Laurence Fransen (Responsable des Ressources Humaines, Utopia) (Photo: David Laurent/Wide)

Laurence Fransen (Responsable des Ressources Humaines, Utopia) (Photo: David Laurent/Wide)

Madame Fransen, comment décririez-vous votre fonction en général?

«Elle est très diversifiée. Je gère ici tous les domaines des ressources humaines: le recrutement, la formation, les entretiens d’évaluation, les relations avec les directions comme avec les syndicats, les questions salariales, les dossiers juridiques…

En liaison étroite avec la direction, nous établissons la stratégie au niveau des ressources humaines. Nous identifions les besoins, le développement des compétences, l’évolution des services, la productivité que nous voudrions obtenir. J’ai également des échanges réguliers avec les différents responsables de service afin que la stratégie RH définie soit mise en application dans la gestion du personnel sur le terrain.

Il y a des spécificités à l’entreprise?

«Le capital humain y est important, primordial même, puisque nous sommes une entreprise de loisirs et de services. Nous restons une PME, d’environ 90 salariés ici au Luxembourg. Nous conservons une proximité et une ouverture enrichissantes: ici, nous savons encore qui est qui… En outre, il y a une particularité liée à l’entreprise et au secteur: la moitié du personnel est constitué de jeunes, souvent des étudiants dont c’est le premier travail. Nous avons donc, d’une certaine manière, aussi un rôle éducatif, formateur, à jouer. Et c’est particulièrement gratifiant de voir ces jeunes évoluer, mûrir et être prêts à se lancer dans la vie active.

Disposez-vous d’un service pour cette gestion?

«Je suis un peu toutes les facettes du métier à moi toute seule. Mais, bien évidemment, pour assurer le quotidien, j’ai le soutien précieux du secrétariat de direction, pour le volet administratif. Le theater manager et son équipe assurent sur le terrain, ainsi que pour le recrutement des étudiants. En outre, tout ce qui concerne le payroll est externalisé… A priori, il n’y a pas d’évolution prévue à ces données.

Avez-vous dû vous adapter au contexte de votre entreprise, en affinant votre formation initiale ou vos compétences, par exemple?

«Je ne connaissais pas ce monde de l’exploitation cinématographique, qui est d’ailleurs assez méconnu du grand public. On voit le film, mais pas l’équipe qui le tourne. Pour l’exploitation, c’est un peu similaire. J’ai donc dû, bien entendu, me familiariser avec les spécificités, en termes de profils d’emploi, de fonctionnement.

J’ai dû reprendre un peu de formation pour le droit du travail luxembourgeois, vu que j’avais suivi mes études à l’étranger. Mais ce bagage-là était très important et était tout adapté à la gestion moderne des ressources humaines, dans une société comme la nôtre. Cela ne m’empêche pas de suivre régulièrement des formations, dans différents domaines des RH, afin de rester à la page sur les pratiques et évolutions de la profession…

Pour le reste, je pense que rigueur, flexibilité, sens de la discrétion, écoute et communication sont indispensables dans le métier. Cela n’est pas lié au secteur en particulier. C’est valable dans toutes les approches de la gestion des ressources humaines.

Le marché a-t-il changé ces dernières années?

«J’ai constaté que le nombre de candidatures, en cas de vacance de postes, a diminué ces dernières années. J’avoue qu’il m’est difficile d’en définir la raison spécifique.

Mais vous n’avez pas de difficultés particulières à recruter? Quels biais utilisez-vous? «Non, nous ne rencontrons pas de difficultés pour la majorité des postes. Nous utilisons les moyens classiques, annonces journaux, sites Internet, ainsi que le networking de nos cadres et salariés.

Pour la majorité des postes, dites-vous? Il y a donc des exceptions?

«Oui, il est indéniable que nous éprouvons des difficultés à recruter des site managers. La gestion des cinémas sur le terrain, le management d’exploitation, ce sont des domaines passionnants. Les responsables gèrent les relations clientèle, le personnel, les relations avec nos fournisseurs, le bon déroulement des événements spéciaux en collaboration avec le département Marketing, les séances scolaires en collaboration avec le personnel enseignant… C’est très varié. Et les managers en place se plaisent dans ce travail, où les journées ne se ressemblent pas!

Mais la difficulté, quand on cherche un manager dans ce domaine, c’est qu’il faut quelqu’un de motivé. Ces postes exigent des horaires parfois ingrats; on travaille en soirée, les week-ends, les jours fériés. C’est comme dans la restauration, en quelque sorte. Cependant, ce travail est vraiment enrichissant, rappelons-le.

Y a-t-il un fort turnover dans le personnel?

«Oui et non. Cela dépend du personnel dont on parle. Il y a évidemment un fort turnover au niveau de la population jeune, souvent composée d’étudiants qui travaillent pour aider à financer leurs études par exemple. Ils ne sont pas chez nous pour faire carrière dans le monde de l’exploitation cinématographique. Une fois leur formation achevée, ils suivent leur voie… En revanche, dans le personnel disons «adulte-fixe», ce turnover est très faible.

Quelle est votre politique pour fidéliser le personnel?

«Il y a d’abord le climat de travail qui, je pense, est très serein. Nous communiquons beaucoup entre nous, la taille humaine de la société favorisant un esprit d’équipe. L’ambiance est jeune et dynamique. La hiérarchie n’est pas pesante et nous pratiquons la politique de la porte ouverte: les dirigeants sont accessibles et cela permet souvent de régler les petits soucis avant qu’ils puissent devenir de gros problèmes… Il y a un respect mutuel et cela se sent.

Il faut aussi tenir compte du fait que nous travaillons dans un domaine qui est diversifié, en mouvement. La convention collective contribue sans doute à la fidélisation et des avantages s’ajoutent dans le package salarial, comme des chèques-repas, des vouchers, des fruits destinés au personnel… Autant de détails appréciés.

Nous organisons régulièrement des événements pour le personnel, comme le petit déjeuner de Saint-Nicolas récemment, pour nos salariés et leur famille. Nous essayons d’être à l’écoute. C’est pareil en ce qui concerne la formation et les évaluations. Celles-ci ont lieu deux fois par an et je vois tout le monde. C’est un échange et cela contribue aux possibilités d’évolution au sein de l’entreprise, pas seulement en termes hiérarchiques, mais aussi dans l’évolution de la fonction, des responsabilités, de la gestion de projet… Je pense que c’est un facteur motivant.

L’offre de formations va dans le même sens. Nous prévoyons chaque année une palette d’actions de formation, pour faire évoluer notre personnel et investir dans son développement. Cet investissement dans le capital humain est important pour nous.

Cela fait-il clairement partie de la stratégie du groupe?

«Oui, c’est un virage à prolonger. Il faut continuer à investir dans la formation, surtout par les temps qui courent. Les compétences dont nous avons besoin ne cessent d’évoluer. Il faut penser au moyen et au long terme. Cela passe, en grande partie, par une formation bien articulée du personnel.

Avez-vous des chantiers importants en cours?

«Il y en a en permanence. Parce que, précisément, le métier du cinéma évolue sans cesse. Les techniques progressent et on doit suivre en matière d’investissements et de formations. Que l’on pense au cinéma numérique ou à la 3D, par exemple. Mais le métier d’exploitant de cinéma évolue sans cesse aussi. Il doit évoluer d’ailleurs, sous peine d’être victime de l’érosion de la fréquentation des salles, des ventes de home cinema et de la sortie de plus en plus rapide des supports de salon.

Chez nous, cela se traduit par une évolution de l’offre, développée ces dernières années. Nous avons dû créer de nouveaux produits, pour aller dans le sens du B2B et du B2C. Nous créons des événements, publics ou sur mesure. Il y a une demande dans ce sens-là et cela implique une adaptation. Aussi en termes de personnel puisqu’il y a de nouveaux postes et quasi de nouveaux métiers, des besoins nouveaux en formation. A titre d’exemple, il n’y avait qu’une personne pour le marketing dans notre société, il y a une dizaine d’années. Nous avons mis en place un pool de cinq personnes aujourd’hui…

Notre core business restera toujours le cinéma grand public, mais nous avons développé des produits ciblés, grâce aux nouvelles technologies, au cinéma digital, aux captations et retransmissions live d’événements prestigieux… Il y a davantage de possibilités, ce qui a un impact sur la gestion des ressources humaines. Mais cela rend les choses vivantes et passionnantes!»

 

CV - Une femme-orchestre en coulisse
Laurence Fransen est entrée en avril 1998 au poste de responsable des ressources humaines chez Utopia. «Mon premier vrai travail», dit la jeune femme qui est tombée sous le charme des coulisses de l’exploitation cinématographique et de la diversité des tâches qui lui incombent.
«On ne s’ennuie pas, c’est clair.»

Laurence Fransen est pratiquement un service à elle toute seule. Sa formation l’y préparait parfaitement. Elle est en effet titulaire d’une maîtrise en sciences de l’information et de la communication, un cursus suivi à Montpellier et choisi pour son axe orienté vers la comunication interne. Elle a également obtenu un master en human resources management and industrial relations, à Hertford (Grande-Bretagne), une
des facultés intégrées à la prestigieuse Oxford University.
Sa fonction de HR manager à Utopia Luxembourg lui donne aussi, avec l’accrois­sement du groupe, des responsabilités en France (Utopolis Longwy) et des interventions ponctuelles pour les sites belges et néerlandais de l’exploitant