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Vous clôturez dix ans de carrière au CRPHT en créant votre propre start-up. L'herbe du voisin est-elle toujours plus verte?

Guy Kerger: Dix ans, c'etait le moment de faire le bilan. J'avais lancé le défi, il y a 10 ans au CRP Henri Tudor,  de monter une structure à partir de zéro qui visait à aider les entreprises dans le domaine du multimédia. A cette époque, personne ne parlait de multimédia, personne ne saisissait toutes les opportunités de cette nouvelle industrie. Aujourd'hui le NMG n'a plus rien à voir avec le CRMM à sa création. Le groupe est  maintenant bien ancré dans le tissu économique luxembourgeois et ses différents départements proposent un large éventail de services et de compétences à leurs partenaires. C'était donc le moment idéal pour me lancer un nouveau défi.

Il était assez logique pour moi de rester dans la nouvelle économie. Avant de venir au CRP, je possédais déjà un cabinet de consultance en télécommunications à Nuremberg, en Allemagne. Quelque part, le virus est resté en moi et j'avais le besoin très profond de me relancer dans la création d'une nouvelle entreprise. Partant du constat que pour profiter pleinement des opportunités offertes par la nouvelle économie, une entreprise doit être capable de repenser ses produits, son organisation, ses relations avec ses partenaires et clients, et aussi son positionnement sur le marché, la mission de ma nouvelle entreprise (MindForest) était rapidement définie.

Avec MindForest, on vise à travailler avec nos clients pour imaginer des nouveaux moyens pour créer, améliorer et développer les façons de faire des affaires dans la nouvelle économie. La nouvelle économie demande de l'imagination à tous les niveaux. La continuité n'est pas le principal mot d'ordre ; les approches traditionnelles sont utiles et efficaces mais ne font que répondre à des besoins déjà exprimés par les entreprises durant le dernier siècle. La nouvelle économie apporte donc de nouvelles exigences.

MindForest est conçu comme une entreprise étendue qui repose sur un réseau international de collaborateurs  qui ont à la fois des compétences spécifiques (en marketing, organisation, technologie et relations humaines) et une solide expérience dans le domaine de la nouvelle économie. Cette complémentarité et le partage de points de vue semblables permet à MindForest de mettre en synergie ces différents types de compétences pour faire évoluer les entreprises  dans la nouvelle économie.

Avec MindForest, nous lançons une nouvelle entreprise qui est construite complètement autour des modèles organisationnels et fonctionnels de l'Internet afin de pouvoir apporter à nos clients les meilleurs solutions en terme d'efficacité et de rentabilité.

Vous avez suivi de près les différentes étapes du marché luxembourgeois du multimédia, puis celui des nouveaux médias. Quel regard portez-vous aujourd'hui sur l'évolution de cette jeune industrie? Quelles ont été les périodes et les événements les plus marquants de cette décennie?

G.K.: La période «multimédia» était une période de découverte. Surtout de la découverte des technologies, on sentait qu'on avait en main quelque chose de révolutionnaire, mais on n'arrivait pas encore à cerner exactement les applications qui pouvaient en découler. Les pionniers lancent au Luxembourg les premiers produits sur le marché, en se battant à la fois pour financer leurs réalisations et pour convaincre le public de l'utilité de leurs actions.

La période «nouveaux médias» était caractérisée par la convergence et la vitesse. On a bien compris que l'information est devenue la ressource de base de l'industrie du futur. Les notions de réseau se développent et on commence à voir apparaître des produits qui sont d'une certaine utilité. En parallèle, le marché commence à se concrétiser et à exprimer ses besoins. La ruée vers l'or commence. Les grands hésitent ou résistent encore et les petits tentent leur chance.

Aujourd'hui, on passe à la période «nouvelle économie». Des nouveaux modèles et applications se développent et promettent même d'être rentables. Le marché est principalement caractérisé par sa rapide professionnalisation. Les grands essayent de reprendre la main et d'imposer les règles du jeu.

Affaire à suivre?

Comment le Luxembourg a-t-il réagi face au développement international des  NTIC (Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication)? Quelle position lui accordez-vous aux plans européen et mondial'

G.K.: Le Luxembourg a beaucoup de cartes à jouer, et dans le passé le Luxembourg a très souvent montré qu'il était capable de transformer ses faiblesses en forces. On peut estimer qu'il a mis du temps pour se lancer dans l'aventure. La législation a pris du retard, les activités n'ont pas été coordonnées dans le passé et il reste encore beaucoup de travail de conviction à faire pour changer les mentalités.

Par contre, il faut considérer que les deux caractéristiques majeures de la nouvelle économie sont la flexibilité et la vitesse d'évolution. Personne ne peut donc plus compter sur des acquis comme c'était le cas dans la vieille économie. Le développement constant des atouts du pays doit donc être poursuivi et accéléré.

Trois projets qui vous ont particulièrement marqué durant votre mission au CRPHT!

G.K.: GINA, la première borne interactive multimédia au Luxembourg, conçue pour l'exposition «The Family of Man» à Clervaux, mon premier projet au CRMM. GINA est un produit qui, après 10 ans, est toujours d'actualité, et qui contient des résultas de recherche du CRMM qui n'ont pas encore été dépassés par un autre produit.

La création du New Media Group. Cette étape a permis à l'équipe de passer à une autre dimension et d'accélérer le rythme de développement et d'innovation. De même ce renforcement de notre identité nous a considérablement aidé dans le développement de nos liens avec le marché.

L'Observatoire des nouveaux médias. Une structure mobilisatrice qui est venue au bon moment et qui dans un temps record s'est imposée à travers son imagination et sa compétence sur le marché.

...et trois entreprises (ou initiatives privées) qui vous ont vraiment impressionné ?

G.K.: Je trouve particulièrement impressionnant l'idée du First Tuesday. Démarrer par un réseau volontariste de rencontres, pour après l'exploiter commercialement.

QXL.com: 6 mois de la création au déploiement en US et en Europe. Un exemple parfait illustrant la vitesse  d'évolution de l'Internet.

Apple Computer: On les dit mort, mais ils reviennent et continuent à innover sans pareil.

Pour clôturer: votre conseil personnel pour tout créateur d'une entreprise high-tech?

G.K.: Il faut y croire, car si on est convaincu soi-même de ce que l'on fait, on arrive à convaincre les autres.