Mario Grotz (Photo: Julien Becker)

Mario Grotz (Photo: Julien Becker)

Le tissu économique s’articule autour de plusieurs axes, dont la recherche n’est pas le moindre. La recherche publique au Luxembourg connaît un dynamisme propre à sa jeunesse, mais aussi à une volonté politique qui s’inscrit dans une démarche d’anticipation et de spécialisation. «À l’époque, nous avons toujours su développer des niches, car nous disposions d’un environnement législatif favorable. Depuis, et avec la nécessité d’une harmonisation européenne, créer des niches de souveraineté est bien moins facile», reconnaît Mario Grotz, directeur général de la recherche, de la propriété intellectuelle et des nouvelles technologies au ministère de l’Économie.

La recherche et l’innovation ont donc pour vocation de prendre le relais et de stimuler l’économie au travers d’une politique orientée vers le long terme. Mais, conscient que courir plusieurs lièvres à la fois s’avère souvent contre-productif, le gouvernement a cherché à définir des domaines d’innovation prioritaires et de les développer dans une optique de renforcement de secteurs «historiques» et de secteurs en devenir. Il s’agit plus spécifiquement de la biotechnologie, des écotechnologies, de la science des matériaux, de l’ICT et des technologies spatiales. Concrètement, la recherche publique vise à développer ces domaines de compétences au travers de diverses structures (CRP, Université, etc.), mais aussi à tisser des partenariats avec des entreprises privées, le ministère de la Recherche donnant son écot au travers d’aides aux entreprises par le biais, notamment, d’une petite dizaine d’instruments permettant de cofinancer des projets privés. En 2013, par exemple, 154 projets privés ont été cofinancéspar l’État, dont une centaine de projets R&D. Parmi ces derniers, 55% étaient liés à la science des matériaux, ce qui, vu le passé industriel de l’économie luxembourgeoise et la présence de grands acteurs internationaux dans ce secteur, s’explique aisément. L’environnement de la recherche, du développement et de l’innovation déploie ses ailes, peu à peu, mais pâtit encore de quelques faiblesses, parmi lesquelles l’absence d’une structure à dimension internationale. La fusion en cours du CRP Henri Tudor et du CRP Gabriel Lippmann doit répondre à ce manque, que le Grand-Duché souhaite combler d’ici 2018. «D’abord, les deux CRP ont des domaines de compétences identiques (matériaux et ICT par exemple). Les rassembler découle donc d’une volonté d’optimisation, explique Mario Grotz. Ensuite, en mettant en place une structure plus grande avec ce ‘New CRP’, le Luxembourg pourra enfin se positionner parmi les États faisant preuve d’un haut degré d’engagement en R&D, sur le plan européen déjà. Avec un effectif de départ de plus de 700 scientifiques, ingénieurs de recherche et spécialistes en innovation hautement qualifiés, les équipes atteindront alors une masse critique satisfaisante. Ce nouveau CRP aura également des effets positifs sur les services à apporter aux entreprises.»

Des premiers pas probants

Pour M. Grotz, la recherche publique d’un pays est sans conteste l’un des moteurs d’une économie en croissance. «Si le pays parvient à ancrer la recherche sur son territoire, les risques de voir les entreprises quitter le Luxembourg seront bien moindres», affirme-t-il. Les partenariats entre public et privé se développent, en témoignent les relations entre Guardian Industries et l’Université ou encore les contacts étroits entre cette même université et ArcelorMittal, concrétisés notamment par le financement d’une chaire consacrée à l’ingénierie des façades. «Mais l’exemple le plus concret de collaborations émane certainement de la SnT (Interdisciplinary Centre for Security, Reliability and Trust, ndlr), qui a tissé des liens étroits avec une trentaine d’entreprises privées. Ces relations ont permis à ces sociétés d’aborder des projets phares, mais risqués, qui sinon n’auraient certainement pas vu le jour», développe M. Grotz.

Il faut y veiller, d’autant plus que la ligne directrice établie par Bruxelles laisse entrevoir une probable suppression de nombreux instruments de cofinancement.