Pit Hentgen devant la croix qu’il a financée – et assurée – dans son village. (Photo: Edouard Olszewski)

Pit Hentgen devant la croix qu’il a financée – et assurée – dans son village. (Photo: Edouard Olszewski)

Philosophie

Monsieur Hentgen, votre devise en matière d’argent?

«J’en retiens trois: ‘Les facteurs qui font notre bonheur ne sont pas tous associés à l’argent’ de Marc Aurèle; ‘L’argent est un bon serviteur mais un mauvais maître’ d’Alexandre Dumas fils; ‘L’argent procure tout, hors l’esprit et le cœur’ (anonyme). L’idée commune est que l’argent ne doit pas être la valeur centrale qui guide nos actions.

Que représente l’argent pour vous?

«Il a une valeur symbolique. Il permet de rêver. Quelqu’un qui est riche pense que tout est possible. Même si on n’a pas besoin de tout, il est aussi symbole de sécurité et permet de prendre des risques. Maintenant, le bonheur est-il lié à l’argent? Dans ma vie, il est surtout lié aux petits plaisirs quotidiens et ceux-ci ne coûtent pas cher, voire rien du tout. Des moments où l’on se contente d’arrêter le temps et qui n’ont pas de prix.

In vino voluptas

Pour quel luxe craquez-vous parfois?

«J’ai parfois dépensé beaucoup d’argent pour du vin. Mais c’est un achat plaisir. J’ai notamment acquis trois bouteilles de Château Pétrus 1961, mon année de naissance, pour fêter mes 50 ans. Il a été reconnu par certains experts comme ‘le vin du siècle’ mais il était difficile à trouver. En plus, avant la crise, les prix ont atteint plus de 23.000 euros la bouteille en Asie. Mettre un tel prix pour du vin, ça ne se fait pas. Mais avec la crise, j’ai acheté ces bouteilles aux alentours de 2.000 euros. J’en ai déjà bu deux, elles étaient vraiment excellentes.

À quels signes extérieurs de richesse êtes-vous attentif?

«La montre, la serviette, la voiture, le vélo... Je regarde si c’est de bon goût ou si la technologie mérite ce prix. Si l’investissement me semble raisonnable – même si c’est très cher –, je peux l’accepter. Mais pas si j’estime que le but est de montrer qu’on a les moyens.

Salaire

Vous souvenez-vous de votre premier salaire?

«Pour mon premier emploi à la BGL, j’ai touché un salaire de 69.000LUF (1.700 euros actuels). À l’époque, la place financière prenant de l’ampleur, nous étions fortement sollicités dès la fin des études. J’avais reçu d’autres offres plus lucratives hors du monde financier, mais je voulais suivre la tendance du moment vers la finance. Je n’ai donc pas choisi l’offre la plus attractive, comme je voyais chez BGL des possibilités d’évolution et de formation.

Seriez-vous prêt à toucher un salaire moindre pour un projet «passion»?

«Je me pose parfois la question de ce que je changerais à ma vie si j’avais beaucoup plus d’argent qu’aujourd’hui. En fait, je ne vois pas ce qui pourrait me rendre plus heureux. J’en conclus donc que l’argent n’est pas central dans ma vie. Donc oui, pour une passion à assouvir, je serais prêt à renoncer à une part de salaire. Pour écrire un livre, par exemple. Pas un best-seller, mais celui qui me permettrait de prendre un peu de recul et de changer de référentiel. Je pourrais renoncer à tout revenu, voire même investir, pour faire aboutir ce projet.

Patrimoine

Avez-vous estimé l’un de vos objets personnels suffisamment précieux pour l’assurer?

«J’ai assuré mon équipement photo et une croix en pierre que j’ai fait refaire dans mon village. Ma famille est originaire du village de Roedgen. Or, au bord du sentier qui le relie à Leudelange, se trouvait une ancienne croix qui a été volée dans les années 1970. Par passion pour l’histoire locale et celle de ma famille, j’ai décidé d’ériger une nouvelle croix au même endroit. Nous avons travaillé au design d’une croix contemporaine, mais inspirée du passé, avec Serge Weis, un artiste luxembourgeois qui travaille beaucoup pour la restauration du patrimoine. C’est une œuvre symbolique, mais elle a une valeur et je l’ai donc assurée.

Coups de cœur

Un souvenir d’une dépense un peu folle jamais regrettée?

«J’ai fait réaliser un meuble pour porter un livre ancien provenant d’un monastère. C’est un livre à partir duquel j’avais travaillé pour un cours d’histoire à l’université et que je rêvais de posséder. Un ami antiquaire m’en a trouvé un fac-similé, mais je n’avais pas de meuble pour le mettre en valeur. J’ai donc à nouveau demandé à Serge Weis de me concevoir un lectrin en bois. Il l’a fait en sculptant les quatre évangélistes selon un style le plus proche possible de l’époque du livre. C’est donc une folie, mais je n’ai aucun regret.

Votre dernier achat «Je ne devrais pas»?

«Mon dernier smartphone. Mais ça vaut aussi pour mon dernier appareil photo. J’ai toujours envie de disposer de la dernière technologie. Il faudrait un système de reprise de l’ancien appareil à l’achat d’un nouveau comme ça se fait pour les voitures. À défaut, j’ai plusieurs appareils, dont certains que je n’utilise pas beaucoup.»