Les entrepreneurs africains se multiplient, mais doivent travailler dans un environnement qui reste instable. (Photo: Licence C.C.)

Les entrepreneurs africains se multiplient, mais doivent travailler dans un environnement qui reste instable. (Photo: Licence C.C.)

On parlait il y a encore peu de temps de «continent oublié», plongé dans l’immobilité. Mais cette fois, l’Afrique bouge. L’esprit entrepreneurial y progresse à grands pas, même si les conditions restent compliquées pour développer des entreprises pérennes.

Le «Midi de la microfinance» organisé par Ada, qui s’est tenu ce mercredi à la Banque de Luxembourg, a fait le point sur ces progrès avec deux acteurs économiques bien présents sur le terrain.

Président du fonds Investisseurs & Partenaires (I&P) destiné aux PME africaines, Jean-Michel Severino «entend contribuer à la création d’une société d’entrepreneurs de Dakar à Madagascar». En 15 ans, I&P a investi une centaine de millions d’euros dans 80 entreprises de toutes tailles.

Un environnement mouvant

Co-auteur du livre «Entreprenante Afrique», il observe que le continent dans son ensemble, et malgré ses diversités, est animé par une véritable révolution entrepreneuriale. «On observe une incroyable énergie qui a permis la création d’un tissu industriel qui n’existait pas il y a 15 ans.»

Pour Eric Campos, délégué général de la Fondation Grameen Crédit Agricole basée à Paris, la plus grande difficulté pour les entrepreneurs africains est justement cet accès aux fonds d’investissement, à des partenaires qui accepteront de prendre des risques. «La non-structuration des risques fait aussi que les entreprises ont besoin de liquidités importantes pour assurer leur continuité en cas de problème imprévu. Elles ne disposent pas des mêmes garanties et assurances que les compagnies européennes.»

En Afrique, de manière générale, l’environnement économique reste très instable et les conditions ne sont pas toujours réunies pour permettre à une bonne idée de se développer. «Chez nous, tout existe, mais là-bas vous pouvez encore imaginer 50 idées d’affaires en peu de temps», explique Jean-Michel Severino. «Ce sont après que les problèmes arrivent. Parce que le marché n’est pas prêt pour le développement de votre idée.»

Il n’y a que la qualité de l’entrepreneur local qui peut mener au succès.

Jean-Michel Severino, président du fonds Investisseurs & Partenaires

«Vous pouvez effectivement imaginer décider de créer une usine de production de yaourts au Sénégal, après il faut être sûr que les gens qui vont les vendre sont équipés de surgélateurs», renchérit M. Campos. «Or, dans le pays, à peine un point de distribution sur deux en dispose. Il faut donc beaucoup de créativité.»

Imagination, mais aussi persévérance. Pour M. Severino, dans un contexte comme celui de l’Afrique, les études de marché et les business plans ne servent pas à grand-chose. «Il n’y a que la qualité de l’entrepreneur local qui peut mener au succès. Dans un environnement où rien ne se passe jamais comme prévu, il n’y a que la capacité de résilience et d’adaptabilité de l’entrepreneur qui permet à un projet d’aller jusqu’au bout.»