Le congé parental séduit de plus en plus de pères. Ni syndicat ni patronat ne voient d’un bon œil la proposition du DP à six mois supplémentaires non rémunérés. (Photo: CC)

Le congé parental séduit de plus en plus de pères. Ni syndicat ni patronat ne voient d’un bon œil la proposition du DP à six mois supplémentaires non rémunérés. (Photo: CC)

La ministre de la Famille, Corinne Cahen, a réussi à se mettre à dos syndicat et patronat sur sa proposition lundi de faire passer le congé parental à 18 mois, contre 12 mois maximum actuellement.

Selon les libéraux, les besoins actuels de la population tourneraient non seulement autour de revenus plus élevés, mais aussi de plus de temps libre. D’où l’idée de mettre en place «un congé parental plus», d’une durée totale de 18 mois.

«Les six mois supplémentaires ne seraient pas rémunérés, mais l’État prendrait en charge les cotisations pour la sécurité sociale et la retraite», a assuré la ministre, qui se dit «confiante» dans les éventuelles négociations avec les partenaires sociaux sur ce sujet.

Il s’agit d’un congé sans solde.

Carlos Pereira, membre exécutif de l’OGBL

Le volet non rémunéré n’est évidemment pas du tout au goût de l’OGBL: «Il s’agit d’un congé sans solde, je ne vois pas qui ça pourrait intéresser financièrement. Le congé parental doit cependant rester un choix», estime Carlos Pereira, membre exécutif de l’OGBL.

Côté patronat, on s’insurge également, d’autant que la réforme précédente a laissé un goût amer: «Vu la dernière discussion que nous avons eue avec le DP sur la question... Nous avons tenu nos engagements, par contre les politiques n’ont pas respecté leur partie du deal, nous avons été floués», explique amèrement Nicolas Henckes, directeur de la Confédération luxembourgeoise du commerce (CLC).

Pour ce dernier, il aurait fallu donner une garantie aux entreprises en contrepartie: «Nous voulions une période de référence allongée, comme c’est le cas dans d’autres pays voisins. Cela met le salarié luxembourgeois dans une position de force, alors que les PME sont très désorganisées.»

Le patronat attend la flexibilité du travail prônée par le DP

Concrètement, la période de référence, c’est le temps de travail de l’employé. Aujourd’hui, les horaires peuvent être flexibles sur une base de 40 heures/semaine réparties sur un mois entier. Cela permet de travailler plus ou moins selon la charge de travail. Le patronat voudrait allonger cette flexibilité à une période de quatre mois, pour travailler beaucoup pendant de plus longues périodes, pour plus de repos ensuite.

Une flexibilité qui est également au programme du DP, mais que le patronat attend toujours: «Aujourd’hui, on annonce six mois non rémunérés, mais on sait bien qu’une fois actés, la rémunération va suivre, c’est évident. Cela pose un gros problème pour nos PME qui représentent 95% du secteur privé. Forcément pour une grande société de milliers d’employés, les congés parentaux sont absorbés, pour une PME cela entraîne une grosse désorganisation.»

Pour autant, Jean-Paul Olinger, directeur de l’Union des entreprises luxembourgeoises (UEL), veut tempérer: «Nous attendons de voir plus dans le détail, il s’agit après tout de la proposition d’un parti. Nous voulons rester dans un dialogue constructif.»

Les demandes pour le congé parental ont explosé

Avec un congé parental plus intéressant financièrement, les demandes ont explosé. Ce qui a de quoi avoir des répercussions sur la rentabilité des entreprises, estime le directeur de la CLC. «Mais ce n’est pas tant un problème financier, mais plutôt le problème que représente l’absence d’un salarié, car il y a déjà des tensions sur le marché du travail sur certains profils», des profils très recherchés et donc impossibles à trouver le temps de les remplacer lors d’un congé parental.

L’aspect financier est pour Carlos Pereira, au contraire, primordial: «Pour la première version du congé parental, seuls le smic et les bas salaires pouvaient se permettre de prendre le congé parental. Ils pourront encore moins se permettre un congé sans solde. Franchement, je ne sais même pas à qui pourrait s’adresser ce congé parental ‘plus’.»

Nicolas Henckes est lui échaudé: «On demande à voir, mais on ne croit plus aux promesses.»