Il faut construire la souveraineté économique en privilégiant l’innovation, selon François Villeroy de Galhau. (Photo: Nader Ghavami)

Il faut construire la souveraineté économique en privilégiant l’innovation, selon François Villeroy de Galhau. (Photo: Nader Ghavami)

Vingt ans après son introduction, l’euro est un succès indéniable, souligne le patron de la Banque de France, qui siège en tant que tel – au même titre que son homologue luxembourgeois Gaston Reinesch – au conseil des gouverneurs de la BCE à Francfort. Selon lui, les raisons du succès de l’euro s’appuient sur trois piliers: la stabilité des prix, qui constitue le mandat intrinsèque de la BCE au sein de l’eurosystème, l’indépendance des banques centrales, ainsi que le soutien des citoyens européens à la monnaie commune: trois quarts d’entre eux ayant un avis favorable sur l’euro, comme l’indiquent régulièrement les enquêtes de l’eurobaromètre.

Depuis vingt ans, l’euro a surtout progressé dans les crises, constate François Villeroy de Galhau, qui rappelle dans ce contexte la création du mécanisme européen de stabilité et de l’union bancaire.

Réformes structurelles indispensables

Abordant la conjoncture actuelle, l’orateur a affirmé que l’économie mondiale subissait un ralentissement mais qu’il ne s’agissait sans doute pas d’un retournement. Dès lors, trois défis se présentent à l’horizon pour la BCE: le premier est l’incertitude relative au Brexit. «Il faut se préparer à un scénario sans accord», a-t-il prévenu. Le climat d’incertitude est renforcé par le cycle des États-Unis arrivé à maturité, même si les craintes de récession seraient prématurées. En outre, l’économie chinoise présente des indicateurs «mal orientés», avec un endettement des entreprises chinoises se situant à un niveau élevé (155% du PIB).

Un deuxième défi consiste à juguler l’impatience qui agite les sphères financière et politique. Non seulement les marchés ont tendance à se focaliser sur le court terme, mais s’y ajoute l’impatience populiste qui voudrait «beaucoup tout de suite». Observant que les réformes structurelles ont ralenti dans les pays du G20, François Villeroy de Galhau plaide pour une relance budgétaire dans les pays qui affichent un excédent et insiste sur la nécessité de l’ensemble des pays de mener des réformes structurelles durables. Le troisième défi est la tendance isolationniste, qui se traduit par une escalade des tensions commerciales qui pourraient menacer la croissance.

Trois règles de conduite

Le gouverneur estime que la normalisation progressive de la politique monétaire dans la zone euro «reste souhaitable» et qu’elle doit être «progressive et pragmatique». Dans ce contexte, la BCE adopte trois règles de conduite: d’abord, garder les options ouvertes en restant prévisibles et en menant une politique accommodante aussi longtemps que nécessaire pour atteindre les objectifs d’inflation; ensuite, maîtriser l’inflation sous-jacente, qui devrait se redresser et progresser vers 1,8% en 2021; enfin, plaider inlassablement pour un renforcement de l’économie européenne, sachant que la politique monétaire ne peut pas, à elle seule, porter tout le poids.

Une des pistes que prône François Villeroy de Galhau est de construire la souveraineté économique en privilégiant l’innovation, notamment en misant sur l’intelligence artificielle.