«Une participation de CLT-UFA dans la SA Radiolux ne saurait être admise que si elle se limite à celle d’un ‘sleeping partner’», souligne l’Alia. (Photo: Licence CC)

«Une participation de CLT-UFA dans la SA Radiolux ne saurait être admise que si elle se limite à celle d’un ‘sleeping partner’», souligne l’Alia. (Photo: Licence CC)

L’arrivée du mastodonte RTL dans le capital de Radiolux, l’exploitant de la future radio francophone L’essentiel Radio, qui commencera ses émissions en février prochain sur la fréquence 107,7 MHz, va se faire sous conditions. Le conseil d’administration de l’Autorité luxembourgeoise indépendante de l’audiovisuel (Alia) a rendu le 4 janvier un avis - rendu public ce jeudi - de trois pages dans lequel elle accepte «d’un point de vue de politique audiovisuelle» la prise de participation de 25% de CLT-UFA dans Radiolux et le nouveau tour de table qui se traduit par une réduction de la détention d'Edita, l’éditeur de L'essentiel (joint-venture entre le Suisse Tamedia et le groupe Editpress), de 50 à 40% et des partenaires belges, Vincent Bragard, Serge Leenman et Samuel Tabart de 50 à 35%.

«Une participation de la SA CLT-UFA dans la SA Radiolux ne saurait être admise que si elle se limite effectivement à celle d’un ‘sleeping partner’ dans le sens le plus strict», souligne l’Alia, qui prend ses précautions pour éviter une éventuelle «reprise rampante» de la radio francophone par RTL, à l’instar de ce qui s’est produit avec la radio musicale Eldoradio, totalement reprise en main par le groupe du Kirchberg. «L’exemple à ne pas suivre», assure l’autorité de l’audiovisuel.

Chantage?

Cette dernière a pris sa décision après avoir auditionné le 14 décembre dernier Emmanuel Fleig, le représentant de Radiolux, et entendu ses explications sur le pourquoi de la présence de RTL dans un projet de radio francophone, conçu au départ comme concurrent de ses trois services, RTL Radio Lëtzebuerg, RTL Radio et Eldoradio, qui captent près des trois-quarts de l’audience.

Par crainte que RTL libère une de ses fréquences du programme germanophone de RTL Radio (Deutschland Hit-Radio) et la change en programme francophone concurrent de L’essentiel Radio, les actionnaires «historiques» de Radiolux ont ainsi préféré intégrer la CLT-UFA plutôt qu’en faire un compétiteur. Une thèse du chantage que l’Alia relativise dans son avis, car le groupe RTL n’a pas les mains aussi libres que ses dirigeants le font croire pour transformer à leur guise un programme ayant vocation à être diffusé en langue allemande: «L’article 1 de la concession du programme RTL Radio (Deutschland Hit-Radio) dispose en effet que ce programme est diffusé en langue allemande, ce qui en fait de l’avis de l’Autorité un élément essentiel dont la modification implique le respect de certaines procédures», rappelle l’avis.

La présence de la CLT-UFA est donc tolérée dans le capital de Radiolux à condition de ne pas dépasser les 25% du capital «sauf dans des circonstances exceptionnelles à motiver dûment par les actionnaires». Une montée en puissance devra être avisée par l’Alia et recevoir l’aval du gouvernement. En cas de velléité de sortie, les quatre «promoteurs historiques» du projet de radio (Edita et les trois personnes physiques) disposent d’un droit de préemption «effectif, réel et réciproque sur leurs parts respectives».

Régie à part

L’Alia pose une seconde série de «précautions» (des «garde-fous contractuels», écrivent ses membres) pour éviter une reprise en main de L’essentiel Radio par RTL et son influence opérationnelle: CLT-UFA aura droit à deux administrateurs sur un total de huit et la gestion quotidienne de l’entreprise devra être assurée par des administrateurs-délégués issus exclusivement des rangs des partenaires historiques. Lesquels devront par ailleurs nouer un pacte d’actionnaire pour dégager une position commune au sein du conseil d’administration de Radiolux.

Le conseil de l’Alia juge «crucial» l’indépendance du projet de radio à plusieurs niveaux: indépendance éditoriale, autonomie des studios à Differdange par rapport aux installations de RTL et séparation de la régie publicitaire.

«Des choix moins contraignants donneraient très vite libre voie à une concentration renforcée du paysage radiophonique grand-ducal au détriment des auditeurs dont le choix se limiterait surtout à différents programmes proposés par la SA CLT-UFA», prévient encore l’Alia qui craint, si les garde-fous contractuels n’étaient pas imposés ni respectés, «un grand pas en arrière» qui ferait revenir à la situation d’avant la libéralisation des ondes au début des années 90, du quasi-monopole au profit d’un opérateur privé.

C’est à ce prix seulement que l’Alia a donné son feu vert à l’arrivée de RTL dans Radiolux. L’autorité se réserve d’ailleurs le droit d’imposer à l’entreprise d’inscrire «des dispositions pertinentes» dans son cahier des charges.

Des contraintes qui n’ont assurément pas dissuadé RTL de s’associer à L’essentiel Radio comme partenaire dormant. Jusqu’à preuve du contraire.