe Olinger / archives)

Xavier Bettel a prononcé son premier discours aux Nations Unies. Jean-Claude Juncker fait passer le grand oral à sa Commission européenne. Il y a des symboles qui marquent une période, comme un jalon kilométrique le fait d’un marathon.

Ce sont deux hommes d’État qui, par les hasards dont l’actualité est friande, jettent ainsi le pays dans la lumière des projecteurs. C’est presque devenu une habitude ces temps-ci. On n’a peut-être jamais autant parlé en bien du Luxembourg! Et, comme s’il fallait qu’un arc-en-ciel achève de planter le décor dans un ciel d’embellie, le pays se voit confirmer son légendaire triple A, une note qui reste un Graal pour bien des économies occidentales.

Le Grand-Duché continue à travailler à sa visibilité, à ses atouts qui n’ont plus de secret, à sa politique transparente, à son économie en redécollage et en diversification, à sa société en évolution. Formidable! Et la note de sympathie générale semble aller de pair, donnant au Luxembourg ce côté «friendly» que dégagent naturellement ou veulent dégager ses responsables.

On a envie d’applaudir, voire d’en redemander. C’est quand même un changement dans la ligne de conduite générale, qui était par essence plus conservatrice. Cela dit, tout qui, venant de l’étranger, découvre les us et coutumes de la vie politique et socioéconomique du pays reste étonné par cette proximité existant entre les plus hauts responsables élus et le citoyen moyen dont ils sont les représentants. L’émanation démocratique et populaire fait partie du paysage, au même titre que les courts chemins, et cela a toujours été le cas. Pas beaucoup de prise de tête pour avoir la ligne directe du ministre, voire son numéro de portable (à utiliser avec modération, avec discernement et sans se tromper de destinataire).

Courrier à envoyer à la tour d’ivoire

Finalement, les dernières tours d’ivoire sont peut-être occupées pas des hauts fonctionnaires. Ceux-ci peuvent rester drapés dans le sens des responsabilités, dans la dignité de la connaissance parfaite (et parfois exclusive) des rouages de la machine étatique (c’est vrai que, souvent, les grands commis de l’État restent, alors que les détenteurs de maroquins changent) ou dans le droit de réserve élémentaire.

Comme dans toutes les règles, il y a des exceptions. Des communications plus ou moins orchestrées, intempestives, discrètes ou maladroites, c’est selon. Désormais, il est un peu plus difficile d’obtenir une réponse simple à une question pas nécessairement stratégique. Des responsables de dossiers renvoient à une procédure rappelée en interne: il faut écrire au ministre, pour baliser les interrogations et espérer que le titulaire des réponses soit autorisé à les donner.

Le silence était déjà d’or dans les discussions tripartites et budgétaires. La communication se maîtrise. Elle nécessite un minimum de verrouillage ou de métier (ou les deux) pour y arriver, sans doute. Et puis les expériences, parfois pathétiques, du passé, y compris récent, plaident probablement pour cette méfiance accrue vis-à-vis des petites paroles qui s’envolent, dans la salle des pas perdus (pour tout le monde). Les écrits restent. Les lettres de noblesse aussi.