Déjà positionnée en tant que ville smart, Barcelone veut se doter d'un campus de nouvelle génération. L'une des villes évoquées comme exemple à suivre durant la conférence Living City. (Photo: licence cc )

Déjà positionnée en tant que ville smart, Barcelone veut se doter d'un campus de nouvelle génération. L'une des villes évoquées comme exemple à suivre durant la conférence Living City. (Photo: licence cc )

Les personnes, les données, les processus et les objets. Quatre éléments clés qui sont au centre de la formule des «smart cities», les villes de demain qui se conçoivent pourtant dès aujourd'hui et qui étaient au cœur de la deuxième édition de la conférence Living City, organisée mercredi par le Neobuild et le CDEC.

Après une matinée consacrée aux initiatives luxembourgeoises qui doivent gagner en interconnexions, probablement sous la houlette du gouvernement, l'après-midi était consacré aux inspirations internationales. Premier constat: la concurrence des villes, de toutes tailles, qui veulent se positionner en tant que «smart» sont nombreuses.

Et les régions qui misent sur le secteur ICT en tant que moteur du renouveau de leur économie traditionnelle le sont également. À l'instar de la province de Trento en Italie – 500.000 personnes, soit l'équivalent de la population du Grand-Duché – qui était représentée par Nicola Doppio, chef d'équipe du Smart Crowds Territorial Lab de l'Université de Trento qui s'est dotée d'un «smart campus».

Cette université dernière mène des tests autour de nouveaux produits et objets connectés avec les habitants de la région, ce qui lui permet de transposer plus rapidement la recherche en réalité économique.

La puissance des réseaux sociaux

Mais le concept de smart city ne doit pas se concevoir uniquement par le filtre de la technologie, mais bien par l'usage qu'effectue l'être humain de l'environnement urbain au sens large. Un usage qui a été profondément bouleversé par l'émergence des technologies de communications mobiles – permettant par exemple de consulter en temps réel des horaires de bus et de souscrire à des services à la demande – ainsi que l'explosion des réseaux sociaux qui ont vu l'émergence de nouvelles communautés.

«Nous évoluons vers un monde qui dépend de plusieurs systèmes qui sont interconnectés», déclarait Dave Ramslie, membre du comité de direction d'Integral Group, un consortium d'architectes et designers qui travaille sur une nouvelle génération de bâtiments, notamment à Vancouver au Canada.

Comment prédit-il le futur? Il sera certainement social, via les réseaux qui servent de vecteur par exemple à des projets de crowdfunding pour réhabiliter un espace vert. Il sera aussi marqué par une connectivité permanente et une mesure des habitudes de chacun, des besoins en temps réel en éclairage dans un bâtiment, la domotique 2.0.

L'internet des objets, l'internet pour tout

Ce qui implique forcément une utilisation efficiente des informations collectées et un changement de gouvernance de la part des autorités autour de l'open data. Pour le citoyen, la mesure en temps réel de paramètres tels que la qualité de l'air ou le trafic sont aussi des moyens de recevoir davantage d'informations et donc de faire pression sur les décideurs.

Pour Carlo Ratti, directeur du MIT (Massachusetts Institute of Technology) Senseable City Lab, la clé réside dans la captation d'un maximum de données en temps réel pour ensuite trouver de nouveaux modèles et donc agir.

«Nous aurons besoin de développer de nouveaux modèles mathématiques, de gérer des masses de données importantes, ce qui nécessitera de nouveaux outils d'analyse», estimait-il durant son intervention. «Comprendre est un premier pas, lorsque l'on dispose de suffisamment de données, on peut envisager de changer de comportement.»

L'exemple des embouteillages est ressorti à plusieurs reprises. Selon les intervenants, 30 à 40% du trafic en ville est généré par des automobilistes qui cherchent une place de parking. D'où l'idée de la ville de Barcelone d'équiper les parkings publics de capteurs pour indiquer, via une application, les places libres.

La capitale catalane a d'ailleurs décidé de pousser les choses plus loin en utilisant la possibilité de connecter toute une série d'objets, de devices pour adapter ses services publics. Elle accueillera d'ailleurs le sommet mondial des smart cities du 10 au 12 novembre 2015.

«D'ici 2020, nous compterons 50 milliards d'objets qui pourront être connectés, contre 13 milliards actuellement», relevait John Baekelmans, directeur technique d'Internet of Everything (IoE) Solutions Group chez Cisco.

Pour le provider informatique qui a équipé l'internet urbain de la capitale luxembourgeoise, on est passé de l'internet «of things» à l'internet «of everything.» Moins de voitures en ville, moins de trafic, plus de confort...

«Il n'y a pas de formule magique, mais bien plusieurs pas qu'il faut faire l'un après l'autre», estime John Baekelmans en évoquant le chemin qui mène vers les smart cities.

Un besoin de vision politique

Tant eu Europe qu'outre-Atlantique et dans les régions dites émergentes, des villes se livrent une compétition sur le terrain du «smart» tant les enjeux économiques et de confort de vie sont importants. La conférence Living City a, pour la deuxième fois, voulu sensibiliser les décideurs grand-ducaux à ses impératifs.

«Le virage de la communication, du numérique a permis à la ville de se moderniser et de s'enrichir», a noté pour sa part Éric Legale, directeur d'Issy Media, en charge des initiatives smart à Issy-les-Moulineaux, la ville de la banlieue parisienne qui a pris depuis une vingtaine d'années l'option de faire de l'audiovisuel puis du numérique sa force.

Concentrant 2% de la surface de la planète, mais 50% de la population, 75% des besoins énergétiques et 80% des émissions de C02, les villes doivent se réinventer.

Déjà engagée dans un processus smart, Luxembourg-ville entend se positionner à cet égard dans le cadre de la présidence européenne du deuxième semestre 2015.Le Premier ministre l'a annoncé avec l'instauration du wi-fi gratuit. Mais les actions peuvent aller bien au-delà.

Souvent porté par ses écosystèmes issus de différents secteurs, le Grand-Duché a tout intérêt à mobiliser l'ensemble des acteurs qui peuvent jouer un rôle dans la «smart nation» qui peut se construire dès à présent.