Au lendemain des attentats, le marché réagit avec une ouverture en forte baisse suivie d’une clôture proche de l’équilibre. (Photo: CapitalatWork Foyer Group)

Au lendemain des attentats, le marché réagit avec une ouverture en forte baisse suivie d’une clôture proche de l’équilibre. (Photo: CapitalatWork Foyer Group)

Si la décence nous demande d’éviter le terme «routine», le cynisme du marché montre une réaction similaire à celle que nous avons rencontrée lors des attentats de Paris, à savoir une ouverture en forte baisse suivie d’une clôture proche de l’équilibre. Certes, certains secteurs, comme ceux liés au tourisme, sont touchés plus sévèrement que d’autres. Mais dans la perspective d’un monde où les actes terroristes deviendraient courants, nous pouvons nous demander si les marchés financiers pourraient devenir coutumiers de tels événements. 

La confiance des consommateurs

D’un point de vue économique, les dommages «macro» sont certes limités, mais la confiance des consommateurs se retrouve ébranlée. Nous avons par exemple constaté que les spéculateurs sur le Brexit ont une nouvelle fois attaqué la livre sterling. Bien que le Royaume-Uni ne soit pas membre de l’espace Schengen, de tels événements auront vraisemblablement un impact sur les résultats du référendum organisé en juin concernant un éventuel Brexit.

Nous estimons donc important d’envisager les différentes implications politiques liées à ces événements. Les primaires américaines nous apportent une situation à chaud des réactions grégaires et instinctives de l’électorat américain.

Bien que de l’autre côté de l’Atlantique, Donald Trump n’hésite pas dans ses frasques à profiter des attentats pour influencer certains Américains à des discours haineux et ségrégatifs. Les résultats des primaires du 22 mars ne permettent pas d’interpréter une réaction face aux événements belges. Donald Trump et Hillary Clinton ont gagné comme prévu en Arizona, alors que leurs opposants directs ont récolté plus de votes en Utah.

Les marchés financiers semblent peu préoccupés par les élections américaines et la potentielle élection de Donald Trump. Pourtant, les défis politiques et économiques du protectionnisme et de l’isolationnisme américain sont des facteurs de risque substantiels pour la croissance mondiale.

Cause ou conséquence de l’économie mondiale et des marchés financiers?

Depuis plusieurs années, nous constatons une croissante polarisation au niveau de l’électorat et des élus. Les succès de Bernie Sanders et Donald Trump en sont la preuve. Le coefficient de Gini mesure la distribution de la richesse, un ratio proche de 0 montre une parfaite égalité, un ratio proche de 1 représente le contraire, une parfaite inégalité. Depuis plusieurs années, ce coefficient est en progression, pour se situer actuellement autour de 0,48. De manière inquiétante, l’autoritarisme est devenu de plus en plus populaire parmi les jeunes et les moins favorisés. Comme le citait Thomas Jefferson, «une démocratie n’est rien de plus que la loi de la foule, suivant laquelle 51% des gens peuvent confisquer les droits des 49 autres». Des études socio-économiques ont également montré que la récente histoire boursière influençait le vote des Américains, et pouvait les faire passer d’un camp à l’autre et vice-versa.

Si les élections américaines sont citées comme l’événement de l’année par les économistes, force est de constater que les marchés financiers ne réagissent pas aux différentes nouvelles électorales. Plusieurs articles prétendent pourtant que depuis 1926, les bourses américaines se sont mieux comportées sous l’ère d’un président démocrate: de 1926 à 2015, le Dow Jones a affiché un gain annuel moyen de 9,77% sous la présidence démocrate alors qu’il était de seulement 4,57% sous administration républicaine. Une étude menée par Matt Lampert nous permet de remonter encore plus loin dans le temps. Si on réalise le même exercice sur la période allant de 1857 à 2015, les démocrates permettaient à la bourse de gagner 7,01% par an en moyenne, pendant que les républicains enregistraient une performance boursière de 5,9%.

Lorsque nous utilisons des moyennes, les valeurs extrêmes peuvent avoir un effet substantiel sur les résultats. Entre 1929 et 1932, le Dow Jones a chuté de 89%. Aucun autre mandat présidentiel n’a connu de telles pertes sur les marchés financiers aux États-Unis. Si cette valeur extrême est retirée des statistiques, la moyenne annuelle sous les présidents républicains monte à 7,68%, légèrement au-dessus des 7,01% réalisés par la gouvernance démocrate. Par conséquent, le parti résident de la Maison-Blanche ne semble pas permettre de donner une conclusion sur la prochaine tendance des marchés boursiers. 

Le même exercice peut être réalisé sur l’économie américaine. Alors que les candidats à l’investiture déchaînent les passions sur le sujet de la croissance, malgré les critiques faites sur la présidence d’Obama, il apparaît que les présidents républicains ont un meilleur «track record» que leurs opposants démocrates. Le diable est à nouveau dans les détails. En retirant la meilleure et la pire présidence de chacun des partis, la croissance moyenne réelle de l’économie américaine montre des chiffres relativement similaires: 3,53% pour les républicains et 3,52% pour les démocrates.

En conclusion, il apparaît inutile de se focaliser sur l’issue des élections américaines. Clinton disait: «It’s the economy, stupid!» Les marchés financiers sont pourtant parfois désynchronisés de l’économie, et il s’avère plus judicieux de se concentrer sur les fondamentaux des sociétés dans lesquels nous investissons.