Plus que le prix d’un produit, c’est son financement qui pose problème sur le continent africain, estiment Jürgen Schopp et Achim Kopmeier. (Photo: Solartec)

Plus que le prix d’un produit, c’est son financement qui pose problème sur le continent africain, estiment Jürgen Schopp et Achim Kopmeier. (Photo: Solartec)

Si Jürgen Schopp a les deux pieds au Luxembourg, son regard est tourné vers l’Afrique. Et depuis longtemps. Quand il a créé Solartec en 2001, cet entrepreneur avait déjà en tête le Continent Noir. Mais pas question de brûler les étapes. Avant de faire le grand pas, son entreprise spécialisée dans la technologie photovoltaïque a fait ses gammes localement. «Nous avons commencé avec une installation destinée aux pays européens», raconte-t-il. «Cela nous a permis de gagner un peu d’argent pour concevoir un deuxième système, mieux adapté aux réalités africaines.»

Plus complexe dans sa conception, ce second produit a été baptisé Independent Power Systems (IPS) et permet non seulement de produire de l’électricité grâce à l’énergie solaire, mais aussi de gérer un réseau électrique totalement indépendant. Cette solution a été pensée pour les villages africains loin de toute infrastructure énergétique. «Lors de l’installation du premier IPS, tout le village est venu creuser les tranchées pour enterrer les câbles», se souvient Jürgen Schopp. Malgré des clients modestes, aucune concession n’a été faite sur le prix. «L’acceptation de la technologie en Afrique est différente de la nôtre», ajoute-t-il. «En Europe, on cherche toujours le moins cher. Là-bas, si ça ne coûte pas, ce n’est pas bon.»

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le problème de l’Afrique n’est donc pas l’argent, mais le financement, estime l’entrepreneur. Et le plus difficile est de convaincre les banques à s’engager. Solartec emploie une dizaine de personnes au Luxembourg et en a formé au moins autant en Afrique pour l’entretien des machines. Mais les 12 IPS qu’elle a vendus ont tous été achetés par des ONG et supportés par des aides gouvernementales. «Mon but est de vendre sans intermédiaire pour responsabiliser les bénéficiaires. Le coût de ce système, 120.000 euros en moyenne, n’est pas un problème», rappelle Jürgen Schopp. «J’ai de nombreux clients déjà intéressés, mais je dois leur trouver une solution de financement.»

S’attaquer au marché africain n’est toutefois pas qu’une question de financement. Pour faire du business dans les pays subsahariens, il faut également s’adapter aux cultures locales. La corruption, qui fait bien souvent peur aux investisseurs, n’est pas un obstacle insurmontable. «Bien sûr qu’on la rencontre, mais on peut dire non», argumente M. Schopp. «Les choses prennent simplement un peu plus de temps.»

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Achim Kopmeier est le CEO de Myriado Cleantech, une petite entreprise luxembourgeoise qui propose des stations de traitement de l’eau alimentées par des panneaux photovoltaïques. Il travaille en collaboration étroite avec Solartec et Apateq pour la construction de son produit et n’emploie que trois salariés au Luxembourg. Mais il a ouvert avec son partenaire une antenne au Mali, où trois autres personnes travaillent pour son entreprise, et il est en train de s’installer au Nigeria. Son but est de construire une usine en Afrique, pour baisser ses coûts de production. «C’est difficile d’entrer sur ce marché, car le relationnel est bien plus important qu’ici», explique-t-il. «Il faut passer du temps à parler à ses clients potentiels et gagner leur confiance petit à petit.» Dans ces conditions, un atout majeur pour accélérer le développement de son business est d’avoir un partenaire sur place. «Le mien est Africain, mais a vécu en Allemagne plusieurs années», ajoute Achim Kopmeier. «Il connaît bien les deux continents et me dit toujours: vous, les Européens, avez la montre. Nous, les Africains, avons le temps.»

Les deux entrepreneurs se rejoignent enfin sur le fait qu’il est essentiel de bien comprendre les besoins de ses clients potentiels et de se placer à un niveau d’égalité avec ses interlocuteurs pour espérer s’installer durablement sur les marchés africains. «Les gens parlent beaucoup, il est donc facile de faire sa publicité… ou de perdre toute crédibilité», concluent les deux hommes.