Que ce soit au sein du gouvernement ou dans les fractions de l’actuelle coalition au pouvoir, le message émis ces dernières semaines reste le même: l’activité législative menée au cours des cinq dernières années n’a jamais été aussi intense. Et tous brandissent les «quelque 600 projets de loi» déposés à la Chambre depuis la fin 2013, chiffre supérieur de 20% au nombre de textes soumis aux députés lors des précédentes législatures.

Censé incarner l’activité «modernisatrice» revendiquée dans le programme gouvernemental, ce chiffre cache pourtant d’importantes disparités, fruits à la fois des réformes souhaitées, mais aussi du contexte international.

Ce n’est donc pas un hasard si le ministère le plus actif au cours de cette législature se trouve être le ministère des Finances, en première ligne pour mettre en œuvre le «level playing field» tant réclamé à la suite des révélations sur les LuxLeaks. Avec pas moins de 90 projets de loi déposés, soit près de 15% de l’activité législative totale du gouvernement, le ministère dirigé par Pierre Gramegna (DP) aura profondément modifié la législation fiscale nationale pour notamment la placer en conformité avec les standards Beps de l’OCDE.

Idem en ce qui concerne le ministère des Affaires étrangères, également touché par l’hyperactivité gouvernementale, en lien direct avec l’arrivée de réfugiés à partir de l’été 2015 et ses conséquences. Une situation survenue en pleine présidence luxembourgeoise du Conseil de l’UE. La dernière marche du podium des ministères les plus actifs revient au ministère de la Justice, dont l’action aura été globalement moins médiatisée, mais qui porte pourtant plus la patte de la coalition. Que ce soit via la mise en place d’une sàrl simplifiée, la création d’une infraction de «dissimulation de visage dans certains lieux publics» ou la réforme du divorce.

Les ministères du Développement durable et des Infrastructures, de l’Économie ou de l’Éducation nationale n’auront pas non plus chômé au cours de cette législature, avec la production de plus de 150 projets de loi. Ces derniers englobant aussi bien la mise en œuvre du tram et de ses extensions que le «space mining» ou bien encore l’introduction du multilinguisme dans les crèches.

Si les données de la Chambre des députés mettent en avant certains ministères – et donc certains ministres –, ces chiffres peuvent toutefois induire en erreur en laissant sous-entendre que les administrations les plus productives sont celles qui figurent en haut de ce classement. Car tous les textes soumis au vote des députés ne sont pas des projets créés ex nihilo, mais dans certains cas des transcriptions en droit luxembourgeois de directives européennes.

À l’inverse, d’autres ministères ont produit un nombre de projets de loi plus restreint, car touchant des sujets hautement polémiques, comme la réforme de la relation entre l’Église et l’État, l’accord dans la fonction publique ou la refonte totale du mode de fonctionnement du Fonds du logement. C’est notamment le cas du ministère d’État, qui joue en théorie plus un rôle de pivot entre ministères. Sans compter que certains ministres ont vu leurs attributions évoluer au cours de leur mandat, suite notamment au départ de Maggy Nagel (DP), initialement ministre de la Culture et du Logement. Un remaniement ministériel qui a notamment vu Xavier Bettel (DP) endosser de nouvelles responsabilités, tout comme Marc Hansen (DP), promu ministre du Logement et ministre délégué à l’Enseignement supérieur et à la Recherche.

Année électorale oblige, ministres et députés de la majorité se sont empressés de voter un maximum de projets de loi. Sur les 611 soumis au cours de la législature, 531 ont été évacués, selon les données de la Chambre des députés. À savoir votés, scindés ou retirés du rôle. Autrement dit, seuls 80 projets de loi n’ont, à ce jour, pas encore été votés. Et donc, plus de 85% (86,9%) des textes soumis au vote ont été adoptés par les 32 voix de la majorité. Selon les informations communiquées fin juillet par Mars Di Bartolomeo (LSAP), président de la Chambre, «84,26% des lois ont été adoptées avec plus de 50 voix et 73,26% l’ont été avec un nombre de voix supérieur à 57, voire à l’unanimité».