Peu habituée aux coups d’éclat, la BEI présentera sa position officielle sur l’InvestEU deux jours après la tenue du prochain Conseil des gouverneurs. (Photo: Maison moderne / archives)

Peu habituée aux coups d’éclat, la BEI présentera sa position officielle sur l’InvestEU deux jours après la tenue du prochain Conseil des gouverneurs. (Photo: Maison moderne / archives)

Parmi les grandes lignes du budget 2021-2027 proposées en mai par la Commission et détaillées courant juin, celle relative à la mise en place d’un nouvel instrument de financement des projets stratégiques fait beaucoup parler au sein de la Banque européenne d’investissement (BEI). Pas tant sur la dotation du successeur du Fonds européen pour les investissements stratégiques (Feis) que sur la philosophie souhaitée pour sa mise en œuvre.

Devant bénéficier d’une garantie publique initiale de 15,2 milliards d’euros capable de lever un investissement global de 650 milliards entre 2020 et 2027, l’InvestEU a été pensé pour ne pas se baser sur la seule expertise de la BEI pour sélectionner les projets à financer. La Commission souhaitant avoir recours également à d’autres institutions nationales ou internationales, que ce soit la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd) ou la Banque mondiale. Autrement dit, la mise en concurrence de la seule banque d’investissement dont l’actionnariat est composé de ses seuls États membres.

Que la Commission joue un rôle de premier plan dans la sélection des projets.

Proposition de règlement européen

«Nous sommes surpris et déçus que la Commission n’ait pas voulu continuer sur la méthode du plan Juncker, malgré son franc succès», indique un haut responsable de la BEI, cité anonymement par le quotidien belge L’Écho qui souligne que «ce modèle a vraiment fonctionné comme il devait, nous ne comprenons pas très bien la raison de l’abandonner».

Pour Bruxelles, la mise en place de cette nouvelle logique, en rupture avec celle qui prévaut depuis 1958 et la création de la BEI, répond avant tout à la volonté «d’accroître et de diversifier la réserve de projets», tout en développant «le vivier potentiel de bénéficiaires finaux». Le tout via le recours à «une expertise et une expérience spécifique» des banques et «autres institutions nationales et régionales de développement des États membres». De nouveaux «partenaires financiers» soumis toutefois au respect «de certaines conditions», assure la Commission, sans préciser lesquelles.

C’est toujours mieux si chacun fait le métier qu’il fait le mieux.

Un haut responsable de la BEI

Si la BEI «reste le principal partenaire financier (...) dans le cadre d’InvestEU», l’exécutif européen indique dans le texte final avoir également d’autres ambitions. «La proposition veille à ce que la Commission joue un rôle de premier plan dans la sélection des projets et des régimes bénéficiant d’un soutien, conformément à un intérêt commun de l’Union». En clair, une reprise en main politique aux dépens des experts techniques de la BEI sur les programmes à soutenir.

Un mélange des genres que n’apprécie guère l’institution du Kirchberg qui estime, par la voix d’un haut responsable cité par nos confrères belges, que «c’est toujours mieux si chacun fait le métier qu’il fait le mieux: la Commission est une institution politique, la BEI est une institution financière». La question de l’introduction d’acteurs nationaux dans le mécanisme fait également craindre des déséquilibres entre États, du fait du poids des différents établissements. Pour le Luxembourg, la SNCI pourrait donc avoir un rôle à jouer, mais ce dernier serait sans commune mesure avec ses équivalents allemand ou français par exemple.

«En cours d’analyse», les propositions de la Commission feront l’objet d’une prise de position officielle de la part de la BEI lundi prochain. Soit deux jours après la tenue du prochain Conseil des gouverneurs, réunion des ministres des Finances de l’UE, au cours de laquelle certaines clarifications pourraient avoir lieu.