Tout consommateur pourra apposer un autocollant sur sa porte d’entrée pour tenir éloignés les démarcheurs inopportuns.  (Photo : Maison Moderne Studio)

Tout consommateur pourra apposer un autocollant sur sa porte d’entrée pour tenir éloignés les démarcheurs inopportuns.  (Photo : Maison Moderne Studio)

Déposé en septembre 2012 par le ministre de l’Économie et du Commerce extérieur Étienne Schneider, le projet de loi 6478 abrogeant la loi modifiée du 16 juillet 1987 concernant le colportage, la vente ambulante, l’étalage de marchandises et la sollicitation de commandes, a finalement été votée le 11 mars dernier et a bénéficié de la dispense du second vote constitutionnel par le Conseil d’État le 26 mars. 

C’est donc ce samedi 26 avril que le texte va entrer en vigueur, positionnant le Luxembourg en conformité avec le droit européen, qui exige qu’une visite d’un professionnel au domicile d’un consommateur ne soit pas d’office considérée comme illégale.

En effet, depuis une loi datant de juillet 16 juillet 1987, et dans un souci de garantir à la fois la sécurité et la tranquillité du consommateur, le colportage (c’est-à-dire la vente ou l’offre de marchandises, de titres et de valeurs mobilières, faite de porte en porte) était purement et simplement interdit. Ce qui n’empêchait évidemment pas sa pratique… au point qu’un nombre «important» (aux dires de l’exposé des motifs du projet de loi) de demandes de renseignements ou de plaintes, «concernant des pratiques de démarchage plus ou moins insistantes ou même agressives et ciblant tout particulièrement des consommateurs âgés particulièrement vulnérables», a été enregistré auprès des associations de consommateurs, ainsi qu’auprès des services gouvernementaux.

Des autocollants à apposer

Entre temps, une directive européenne datant de 2006 relative aux services dans le marché intérieur avait posé comme principe que les États membres suppriment toutes les interdictions totales visant les communications commerciales des professions réglementées. D’ailleurs, une récente jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union européenne datant d’avril 2011 avait par exemple jugé incompatible avec les dispositions de la directive «services» l’interdiction de démarchage faite aux experts-comptables français.

C’est dans ce contexte que le législateur luxembourgeois a finalement décidé de passer à l’acte, en libéralisant la vente en porte-à-porte tout en mettant en place un arsenal de sanctions civiles et pénales, «dont l’impact à la fois préventif et répressif est de nature à garantir la tranquillité et la sécurité de nos concitoyens ainsi qu’une saine concurrence avec le commerce traditionnel», explique-t-il dans la présentation du projet de loi.

Exit, donc, les termes mêmes de colportage, d’étalage de marchandises ou de sollicitation de commandes et place au principe de «contrats hors établissement». La loi prévoit en outre de nouveaux droits destinés à protéger le consommateur, à commencer par celui de manifester son refus d'être sollicité par des démarcheurs. Tout comme pour les publicités intrusives dans les boites aux lettres, le consommateur pourra apposer un autocollant (ou tout autre signe distinctif) sur sa porte d'entrée, ou à proximité, exprimant son refus d'être démarché ou sollicité (du style «Colportage Nee merci», «Pas de colportage», «Non au porte-à-porte», «Colporteurs et démarcheurs interdits d’accès» ou bien encore «Keine Haustürgeschäfte»...).

Jusqu’à 120.000 euros d’amende

Des autocollants gratuits sont déjà disponibles auprès l’Union luxembourgeoise des consommateurs, du Centre européen des consommateurs, des administrations communales ou des commissariats de police.

Si, néanmoins, le démarcheur s’incruste et propose quand même ses biens ou services et que le consommateur signe malgré tout un contrat, le client a le droit de demander en justice la nullité de contrat signé et la restitution de l’argent payé sans limite de délai (le principe de rétractation des 14 jours n’entre alors pas en ligne de compte).

Le professionnel, lui, risque jusqu’à 120.000 euros d’amende et la confiscation de ses marchandises et de son véhicule, même si au final le consommateur ne signe pas de contrat.

En cas d’absence d’autocollant, le consommateur peut évidemment tout à fait refuser l’entrée à un démarcheur et peut, dans les mêmes conditions, obtenir l’annulation d’un éventuel contrat de vente, à condition d’apporter la preuve (par exemple par témoins) qu'il a demandé au professionnel de s'en aller ou de ne pas revenir.