«Nous avons créé un fonds, qui est plus un véhicule de titritisation qui émet des obligations sur le marché» déclare Matthieu Cicurel, CEO de Transparency Capital. (Photo: Licence C.C.)

«Nous avons créé un fonds, qui est plus un véhicule de titritisation qui émet des obligations sur le marché» déclare Matthieu Cicurel, CEO de Transparency Capital. (Photo: Licence C.C.)

Le «private equity», par son approche à long terme et les liens plus étroits qu’il permet de tisser au sein de l’entreprise, attire de plus en plus d’investisseurs. Pourtant, même si les montants investis dans les entreprises par ce canal – sans passer par la bourse, donc – sont en augmentation constante ces dernières années, il reste très peu accessible pour les plus petits investisseurs individuels. Parce que la somme de départ pour avoir accès aux fonds de «private equity» se monte à plusieurs millions d’euros.

C’est en partant de ce constat qu’est née Transparency Capital, une société basée à Luxembourg qui se donne justement pour mission de faire le lien entre les deux. «Les grands fonds d’investissement préfèrent traiter avec une poignée d’investisseurs institutionnels, comme des compagnies d’assurances, des fonds de pension ou des fonds souverains, que d’avoir à gérer des milliers de petits investisseurs privés», explique Matthieu Cicurel, son CEO et l’un des quatre fondateurs.

Face aux besoins en capitaux des fonds et à la demande des investisseurs privés d’y avoir accès, la plateforme Transparency Capital se propose donc de jouer l’interface pour répondre à cette double demande. Par quel stratagème? «En fait, l’idée est relativement simple, poursuit le manager de la nouvelle structure. Nous avons créé un fonds, qui est plus un véhicule de titritisation qui émet des obligations sur le marché.» Grâce à l’argent collecté, la société peut acheter des parts dans des grands fonds de «private equity». «Nous agrégeons un ensemble de petits tickets pour en créer un grand», poursuit Matthieu Cicurel. Le montant nominal des obligations est de 150.000 euros, une mise importante, mais qui reste une somme raisonnable pour un investisseur moyen.

Liquidité et frais planchers

Il note aussi que le poids du ticket d’entrée n’est pas l’unique écueil pour investir dans un fonds de «private equity». Un autre vient du fait que les fonds ont généralement une durée de vie entre 10 et 12 ans et que l’argent placé ne sera pas rendu avant le terme défini au départ. «Nos obligations, elles, sont cotées à la Bourse de Luxembourg et sont échangeables», pointe-t-il. Enfin, dans la balance, il place aussi l’impact des frais liés à la gestion du fonds et à la performance. «Certains acteurs s’octroient parfois une commission de performance qui peut aller jusque 20 %. Nous n’en prenons pas et nous avons tenu à établir des frais planchers. Ils se montent donc à 0,7 % de l’investissement sur une base annuelle.»

En ce qui concerne la part bénéficiaire tirée de l’obligation, elle variera en fonction de la performance du fonds «pour retourner le maximum de performance vers l’investisseur», précise Matthieu Cicurel. Quant à la notion de transparence gravée dans le nom de la jeune société, elle se concrétise notamment par une information préalable afin que chaque candidat investisseur sache où ira réellement son argent. Il reçoit donc une information sur le fonds et le gérant de fonds qui doit lui permettre de faire un choix en connaissance de cause. En fait, pour chaque obligation, la société publiera un prospectus reprenant les principaux éléments et qui sera contrôlé par la Bourse de Luxembourg. «C’est encore une de nos particularités, renchérit le responsable. Nous structurons la transaction, mais nous ne gérons pas l’argent. Une situation qui ne nous place pas sous le contrôle de la CSSF et nous permet justement de pouvoir limiter nos frais.» Mais il précise: même sans contrôle de l’autorité des marchés financiers, Transparency Capital est soumise à toutes les réglementations liées à son métier.

50 milliards de dollars

Fondée officiellement en 2015 au Luxembourg, Transparency Capital prépare sa première levée de fonds et donc la première émission obligataire. L’objectif est d’investir dans le fonds Prime Stone, dont la stratégie est de prendre des participations de 3% à 15% dans des entreprises cotées européennes et de pouvoir jouer un rôle d’investisseur actif au sein du conseil d’administration. Le montant d’engagement minimum cumulé a été fixé à 60 millions d’euros, mais l’objectif affiché est d’atteindre 202 millions d’euros en sollicitant des investisseurs privés et des «family offices». Et en tout cas des financiers qui répondent à la définition d’«investisseur averti».

Dans sa stratégie, la société s’est donné pour cible d’attirer les patrimoines dont la taille fluctue entre 1,5 et 30 millions d’euros. «Il n’y a pas vraiment de plancher établi, mais la mise d’entrée étant de 150.000 euros, nous voulons nous montrer prudents par rapport aux acteurs approchés.» Avec un patrimoine supérieur à 30 milliards, ils peuvent par contre commencer à placer directement des montants importants dans des fonds de «private equity». En partant de cette tranche de patrimoines, et compte tenu de la part injectée dans les marchés d’actions, Transparency Capital a calculé son marché potentiel aux alentours de 50 milliards de dollars au niveau de l’Europe occidentale. «Dans son étude annuelle Global One, le Boston Consulting Group a estimé le patrimoine total des personnes physiques à 40,5 trillions de dollars pour l’Europe de l’Ouest, note Matthieu Cicurel. Si on parle d’une cible de 50 milliards de dollars, nous ne visons donc qu’une petite portion de la fortune globale.» Mais de quoi quand même injecter une nouvelle manne importante dans l’économie réelle visée par le «private equity».