Le casier judiciaire nouvelle formule revient à un éventail d’extraits distincts, respectant davantage la vie privée des citoyens tout en plaçant les garde-fous nécessaires à l’accès à certaines professions ou postes sensibles. (Photo: Luc Deflorenne / archives)

Le casier judiciaire nouvelle formule revient à un éventail d’extraits distincts, respectant davantage la vie privée des citoyens tout en plaçant les garde-fous nécessaires à l’accès à certaines professions ou postes sensibles. (Photo: Luc Deflorenne / archives)

C’est une loi pompière qui est entrée en vigueur, tant la précédente, celle du 29 mars 2013 relative à l’organisation du casier judiciaire et aux échanges d’informations extraites du casier judiciaire entre les États membres de l’Union européenne, avait déchaîné les critiques.

Dans sa volonté de simplifier l’organisation du casier judiciaire et de l’harmoniser avec les pratiques des autres pays européens, en marge de la création du système européen d’information sur les casiers judiciaires (Ecris), le législateur avait en effet opéré quelques raccourcis. Principal grief: le bulletin n°2, qu’un employeur peut demander à un candidat ou à un salarié, contenant l’intégralité des condamnations hormis celles assorties du sursis. Y figuraient notamment les interdictions de conduire. Ces inscriptions ne figurant pas sur les extraits de casier judiciaire délivrés par les autorités d’autres pays, les demandeurs d’emploi luxembourgeois se trouvaient en situation de désavantage par rapport à d’autres frontaliers ou étrangers présentant les mêmes condamnations.

Cinq bulletins aux périmètres variables

Après consultation tous azimuts, ajoutant aux organismes consultatifs habituels l’Association luxembourgeoise des avocats pénalistes, la Commission nationale de la protection des données ou encore la Ligue des droits de l’Homme, le ministère de la Justice a finalement opté pour une solution à cinq bulletins pour les personnes physiques et à trois bulletins pour les personnes morales, sacrifiant la simplification administrative à une proportionnalité accrue de l’information donnée.

Le casier judiciaire remanié témoigne donc de la volonté de «ventiler les inscriptions en fonction de la finalité pour laquelle le bulletin est délivré». Ainsi, les interdictions de conduire figureront dans un tout nouveau bulletin, le n°4, accessible par le seul ministre des Transports dans le cadre de l’examen de certaines demandes d’agrément ou d’autorisation (accompagnateur de conduite accompagnée, aéronautique, transports ferroviaires, conducteur ou exploitant de taxis).

Au final, les personnes physiques disposent désormais de cinq bulletins. Le bulletin n°1 correspond au relevé intégral des inscriptions. C’est celui auquel les autorités judiciaires auront accès dans le cadre d’une procédure pénale à l’encontre de la personne concernée. L’avocat de celle-ci pourra également se le procurer.

Les interdictions de conduire sorties du bulletin n°2

Le bulletin n°2 présentera uniquement les condamnations à des peines criminelles ou correctionnelles. Les peines assorties du sursis n’y figurent plus et les amendes inférieures à 1.000 euros seront effacées après cinq ans. Le bulletin n°2 pourra être transmis à certains ministères dans le cadre du recrutement de policiers ou d’agents à des postes sensibles comme ceux relevant de la souveraineté nationale au sein de la fonction publique.

La Commission de surveillance du secteur financier est également habilitée à requérir ce bulletin n°2 pour «l’instruction des demandes d’autorisation de faire le commerce concernant toutes les activités professionnelles du secteur financier, pour les enquêtes sur l’honorabilité professionnelle des dirigeants des fonds d’investissement et celle des experts indépendants, conformément à l’arrêté grand-ducal du 22 décembre 1972 ayant pour objet le contrôle des fonds d’investissement», de même que le Commissariat aux assurances «pour l’instruction de toute demande d’agrément adressée à un service de sa compétence».

Le bulletin n°3, plus restreint, reprend une partie des inscriptions du bulletin
n°2, en excluant les peines d’emprisonnement inférieures à 24 mois avec sursis et les peines d’amendes inférieures à 2.500 euros. Les peines d’emprisonnement seront effacées 12 mois après leur exécution. Quant aux interdictions de conduire, seules celles en cours apparaîtront. Un employeur pourra être autorisé à consulter cet extrait dans des cas précis (gardiennage, établissement financier), afin d’apprécier l’honorabilité d’un candidat.

Trois bulletins pour les personnes morales

Le bulletin n°4 reprendra les inscriptions du précédent, en y ajoutant les interdictions de conduire en cours et passées (avec un délai de prescription de trois ans).

Enfin, le bulletin n°5 concernera exclusivement les condamnations pénales liées à des abus sexuels sur enfants, à l’exploitation sexuelle des enfants et à la pédopornographie, ainsi que les mesures d’interdiction d’exercer des activités impliquant des contacts directs et réguliers avec des mineurs pour ces motifs. Il ne pourra être requis que dans le cas d’un recrutement pour des activités professionnelles ou bénévoles nécessitant des contacts avec des enfants, que ce soit dans l’enseignement, l’accompagnement scolaire ou l’encadrement de loisirs.

Quant aux personnes morales, elles disposent désormais de trois bulletins distincts. Outre le bulletin n°1 correspondant au relevé intégral, le bulletin n°2 renseigne les décisions inscrites au casier judiciaire ayant prononcé des condamnations à des peines criminelles et correctionnelles, y compris les condamnations à la fermeture d’une entreprise ou d’un établissement, à la dissolution, à l’exclusion de participation à des marchés publics. Le bulletin n°3 reprend les condamnations à des peines criminelles et correctionnelles, mais ne présente pas les peines assorties d’un sursis ni les amendes inférieures à 25.000 euros.

L’ensemble de ces modifications apparaît sur le site internet de l’Administration judiciaire, qui indique également comment se procurer un extrait du casier judiciaire. Tout citoyen peut se présenter à la Cité judiciaire, bâtiment BC, entre 8h30 et 12h et entre 13h et 16h30, muni d’une pièce d’identité valable (et pour les personnes morales, d’un extrait récent du RCS). Il est également possible de soumettre une demande à distance afin de se faire envoyer l’extrait. Enfin, une tierce personne peut retirer l’extrait au guichet sous réserve de présenter une procuration en bonne et due forme.