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Le directeur général de l'EPT, Edmond Toussing, part à la retraite le 1er janvier prochain. Un tournant dans l'histoire de cette institution'

Né le 6 avril 1939 à Mersch, Edmond Toussing fait ses études primaires à Mersch, puis à Luxembourg pour accomplir son baccalauréat en section B ? Mathématiques. Il nous avoue qu'il garde un faible pour les maths et qu'il aime calculer et planifier scientifiquement. "Tout est planifié, tout est prévu rigole-t-il. C'est peut-être la raison pour laquelle un imprévu me tracasse facilement, d'un autre côté, si les bases d'un projet sont solides, l'on se rattrape facilement lorsqu'un contretemps survient".

Après ses études secondaires à l'Athénée Grand-Ducal, le bac "B-latine" en poche, Edmond Toussing hésite entre l'étude des mathématiques et une carrière de professeur subséquente, ou encore des études d'ingénieur. "Tout ce qui est proche de l'électricité me fascine, j'ai même construit mes propres trains électriques et de toute évidence, l'électricité a un aspect fortement mathématique".

L'actuel directeur général de l'Entreprise des P&T avait fait le choix de cette branche en 1958 ! À une époque, donc, où personne ne pouvait prévoir la révolution digitale, à une époque où personne ne parlait encore d'intégration de circuits: il faudra encore attendre 10 ans avant que le premier microprocesseur soit développé dans les laboratoires de Texas Instruments.

 Les télécommunications, Edmond Toussing les découvrira à Anvers, dans les laboratoires d'Alcatel-Bell. Une fois de plus, c'est l'aspect mathématique qui attire le jeune étudiant ingénieur. Edmond Toussing souligne l'importance de telles expériences complémentaires aux études. "Il est évident que l'école a un certain retard sur l'industrie ; les circuits intégrés, je les ai découverts chez Bell'.

Pratiquement en même temps, Edmond Toussing découvre le monde de l'informatique. Une fois de plus, c'est l'aspect mathématique qui le fascine dans le monde digitalisé. "J'ai suivi les premiers cours de programmation à l'université de Liège, un langage qui s'appelait Flex. À l'époque personne ne parlait de Fortran. Pour moi c'était trop lourd, difficile à manipuler et je me suis juré de ne pas m'investir plus dans cette direction'.

Edmond Toussing sera néanmoins confronté davantage à la programmation. Chez "l'opérateur historique par excellence" du monde informatique. En effet il suivra entre 1972 et 1974 des cours chez IBM qui le certifieront "programmeur d'application' et "programmeur système".

Sans avoir été à l'origine de l'idée de la création du Centre Informatique de l'Etat, Edmond Toussing a néanmoins activement contribué à la mise en place de cette nouvelle administration, dont il fut le premier directeur.

"Le plus difficile était de regrouper tous les besoins et de trouver le dénominateur commun afin d'assurer que l'informatique soit utile pour tout le monde. À ce stade, tout le monde travaillait dans son coin. Le plus difficile fut donc de mettre sur pied un système d'information avant de concevoir un système informatique. Il fallait voir le système étatique dans sa globalité, pas seulement les différentes administrations. Prenez l'exemple du fichier des immatriculations de véhicules. Ce fichier se trouvait sur cartes perforées, dupliquées à Sandweiler pour l'Administration des Contributions, les brigades de la Police, etc. Ces cartes ont commencé leur vie propre, l'information n'était jamais à jour. Aussi un fichier centralisé donnant accès à toutes les administrations concernées par 'la voiture' faciliterait-il énormément la vie de tous. Néanmoins, mettre en place un tel système, ramifié et interactif, était loin d'être facile. La mission du CIE était donc de voir au-delà de l'administration afin de pouvoir aider mieux servir les utilisateurs?.

Le temps passé au CIE fut celui des grands systèmes centralisés "main frame", un monde complètement isolé de celui des ordinateurs que tout un chacun croit connaître à l'âge de la société (mobile) de l'information. Ce sont des systèmes énormes, capables de réaliser des centaines de processus en parallèle. Le cerveau se trouve dans un système centralisé, les terminaux ne servent que d'interface à l'homme. Si l'on débranche les terminaux de leur centrale, ils ne servent plus à rien.

?Quand je sais comment cela fonctionne, je perds un peu l'intérêt?

"En ce qui concerne le PC, je n'ai pas vécu son apparition en tant que directeur du CIE, néanmoins j'avais des discussions avec IBM qui continuait à privilégier la conception 'main frame'. Avec leur système Virtual Machine, le terminal était à même d'exécuter un processus sur le 'main frame'. Néanmoins, ce développement n'était pas fructueux. C'est le PC qui s'est imposé".

En 1985, Edmond Toussing fait son retour à la Poste. "Quand je sais comment cela fonctionne, je perds un peu l'intérêt, explique-t-il. Je m'y connaissais dans les réseaux, j'avais des bonnes notions en informatique, mais j'étais tenté par la gestion d'une grande entreprise. Le management m'intéressait énormément, surtout que je savais (connaissant l'entreprise) à quoi je m'engageais".

Avec le recul, il est satisfait du résultat : "Je suis content d'avoir pu accomplir un travail créatif, un processus qui a été accéléré par la transformation de l'administration en entreprise publique. L'administration ne sait que faire des calculs de ménagère pour le budget de l'Etat alors que dans une entreprise il faut rentabiliser. C'est la fonction de manager qui m'a toujours fasciné".

Pourtant, Edmond Toussing part à la retraite avant le terme de son mandat, qui n'expire qu'en 2004. Pour le directeur général, qui a fait part à son conseil d'administration de sa décision de partir pour le 1er janvier 2002, il s'agit d'un décision personnelle "J'avais toujours prévu de partir à la retraite entre 60 et 65. Je ne veux pas rester jusqu'au dernier jour possible. Ceci donne l'impression que l'EPT arrêtera d'exister sans moi, ce qui n'est évidemment pas le cas. C'est pour moi un moment propice de partir après 16 ans de service. Je voudrais maintenant suivre mes intérêts personnels, alors que je suis encore en parfaite santé".

Pour le directeur général, l'image de sa retraite n'est pas encore clairement dessinée, mais il sait qu'il ne va pas peupler les galeries de ses oeuvres : "Je ne suis pas un artiste et je n'ai pas de prétentions dans ce secteur. Evidemment, je ne vais pas complètement perdre de vue le secteur, mais ce ne sera plus ma première occupation. Jusqu'ici, je n'avais pas trop le temps de m'adonner à des loisirs, je fais un peu de sport, de la natation pour garder la forme et j'aime bien la nature et mon jardin. C'est bien différent de ce que je fais actuellement. De plus, j'aime voyager, découvrir du nouveau me passionne. Mon intérêt pour les nouvelles technologies commence à faiblir. Comme je l'ai déjà dit, quand je sais comment quelque chose fonctionne, je perds la passion et j'essaie de trouver un nouveau défi".