Selon un rapport publié cette semaine par MessageLabs, le fournisseur le plus important en matière de services de sécurité e-mail pour entreprises au niveau mondial, plus de deux tiers des 840 millions d'e-mails scannés par la société pour le compte de ses clients étaient du spam, au cours du mois d'avril, confirmant ainsi une tendance à une vertigineuse augmentation du phénomène pour l'ensemble de la planète.
Personne n'est à l'abri du phénomène et ce ne sont pas les fonctionnaires allemands qui diront le contraire. La semaine dernière, un flot de pas moins d'un demi-million de courriers électroniques non sollicités a ainsi paralysé les boîtes mails de milliers d'hommes politiques et de fonctionnaires outre-Moselle. Une note interne obtenue par Reuters fait référence à la réception de pas moins de 510.000 spams.
Les chiffres communiqués par MessageLabs indiquent d'importantes différences régionales ainsi que des 'points chauds', et ce malgré les nouvelles lois qui tentent de dissuader les 'spammers'. Ainsi, actuellement, le flux d'e-mails vers les USA, le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Australie et Hong Kong contient plus de 97% du volume mondial de spam filtré par MessageLabs. Les Etats-Unis sont les plus touchés, avec un taux de 83% du trafic étant identifié comme spam. Au Royaume-Uni, ce pourcentage était de 52%. Il était de 41% en Allemagne, de 32% en Australie, de 30% aux Pays-Bas, et de 27% à Hong Kong.
Les chiffres régionaux démontrent une percée dans les régions à prédominance anglophone. C'est là que l'usage de l'Internet est le plus répandu, tant au niveau des entreprises qu'à la maison, et que les connexions rapides à larges bandes sont monnaie courante.
Des recherches, effectuées par Datamonitor, prévoient d'ailleurs qu'en 2006, plus de 41 millions de ménages européens auront accès à Internet par connexions rapides à large bande, alors qu'en 2002 il n'y en avait encore que 10 millions.
En outre, un rapport publié récemment par eMarketer et le Wall Street Journal indique qu'environ 43 millions d'américains utilisent déjà les connexions à large bande. MessageLabs constate également que l'attitude vis-à-vis d'Internet et de l'e-mail est plus ouverte dans les pays plus développés, où faire des achats par Internet, dialoguer sur le Web et l'instant messaging font partie du quotidien.
Mark Sunner, CTO de MessageLabs, estime que d'ici à 6 mois, des taux de spamming similaires à ceux actuellement observés aux Etats-Unis pourraient être enregistrés au Royaume-Uni et, d'ici à un an, pour la région Asie-pacifique.
Les dispositions des autorités ne manquent pourtant pas en la matière. Etats-Unis, Australie, Japon, Royaume-Uni, Corée du Sud: tous ont, à différents niveaux, légiférés en la matière (les Allemands, eux, sont en train de débattre de la question...) Dernière initiative en date: l'annonce, en début de semaine, par les autorités de Singapour, d'un projet de loi visant à lutter contre ces mails non sollicités, tout en protégeant toutefois les intérêts des annonceurs.
Cette nouvelle loi, qui pourrait entrer en vigueur au début de l'année prochaine, impose aux annonceurs de signaler sur leurs messages qu'il s'agit de publicité et de fournir un lien efficace permettant de se faire rayer de la liste des destinataires, a précisé le département de la Justice, ajoutant que les messages doivent également être envoyés d'une adresse e-mail authentique.
Un bémol tout de même à cette loi qui se profile: elle ne concernerait que les messages envoyés depuis la ville-Etat et non ceux provenant de l'extérieur, qui fournissent pourtant 80% des spams.
L'enjeu est également économique et les grandes manoeuvres ne manquent pas de secouer le marché des fournisseurs IT. Dernièrement, le grand éditeur américain Symantec (Norton Antivirus, c'est lui...) a annoncé le rachat du concepteur de logiciels anti-spam Brightmail, pour la modique somme de 370 millions de dollars. L'opération devrait être finalisée d'ici au début du mois de juillet.
Une annonce qui intervient au moment où Symantec a dû colmater, ces derniers jours (et ce, pour la troisième fois cette année), quelques failles de vulnérabilité identifiées dans ses logiciels de sécurité, notamment des pare-feu et sa suite anti-spam, touchant tout aussi bien les utilisateurs professionnels que particuliers.