Marie-Sophie Callens: «Les analyses ont démontré que plus les autochtones perçoivent l’immigration comme une menace, plus ils encouragent l’assimilation.» (Photo: Liser)

Marie-Sophie Callens: «Les analyses ont démontré que plus les autochtones perçoivent l’immigration comme une menace, plus ils encouragent l’assimilation.» (Photo: Liser)

Étant donné la situation atypique du Luxembourg en matière d’immigration, il était vraiment intéressant et nécessaire de faire une étude sur l’opinion publique vis-à-vis de ce facteur de société.

Au début de l’année 2015, il faut savoir que 46% de la population du Luxembourg n’avaient pas la nationalité luxembourgeoise.

Dans la plupart des pays, le groupe majoritaire s’impose clairement, dans le sens où il représente une part considérable de la population. Ce qui n’est plus le cas au Luxembourg.

La communauté universitaire ne s’accorde pas à dire si la présence de groupes importants d’immigrants exacerbe ou atténue le sentiment de menace ressenti par les natifs. D’une part, une population majoritairement étrangère peut créer une concurrence au niveau de l’emploi, des ressources sociales et du logement. D’autre part, de nombreuses études internationales laissent entendre que la multiplication des contacts avec les nouveaux venus favorise un multiculturalisme mieux considéré par les natifs.

L’équipe de recherche du Liser a donc souhaité mesurer le niveau de menace ressenti par les natifs luxembourgeois, ainsi que leur attitude face au multiculturalisme et à l’assimilation, et comment leur perception change au contact des étrangers.

Elle a analysé des données provenant d’une étude approfondie sur les valeurs des Européens en 2008 traitant de ces questions. Les réponses ont été obtenues auprès de 571 Luxembourgeois dont les deux parents sont également nés au Luxembourg.

Comme il fallait s’y attendre, les analyses ont démontré que plus les autochtones perçoivent l’immigration comme une menace, plus ils encouragent l’assimilation (il s’agit du fait de demander aux immigrants d’adopter les coutumes locales et assimiler la langue).

Inversement, lorsqu’ils discernent les bénéfices de l’immigration, ils penchent pour le modèle multiculturel et la tolérance envers les habitudes de vie. En outre, plus les Luxembourgeois sont en contact avec des personnes des pays voisins (France, Belgique et Allemagne), moins ils se sentent menacés. Le caractère unique de cette étude est dû à l’intensité du multilinguisme et du multinationalisme au Luxembourg.

Les résultats obtenus pourraient réellement guider les politiciens. Selon mon point de vue: «Les responsables politiques qui souhaitent développer une société diversifiée, mais cohérente devraient chercher à réduire les sentiments de menace et à stimuler les contacts interculturels entre les résidents, étant donné que ces questions sont clairement liées», ainsi «la politique d’intégration n’en serait que mieux acceptée».

Cette conclusion s’appuie sur l’analyse statistique de 18 documents approuvés par des pairs traitant de ce sujet.

J’ajouterais qu’«en somme, les politiques d’intégration sont fortement liées à la menace que représentent les immigrants et, potentiellement, aux attitudes anti-immigrants du grand public», et que «les politiques d’inclusion ont tendance à réduire le niveau de menace ressentie, alors que les politiques d’exclusion ont l’effet contraire».

Depuis 2008, le Luxembourg opte pour une approche multiculturelle qui met à l’honneur la diversité. Comparé à d'autres pays européens, en 2014, le Luxembourg était 15e dans la classification de Mipex (Migrant Integration Policy indEX), qui classifie tous les pays européens selon l’inclusivité de leur politique d’intégration pour les immigrants.