Adrien Ney est président du comité de direction de Luxair. (Photo: Etienne Delorme/ archives)

Adrien Ney est président du comité de direction de Luxair. (Photo: Etienne Delorme/ archives)

En achetant la BIL, le Qatar pourrait ne pas seulement prendre pied dans la place financière luxembourgeoise et dans le secteur de la banque privée.

Déjà propriétaire de 35% de Cargolux via sa compagnie aérienne Qatar Airways, le richissime Etat du Golfe et sa famille royale pourraient également faire leur entrée au capital de Luxair.

La compagnie nationale, dirigée par Adrien Ney, est en effet aujourd’hui détenue à 26,85% par l’Etat luxembourgeois, à 21,81% par la BCEE (Banque et Caisse d’Epargne de l’Etat), à 13% par la compagnie allemande Lufthansa, à 12,09% par Panalpina World transport, à 13% en autocontrôle et à 13,14% par…. Dexia BIL.

Participations historiques

La BIL et Fortis Banque Luxembourg, deux des plus grandes banques du centre financier, détenaient historiquement des participations dans la compagnie nationale.

A la mi-2008, avant le pic de la crise financière, Fortis Banque Luxembourg avait souhaité vendre sa participation de 12,1% à BIP Investment Partners, alors que sa maison mère était déjà en difficultés. Alors actionnaire de Cargolux – il a revendu ses parts depuis à Qatar Airways – le fonds d’investissement luxembourgeois souhaitait renforcer son portefeuille de participations dans le secteur du transport et même développer un pôle logistique.

Droits de préemption

Mais l’Etat et la BCEE avaient alors exercé leur droit de préemption, jugeant le prix de cession inférieure à sa valeur réelle. Un montant de 18 millions d’euros avait circulé. L’Etat avait alors indiqué vouloir garder les actions en portage, avant d’identifier un investisseur stratégique. Avant les élections législatives, le nom de Lufthansa avait été cité. Mais l’Etat a fini par conserver l’ancienne participation, faute de pouvoir conclure.

Concernant Dexia BIL, il était prévu que la participation détenue par Dexia BIL depuis 1948 redevienne publique, en contrepartie des aides consenties par le gouvernement à Dexia suite à la crise de 2008 et du plan de sauvetage de la banque.
Le ministre des Finances Luc Frieden l’avait même déclaré publiquement.

Frank Wagener, président du comité de direction de Dexia BIL, avait alors réagi en révélant dans la presse le prix de la transaction - un euro symbolique par action.

Compagnie stratégique

Un argument suffisant aux yeux des autres actionnaires, pour vouloir faire jouer, à leur tour, leur droit de préemption si la vente était réalisée à ce prix-là. Au final, la participation était restée dans le giron de Dexia BIL et l’Etat n’avait pu parvenir à ses fins.

La fameuse participation devrait donc finir dans l’escarcelle du Qatar qui va devenir le principal actionnaire de la BIL, l’Etat ne souhaitant conserver qu’une participation très minoritaire de la banque. En entrant au capital de Luxair, premier actionnaire de Cargolux avec 43% des parts, le Qatar renforcerait également, de façon indirecte, sa présence au sein de la compagnie de fret aérien, peut-être au détriment des actionnaires luxembourgeois.

Néanmoins, la participation en question reste soumise au pacte d’actionnaires et aux droits de préemption des actuels propriétaires. Et il est plus qu’improbable que l’Etat laisse la compagnie nationale, perçue comme hautement stratégique, filer entre des mains étrangères.

Il faut noter que la participation de Qatar Airways dans Cargolux devrait générer un trafic supplémentaire vers le Findel et le Cargo Center. Outre la promesse de vols Luxembourg-Asie via Doha, la compagnie du Golfe devrait lancer en novembre une liaison entre le Golfe et l'Amérique du Nord (Atlanta, Houston, Toronto) avec escales au Luxembourg.