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Partageons nos connaissances ? chacun de nous ne peut qu'y gagner!

Le Knowledge Management a fait son apparition dans les médias au cours des dernières années. Les conférences et les stages relatifs au sujet fleurissent. Les dirigeants des grandes entreprises internationales sont en train de prendre conscience de l'importance du KM dans une approche stratégique à moyen et à long terme.

Le contexte

La plus-value de l'entreprise ne réside plus uniquement dans la croissance continue du capital physique et du capital du travail. D'autres facteurs deviennent réellement déterminants pour la croissance de la productivité: l'accès rapide à l'information, la communication interne, l'évolution innovatrice, la connaissance collective du personnel, des stratégies économiques et sociales à long terme.

Ainsi, face à un environnement hautement concurrentiel, l'entreprise se lance - parfois hâtivement - dans des investissements immatériels de plus en plus coûteux et complexes: la formation continue, l'établissement de réseaux Internet, Extranet et Intranet, les systèmes d'archivages et de documentation électronique, la recherche et le développement.

Pourtant, si on écoute le témoignage des professionnels, on constate que les projets cités ci-dessus n'apportent pas toujours les résultats espérés. Alors que les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication devraient faciliter l'accès à l'information, l'homme se retrouve face à une multitude d'informations dont il n'a pas besoin. La messagerie électronique vire au harcèlement textuel, les fichiers de documentation sont trop rarement consultés. Des situations de malaise s'installent dans l'entreprise: des erreurs techniques dont on n'a jamais analysé l'origine se répètent, le départ d'experts provoque des pertes de connaissances irréversibles, les relations avec les fournisseurs et les clients se compliquent...

Le Knowledge Management est une réponse possible à cette situation de malaise.

Les enjeux

Trouver une information pertinente et validée, la trouver rapidement et sous la forme qui convient - telle est la demande de l'homme dans le contexte de son travail quotidien. L'entreprise, quant à elle, formule des attentes précises tournées vers l'intérieur de l'organisation, mais également vers l'extérieur.

Selon une enquête mené par l'auteur Jean-Yves Prax, l'entreprise s'attend à des bénéfices concrets, comme:

- faciliter la communication et l'apprentissage entre des acteurs géographiquement dispersés,

-  trouver des méthodes praticables de gestion de connaissances,

-  avoir davantage de feedback des clients et des fournisseurs,

-  mieux anticiper les évolutions du marché,

- agir par rapport au marché par des solutions innovatrices et flexibles.

L'approche Knowledge Management

Qu'est-ce que le Knowledge Management? Au sommet de la médiatisation du sujet, on peut actuellement trouver autant de définitions du Knowledge Management que de nouveaux et d'anciens experts en la matière. Alors que certains auteurs se limitent à l'unique mise en place d'outils informatiques, d'autres prévoient des méthodologies s'étendant sur l'ensemble des départements de l'entreprise impliquant tous les acteurs à tous les niveaux.

Limitons-nous à dire que le KM a pour objectif de capitaliser les savoirs qui existent au sein d'une entreprise et d'assurer leur transmission. Au centre d'une telle approche se trouvent les nouveaux outils de communication, notamment l'Intranet.

Le Knowledge Management est inhérent à une stratégie globale du changement. Le but restera toujours la croissance de la performance collective. Comme toute politique de changement, le KM rencontre des résistances à différents niveaux. Il se heurte aux vieilles coutumes, au manque de temps et d'intérêt des acteurs, à la culture interne de l'entreprise. Alors que le KM vise le partage de toutes les connaissances de l'ensemble des acteurs - y inclus les personnes dirigeantes - la réalité est souvent telle que chacun garde jalousement son savoir, ses informations et ses contacts. On peut s'imaginer à quel point les managers et les consultants gérant un tel projet doivent se montrer visionnaires, psychologues et convaincants à la fois. Le soutien de la direction générale assuré, les acteurs-clés se trouvent alors dans les services de Ressources Humaines et de l'Informatique. Dans le cadre de projets particulièrement ambitieux et innovateurs, on voit même la création d'un service KM à part entière, sous la direction d'un Chief Knowledge Manager assisté par des managers de la connaissance, des experts ou des informaticiens spécialisés.

La mise en pratique

Les choses se compliquent quand l'entreprise se décide à passer à la pratique. Le terrain d'action est vaste, le knowledge management se caractérisant justement par son  approche multidisciplinaire.

Les outils Knowledge Mana-gement:

- les sociétés de consultance internationales proposent des méthodologies stratégiques et opérationnelles, se basant souvent sur les résultats de leurs propres enquêtes au sein des entreprises,

- le secteur des Nouvelles Technologies a réagi à la demande par une panoplie d'outils informatiques allant de simples méthodes d'archivage de documents à des toolkits performants adaptables aux besoins spécifiques de chaque organisation,

- l'entreprise même décidera de sa manière de formalisation des connaissances: les possibilités vont de solutions relativement simples comme des questionnaires internes à des procédures plus globales de l'ordre du fameux benchmarking,

- la démarche KM peut englober des nouveaux dispositifs pédagogiques: l'Internet et l'Intranet permettent désormais un apprentissage continu en réseau (e-learning), une communication des meil-leures pratiques et un échange sur des thèmes actuels entre pairs (knowledge communities, online forums).

- des méthodes d'évaluation des compétences accompagneront le projet KM au long de son évolution et serviront d'appui à toutes les mesures des bénéfices, qualitatives et quantitatives, du KM à long terme.

Voilà un des points critiques du management des connaissances: même si de nombreux chefs d'entreprises semblent avoir compris les enjeux stratégiques et opérationnels d'une telle approche, les bénéfices réels, notamment en termes de gains de rentabilité, sont difficilement chiffrables. En citant l'auteur Elisabeth Lank, disons que "peut-être, est-il plus facile de mesurer les risques et les coûts que l'entreprise rencontre à long terme si elle ne pratique pas de politique de KM". Cela pourrait expliquer le fait que les seules sociétés à avoir instauré des approches KM complètes et cohérentes sont des multinationales de la grandeur de Ford ou de Microsoft, la situation concurrentielle étant telle qu'ils ne pouvaient plus faire autrement. Parti d'une problématique de gestion à laquelle il fallait remédier dans les meilleurs délais, le knowledge management est alors devenu un réel avantage concurrentiel.

 

Où en sont les entreprises européennes? Selon McKinsey, un quart des sociétés internationales aurait un Chief Knowledge Manager. Une étude réalisée sur le Knowledge Management en France par Arthur Andersen, en partenariat avec Valoris et Trivium, en septembre 2000 ne relève "un support explicite et systématique du KM que dans 29% des cas seulement". La société de conseil CorEdge confirme qu'à leur connaissance, aucune entreprise française ne serait passée par toutes les étapes d'un projet KM jusqu'au déploiement, avec toute l'ampleur que leur méthodologie implique.

L'engagement des dirigeants est encore trop hésitant, la compréhension des bénéfices potentiels d'une approche KM reste insuffisante. Mais, selon cette même enquête Arthur Andersen citée ci-dessus "les échéances se rapprochent et le besoin se fait plus pressant, la question du pourquoi semble désormais dépassée, au profit du comment."

Au Luxembourg, le Knowlegde Management est à peine thématisé. Les besoins ne sont pas encore clairement définis, ni étudiés. A défaut de facultés universitaires et de centres de recherche, la thématique se propage probablement via les sociétés de conseil internationales, qui peuvent déjà revendiquer un statut d'expert dans la matière, et les grands fournisseurs d'outils informatiques com-me, par exemple, Tecsys infopartners, marchFIRST ou IBM. Les filiales luxembourgeoises des firmes multinationale adaptent les méthodologies KM proposées par les centres de décision à leurs besoins. Vu leurs structures relativement bien gérables, les sociétés implantées au Grand-Duché ne voient pas l'urgence d'une approche opérationnelle du KM. A long terme, le sujet deviendra d'actualité - peut-être sous un autre terme, peut-être avec d'autres prémices, mais inévitablement quand-même.

"De nos jours, la connaissance n'est pas une ressource supplémentaire à côté des facteurs de productivité classiques, le travail et le capital - non, elle est la ressource déterminante." Peter Drucker