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Le constat dressé par les consultants de Mindforest - sollicités par le ministère de l'Economie - n'est guère enthousiasmant quant à l'actuel développement des sites Internet des entreprises, notamment ceux ayant des ambitions transactionnelles. Manque de réelle valeur ajoutée; d'informations destinées à mettre le consommateur en confiance; d'initiatives destinées à le fidéliser; faible niveau de sécurisation des transactions et non-respect des procédures en vigueur? Même si, à Luxembourg, les trois quarts des entreprises de plus de 250 employés disposent d'une présence sur Internet, les efforts à fournir pour en faire à la fois un réel atout pour elles et un produit attirant pour le consommateur semblent encore bien nombreux?

Le constat semble d'autant plus pertinent que la démarche de Mindforest se distingue de ce qui peut être fait dans d'autres pays, en ce sens que l'analyse porte sur l'ensemble du marché des entreprises à Luxembourg (21.512 recensées par le Statec au 1er janvier 2001) et non pas sur un échantillon dit représentatif.

Au total, ce sont près de 2.400 sites Web opérationnels qui ont été recensés (soit un taux global d'environ 11%), qu'il convient toutefois de segmenter au regard de la taille de l'entreprise. Ainsi, 74% des entreprises de plus de 250 salariés disposent-elles d'une présence active sur Internet; 61% des structures de plus de 90 salariés et? 10% pour celles de moins de 90 salariés.

Au sein d'un même secteur d'activités, ce sont les banques et autres activités financières qui sont les plus présentes, avec une représentativité proche de 40%, là où les services aux particuliers, ou aux entreprises, atteignent à peine 10%.

Paradoxalement, les résultats ciblés sur les sites de commerce électronique laissent apparaître une part relativement faible des entreprises actives dans le commerce de gros (à peine 9%), et de détail (13%). La taille relativement réduite de ces entreprises de "détail' (près de 90% emploient moins de dix personnes) est un des arguments avancés pour expliquer ce faible total.

Trois grandes catégories de sites peuvent être dégagées: les sites "informationnels", largement majoritaires (près de 80% du total, mais moins de 70% dans la catégorie des entreprises de plus de 250 salariés); ceux dits "de service", qui représentent quelque 16-17% quelles que soient les tranches étudiées; et ceux de type "transactionnel', relativement peu nombreux au total (5,4%), mais bien plus représentés dans les grosses structures (14,1%). Dans 20% des cas, tout de même, les sites recensés à Luxembourg ont été classifiés dans la catégorie "carte de visite".

Une fois ce décor général planté, les critères d'évaluation définis par Mindforest (facilité d'accès au site, qualité de l'information, logique et facilité de navigation, volonté d'animer et de faire vivre le site, mise en valeur du contenu via les technologies audiovisuelles, valeur ajoutée du contenu et qualité de l'offre commerciale du site) ont permis une évaluation qualitative plus poussée. Sur un premier échantillon de 1.717 sites présélectionnés, 300 ont donné lieu à une analyse détaillée: 60 sites transactionnels (soit 100% des sites de ce type recensés); 140 de la catégorie "services" (50%) et 110 "informationnels" (10%).

Quelques résultats mis en exergue permettent de mesurer l'étendue des efforts restant à réaliser, en particulier concernant les sites transactionnels, dont les trois-quarts ne sont disponibles qu'en une seule langue: 79% d'entre eux n'indiquent pas clairement la dernière date de mise à jour des données; et seuls 38% des sites ont été mis à jour endéans les trois derniers mois.

L'aspect "Communauté" est également encore négligé, puisque seuls 21% des sites proposent une Newsletter et à peine 14% des animations non liées aux produits. Quant à la phase "transaction' en elle-même, 84% des sites ne mentionnent nullement l'identité légale du vendeur; 76% n'affichent pas les conditions de protection des données; 40% ne proposent pas de récapitulatif complet juste avant la validation de la commande et 39% n'hébergent pas leurs transactions sur des pages sécurisées? Et si vous espérez que les entreprises pratiquant le commerce électronique proposent des réductions tarifaires pour fidéliser la clientèle, sachez que ce n'est le cas que pour? 3% d'entre elles.

Tous ces chiffres avancés doivent toutefois être considérés avec un certain recul. "L'évolution est très rapide constate Guy Kerger, Associé chez Mindforest. Ainsi, en l'espace de deux mois, entre le recensement initial des sites et le début de l'analyse proprement dite, 180 sites avaient disparu, soit un taux de disparition de près de 8%. D'autres ont dû éclore, mais n'apparaissent pas dans cette étude".

A noter que dans le prolongement de cette étude, le ministère de l'Economie, en collaboration avec la Chambre de Commerce et la Chambre des Métiers, présenteront, ce lundi, le "label qualité" qu'ils ont élaboré, destiné aux entreprises actives dans le commerce électronique. L'objectif sera notamment, au travers d'une démarche de certification supervisée par l'OLAS (Office Luxembourgeois d'Accréditation et de Surveillance), l'augmentation de la confiance des consommateurs; la différentiation de la concurrence; le développement des ventes et l'optimisation de la qualité du service.

La tâche promet d'être ambitieuse et ce qui se passe chez nos voisins incite à la plus grande prudence. Ainsi, un site marchand français sur trois est en infraction selon une enquête diligentée par la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF). Manque d'information, publicité mensongère, renvoi vers des sites illicites, "labels" auto-proclamés? sont parmi les principaux griefs reprochés aux sites fautifs.

Environ 1.000 - sur les 3.500 sites de commerce électronique domiciliés en France - ont été contrôlés en 2001, pour un total de 311 sites ne respectant pas la réglementation en vigueur. Tous ces relevés n'ont toutefois abouti qu'à dix-sept procès-verbaux transmis au parquet. Ce bilan répressif est jugé par le secrétaire d'Etat français à l'Industrie Christian Pierret "très mesuré" par rapport aux plus de 5.000 mails de consommateurs mécontents reçus en 2001 par la DGCCRF.