Patrice Silverio : « Les résultats  en matière de  management sont rarement palpables  à très court terme. » (Photo : Julien Becker)

Patrice Silverio : « Les résultats en matière de management sont rarement palpables à très court terme. » (Photo : Julien Becker)

Monsieur Silverio, comment la crise a-t-elle affecté votre secteur d’activité ?

« Depuis 2009, le monde du conseil connaît de profonds changements de la demande, des acteurs, des services proposés. Ce processus enclenché par la crise remet en cause les éléments de stabilité et exige de notre part une profonde adaptation. À mon sens, il s’agit bien plus d’une rupture – incluant les pans économiques, technologiques et générationnels – que d’une crise passagère. C’est dans de tels moments que le conseil de haut niveau apporte une plus-value. C’est un facteur indispensable à la croissance dès lors que les entreprises le considèrent comme un investissement et non un coût. Le conseil, au sens noble du terme, est novateur par nature et permet de faire la jonction entre ce qui est connu dans les best practices et l’innovation.

Dans le conseil en management, il faut distinguer les sociétés couvrant le business consulting (stratégie, organisation / opération / change management, PMO, RH et ICT) de ce qu’on appelle le commodities consulting, et dont le body-shopping est une variante : le conseil en recrutement, dans les entreprises technologiques, sert à contracter sur le court terme. C’est certainement dans cette catégorie qu’il y a actuellement le plus de demandes. Et cela donne une concurrence tirant les tarifs à la baisse. A contrario, le business consulting pâtit d’une vision encore trop immature qui ne considère bien souvent l’investissement en conseil que comme un coût. La tendance est donc au recul des demandes. En contrepartie, les clients qui font appel à ce type de conseil ont conscience de la plus-value qu’il peut leur apporter. Et sont prêts à mettre le prix.

Quelles sont les perspectives d’avenir ?

« Le temps des projets d’envergure qui finissaient soigneusement classés est révolu. Aujourd’hui, il faut pouvoir traiter des sujets sensibles, apporter des solutions tangibles et pertinentes en ayant conscience que les résultats en matière de management sont rarement palpables à très court terme. Cependant, pour qu’un projet se concrétise par un succès, il faut bien plus qu’un simple amalgame d’experts. Certains projets sur la Place le démontrent. Le client doit s’entourer d’un partenaire complémentaire qui prendra en mains les domaines qu’il ne sait ou ne veut pas couvrir. Il recherche une expertise couplée à une compréhension du problème et une solution adaptée à son contexte (compliance, coût, organisation, culture, etc.). C’est du ressort du business consulting !

Vos besoins en RH doivent donc s’adapter continuellement…

« ‘L’art de la mobilisation, à tous les niveaux’, c’est un slogan chez nous. Nous nous employons donc à constituer nos équipes de personnes mobilisées qui répondent au plus juste aux besoins du client et de son chantier. Il s’agit d’identifier les talents nécessaires, de croiser les données brutes du projet avec les destins individuels des consultants. Attirer des talents suppose donc, outre l’aspect financier, de leur apporter la sécurité de l’emploi ainsi qu’un travail intéressant et créatif. Il arrive que le challenge des missions prenne le pas sur les autres aspects, ce qui nous conduit à rechercher des profils ayant l’esprit d’entreprise, l’envie de créer quelque chose.

Que diriez-vous aux décideurs pour améliorer votre secteur ?

« Il faudrait qu’ils prennent plus largement conscience que l’on n’est performant qu’au travers de son métier. Chacun le sien ! Or certains jouent aux apprentis-sorciers, cherchant vaille que vaille à couvrir tous leurs besoins en interne. Finalement, ils se dispersent. Le résultat est rarement adapté et la solution trouvée coûte bien plus qu’une mission de conseil similaire. Le marché doit également réaliser que les acteurs locaux sont les plus à même de répondre aux besoins.  »