Charles Benoy (Lilith Project) (Photo: Julien Becker)

Charles Benoy (Lilith Project) (Photo: Julien Becker)

Monsieur Benoy, l’intelligence émotionnelle est une notion qui prend son essor dans le domaine RH, notamment aux États-Unis. Qu’en est-il au Luxembourg?

«Ici, l’intelligence émotionnelle n’est que très peu prise en compte, si ce n’est peut-être lors des phases d’embauche. Dans ce cas, elle est estimée de manière fort subjective, lors de l’entretien. Il existe pourtant des outils de diagnostics émotionnels. Certains de nos clients les ont testés et ont pu constater, au final, l’apport d’une bonne gestion des émotions au sein d’une équipe professionnelle. Un apport qui s’est reflété sur l’intégralité de leur business.

Il est à noter que chaque entreprise peut utiliser ces outils de ‘performance’ émotionnelle où elle le juge nécessaire: lors de la phase d’embauche, pour du coaching personnel ou d’équipe, pour le choix d’un leader, afin d’améliorer le bien-être sur le lieu de travail, etc.

Aujourd’hui, ces outils ont tendance à n’être utilisés que pour des postes de manager, alors que leur emploi est à généraliser, car il s’avère judicieux, quel que soit le poste ou la fonction.

Les outils de gestion émotionnelle n’en sont donc qu’à leurs débuts. Pensez-vous qu’ils vont percer au Luxembourg?

«Oui, je le pense. Nous pensons qu’il est essentiel de bien sensibiliser les entreprises aux multiples avantages qui résultent d’une bonne connaissance et d’une gestion humaine de l’intelligence émotionnelle de ses collaborateurs. Il s’agit de leur faire prendre conscience que les émotions sont omniprésentes et inévitables et qu’elles conditionnent chacun de nos actes et tâches professionnels. À moyen et long termes, j’aimerais que l’Europe en général, et le Luxembourg en particulier, atteignent le niveau des États-Unis. Outre-Atlantique, les sociétés utilisent des outils d’intelligence émotionnelle pour tout type de profils, des cadres aux chauffeurs de camion, par exemple.

La première étape est donc de sensibiliser les DRH?

«Oui, mais aussi tous les managers d’une société. Pour les DRH, l’idéal serait qu’ils acquièrent une plus grande lisibilité de l’intelligence émotionnelle de chacun des collaborateurs et par là de chacune des équipes qui composent l’entreprise.

Aujourd’hui, les DRH que nous rencontrons cherchent avant tout à parer au plus urgent, pour répondre aux pressions financières qu’ils subissent. Ils souhaitent une solution pouvant, à terme, bénéficier à la productivité de l’ensemble de leur société. Effectivement, en travaillant sur le plan émotionnel, c’est toute la chaîne de production qui s’en trouve optimisée.

Je mettrais simplement un bémol à cela, en précisant que nos outils sont d’autant plus efficaces qu’ils sont utilisés en amont, sans la pression d’un résultat à très court terme. De plus, travailler sur de l’humain n’impose pas de restructuration complexe et onéreuse.

Si vous aviez une baguette magique, comment l’utiliseriez-vous?

«Je ferais en sorte que plus de personnes soient sensibilisées à la question de l’émotion de leurs collaborateurs et de leurs équipes. Aux États-Unis, j’ai réellement senti cette sensibilité, présente plus généralement et quel que soit le secteur d’activité.

En Europe, nous n’avons pas encore suffisamment cette approche pragmatique, focalisée sur l’individu, sur l’humain. Je reviens donc à notre objectif premier, celui qui va nous occuper les mois à venir: sensibiliser les entreprises, et notamment les managers, à l’intelligence émotionnelle. Un travail de longue haleine, car il touche la mentalité parfois trop cartésienne de l’Européen.»