Monique Meche, ici devant la commission spéciale taxe, a répondu à Fabio de Masi, à la place du consul du Luxembourg à Seattle. (Photo: Parlement européen)

Monique Meche, ici devant la commission spéciale taxe, a répondu à Fabio de Masi, à la place du consul du Luxembourg à Seattle. (Photo: Parlement européen)

«Merci pour votre lettre du 16 novembre. Monsieur Comfort n’est plus un employé d’Amazon depuis février 2011. Amazon n’a jamais obtenu de traitement fiscal spécial du Luxembourg.» C’est sur ce ton, aussi sec et cassant que des branches mortes, que Monique Meche, la vice-présidente des affaires internationales du géant du commerce électronique, a répondu à une lettre de l’eurodéputé allemand de Die Linke, Fabio de Masi.

Ce dernier interrogeait un ancien dirigeant des questions fiscales d’Amazon, Robert Comfort (nommé en 2011 consul honoraire du Luxembourg pour la région de Seattle), sur la nature des aides (prix de transfert et aides fiscales) que la firme avait pu obtenir par l’administration fiscale luxembourgeoise. Il réclamait aussi des explications sur de possibles commissions que la firme aurait pu verser à des tiers, notamment les sociétés d’audit, voire l’administration luxembourgeoise, en contrepartie d’une imposition allégée de ses bénéfices et revenus. Cette question fut également posée aux dirigeants des Big Four actifs au Luxembourg, recevant toujours la même réponse: il n’y a eu aucune corrélation entre les taux ridiculement bas payés par les multinationales localisées au Luxembourg et les commissions encaissées par les «facilitateurs» de l’optimisation fiscale.

L’eurodéputé cherchait aussi à percer le degré d’implication directe de l’ancien Premier ministre Jean-Claude Juncker dans le traitement fiscal réservé à Amazon.

Revenez me voir

La lettre de Fabio de Masi avait été écrite dans le sillage de l’audition des représentants des multinationales devant le Parlement européen où les réponses données restèrent générales et évasives. La missive n’est sans doute jamais parvenue à son destinataire, puisque la réponse du 4 décembre est signée par Monique Meche, qui avait participé en personne le 16 novembre dernier à l’audition publique devant les membres de la commission spéciale taxe.

Le député avait puisé ses informations dans une interview que Robert D. Comfort, ex-chief tax officer d’Amazon jusqu’en 2011, avait accordée à l’hebdomadaire d’Lëtzebuerger Land le 22 août 2014, trois mois avant qu’éclate l’affaire LuxLeaks.

«Le gouvernement luxembourgeois, racontait l’ex-fiscaliste d’Amazon, aime à se présenter comme business partner, et je pense que cette caractérisation est exacte: il aide à résoudre des problèmes.»

Comfort avait aussi fourni les noms de ses interlocuteurs luxembourgeois lorsque sa firme choisit de s’installer au Grand-Duché et parlé des contacts avec Jean-Claude Juncker: «Nous avons rencontré le Premier ministre une ou deux fois. Son message était: ‘Si vous rencontrez un problème que vous pensez ne pas pouvoir résoudre, revenez me voir. J’essaierai de vous aider’.»

Dans l’interview au Land, le consul honoraire et fiscaliste à la retraite se disait amusé «d’aider à expliquer à d’autres firmes que le Luxembourg est une bonne business location».