Depuis que la fin du secret bancaire se dessine dans la Confédération helvétique, les banques suisses tentent d’obtenir une licence pour aller à la rencontre de leurs clients au sein de l’UE. (Illustration: Maison Moderne)

Depuis que la fin du secret bancaire se dessine dans la Confédération helvétique, les banques suisses tentent d’obtenir une licence pour aller à la rencontre de leurs clients au sein de l’UE. (Illustration: Maison Moderne)

Les banquiers suisses spécialisés dans la gestion de fortune sont inquiets. À partir du 1er janvier 2017, à la suite d’un accord signé avec l’Union européenne en mai 2015, la confédération devrait mettre fin au secret bancaire concernant les comptes détenus par des ressortissants européens non résidents. Or, 40% des fonds gérés par les banques helvétiques appartiennent à des citoyens des «Vingt-huit». La crainte, exprimée à la mi-janvier par l’ABPS (Association de banques privées suisses) et l’ABG (Association de banques suisses de gestion), vient des entraves que connaissent leurs membres lorsqu’ils veulent aller à la rencontre de leurs clients européens dans leur pays de résidence.

«Actuellement, explique Yves Maas, président de l’ABBL (Association des banques et banquiers, Luxembourg), pour que les banques suisses puissent travailler au sein de l’UE depuis leur territoire, le gouvernement doit négocier des accords bilatéraux avec les différents pays.» Les banquiers suisses poussent donc leur gouvernement à multiplier les accords avec les pays européens d’importance stratégique. Un accord a déjà été signé avec l’Allemagne et des discussions ont débuté avec les Pays-Bas, l’Espagne et l’Italie. Mais, à long terme, l’ambition est d’obtenir un cadre global avec l’UE sur les services financiers.

En attendant de disposer de ce droit de faire des affaires librement au sein de l’Union, les banques suisses peuvent aussi prendre l’option d’obtenir une licence bancaire dans un des pays de l’Union. Dès ce moment, elles sont reconnues en tant qu’acteur européen et peuvent bénéficier des mêmes droits.

Cette obligation de bénéficier d’un domicile au sein de l’Union a conduit plusieurs institutions helvétiques vers le Luxembourg. «C’est un phénomène auquel on assiste depuis quelques années, admet Yves Maas, en tant que président de l’ABBL. Beaucoup de banques suisses sont déjà au Luxembourg depuis un certain temps, mais quelques-unes ont rejoint la Place ces deux ou trois dernières années.»

Actuellement, on recense 12 groupes bancaires affichant le pavillon suisse sur le territoire luxembourgeois. Un chiffre qui lui assure la troisième place de la présence étrangère, derrière l’Allemagne (26) et la France (15). «Il est clair que le Luxembourg est bien placé pour jouer le rôle de porte d’entrée unique vers le marché européen, note Yves Maas. L’écosystème mis en place fonctionne très bien et le triple A reste un gage de sérieux.» Et selon lui, si les Suisses font la démarche de venir au Grand-Duché, ils ne sont pas les seuls. La Chine et des pays d’Amérique du Sud agissent de la même manière pour entrer dans la vaste zone des «Vingt-huit».

Un écosystème bien rodé

Ça ne veut pas dire que la concurrence n’existe pas avec d’autres Places de première importance. Londres et Francfort restent d’autres portes d’entrée très appréciées. «Le Luxembourg est surtout bien placé pour accueillir des activités comme le wealth management, poursuit le président de l’ABBL. D’autant qu’il y a chez nous possibilité de structuration pour des produits destinés aux toutes grosses fortunes – les Utra High Net Worth.»

Selon Yves Maas, également CEO de Credit Suisse Luxembourg, c’est effectivement le Luxembourg qui a été choisi pour servir de plateforme majeure en wealth management en Europe. «Nous sommes devenus un hub, explique Yves Maas. À partir de notre siège, nous pouvons couvrir plusieurs marchés européens.» Un certain nombre de succursales bénéficient de la plateforme luxembourgeoise.

En septembre 2012, la banque Lombard Odier a aussi demandé et obtenu une licence bancaire pour pouvoir créer une banque au Luxembourg en plus de son activité dans l’industrie des fonds. Dès ce moment, elle a créé la société Lombard Odier (Europe), pour mieux servir ses clients européens. Visiblement, la transparence qui s’impose dans le monde bancaire sur le plan international pourrait apporter de nouvelles opportunités pour la place financière grand-ducale. Et donc dissiper certaines craintes quant à son érosion.

Les banques suisses au Luxembourg

  • Union Bancaire Privée (Europe)
  • UBS (Luxembourg)
  • Credit Suisse (Luxembourg)
  • Banque de commerce et de placements, Genève (Suisse), succursale de Luxembourg
  • Edmond de Rothschild (Europe)
  • Cornèr Bank (Luxembourg)
  • Pictet & Cie (Europe)
  • BSI Europe
  • Credit Suisse AG, Luxembourg Branch
  • EFG Bank (Luxembourg)
  • Lombard Odier (Europe)
  • Mirabaud & Cie (Europe)

Source: CSSF