Le rebond récent semble excessif, indique Guy Ertz.  (Photo: Julien Becker / archives )

Le rebond récent semble excessif, indique Guy Ertz.  (Photo: Julien Becker / archives )

Les taux de rendement des obligations gouvernementales européennes ont rebondi fortement après avoir atteint un niveau historiquement bas le 20 avril de cette année. En Allemagne, la hausse a été assez brutale avec un mouvement de 0,07% à 0,70% en trois semaines. Ceci suscite un nombre de questions.  

Avant même d’analyser la nature du rebond récent, il est utile d’expliquer pourquoi les niveaux sont tombés si bas. On peut décomposer le taux de rendement obligataire afin de dissocier la rémunération liée à l’inflation attendue et celle en termes réels (ou «pouvoir d’achat») liée à la croissance économique. En effet, la tendance négative des taux de rendement depuis plusieurs décennies s’explique par le ralentissement important de l’inflation et plus récemment par des révisions baissières des taux de croissance économique. Il est toutefois difficile d’expliquer pourquoi les taux ont continué à reculer récemment et ont même été négatifs pour certaines maturités.

Ceci peut en effet apparaître comme une anomalie dans une perspective historique et s’explique par un environnement de «répression financière». Ce concept fait référence aux outils de politique économique choisis dans le contexte post-crise financière. Tout d’abord, le programme d’achat obligataire des banques centrales qui vise à augmenter les attentes d’inflation et ensuite, un ensemble de mesures de réglementation financière qui a pour objectif de diminuer le risque encouru par les principales institutions en instaurant des ratios minimums en termes d’actifs de faible risque comme des obligations gouvernementales. Ces deux mesures créent une demande additionnelle, ce qui maintient les taux plus bas que dans un contexte normal.  

Un double effet déclencheur

Les déclencheurs de la hausse récente des taux sont doubles. En premier lieu, les chiffres d’inflation pour le mois de mars ont surpris positivement et les attentes d’inflation de long terme ont été en hausse. De plus, une adjudication d’obligations du gouvernement allemand n’avait pas été souscrite intégralement, ce qui a pu suggérer un niveau de taux dissuadant les investisseurs. 

Le rebond récent semble excessif et le scénario le plus probable est celui d’une stabilisation des taux à court terme.

Guy Ertz, chief investment advisor, BGL BNP Paribas

Une remontée progressive à un horizon d’un an semblerait logique au vu de l’amélioration de la conjoncture et d’une stabilisation des prix du pétrole autour des niveaux récents. Cette tendance sera toutefois limitée en ampleur tant que le programme d’achat de la BCE restera en cours, ce qui est prévu jusque mi-2016.

Pour les investisseurs obligataires, la perspective d’un environnement haussier des taux de rendement obligataires, même modéré, représente un défi. En effet, une telle progression rendrait les obligations existantes moins attractives et devrait mener à des baisses de prix. Le niveau très faible des coupons ne suffira pas à compenser cet effet, ce qui pourrait mener à des pertes en capital pour les détenteurs d’obligations gouvernementales de haute qualité (coupon faible) et de longue maturité. Certaines poches obligataires dans le monde des entreprises restent attractives, mais elles se font rares.

Les marchés actions devraient continuer à profiter de ce contexte de «recherche de rendement». Certes, les valorisations sont moins attractives qu’en début d’année, mais la performance attendue reste intéressante. Les zones géographiques offrant les meilleures perspectives sont l’Europe, les Etats-Unis et le Japon (avec couverture de la devise). Des corrections temporaires restent probables. 

L'euro s’est renforcé contre le dollar américain. Ce rebond a été soutenu par une dynamique plus favorable en termes de surprise économique en Europe et une stabilisation des écarts de taux d’intérêt entre les deux pays. Ce regain d’appétit pour la monnaie unique sera probablement limité dans le temps. Le niveau le plus probable à 12 mois pour l'EUR/USD est de 1,05.