Bertrand Schmeler est senior portfolio manager chez CBP Quilvest.  (photo: paperJam.TV)

Bertrand Schmeler est senior portfolio manager chez CBP Quilvest.  (photo: paperJam.TV)

La relation entre expansion économique et performance boursière est loin d’être stable dans le temps. Alors que son produit intérieur brut (PIB) augmentait de 40%, entre 2010 et 2013, la performance de la bourse chinoise (-3%) a été très décevante, sur la même période les bourses mondiales progressaient de 38% en moyenne.

L’argument souvent évoqué pour expliquer cette contre-performance est la mise en œuvre par les autorités politiques Chinoises d’une politique visant à rendre la croissance moins dépendante des exportations et de l’intervention de l’État (via le surinvestissement en infrastructures notamment) et faire de la consommation un des principaux moteurs de l’activité économique: ce lent processus de rebalancement vers la demande intérieure et de correction des déséquilibres nécessitera inévitablement de nombreuses années et réduira la croissance potentielle.

La réalité est toutefois plus complexe. La contre-performance du marché chinois est tout d’abord due à une politique monétaire très restrictive. À l’extrême opposé des politiques menées par les banques centrales européenne ou américaine, la Banque Populaire de Chine a, dès 2009, cherché à freiner les excès du crédit bancaire, suite au vaste plan de relance de 2008, et à éviter à tout prix une bulle immobilière.

Parallèlement à cela, les investisseurs internationaux, attirés par les performances astronomiques de la bourse chinoise entre 2002-2007, ont été lentement refroidis par les réalités du «capitalisme» à la chinoise. Bon nombre d’entre eux ont du se rendre à l’évidence que la gouvernance d’entreprise était une notion encore peu développée et que les grandes entreprises, notamment celles dans lesquelles l’État était fortement majoritaire, étaient le plus souvent gérées en faveur de l’État actionnaire et non de l’investisseur.

Pour preuve, alors que la bourse chinoise traitait en moyenne à 20 fois les bénéfices de l’année 2009, ce ratio est aujourd’hui inférieur à 10 fois l’année en cours.

Le troisième Plenum du parti communiste chinois, sorte de plan décennal qui vient de s’achever il y a quelques jours, semble justement s’attaquer au cœur du problème et va dans le sens d’une amélioration du climat des affaires du secteur privé. Certes à un rythme très «chinois», dont les effets se mesureront donc sur plusieurs années, le rôle de l’État est profondément revu, afin de faciliter la transition vers une économie de marché.

Un des points essentiels est justement celui de la gouvernance d’entreprise: par une sorte de minirévolution, les dirigeants locaux ne seront plus évalués sur les seuls critères de croissance à tout prix, mais au regard de facteurs nouveaux: environnementaux, sociaux, de rentabilité, mais aussi de lutte contre la corruption!

L’État lui-même montre l’exemple en se désengageant petit à petit, au profit d’une véritable libéralisation de certains prix: eau, pétrole, gaz, électricité, transports, mais aussi des taux de change, des taux d’intérêt et des flux de capitaux.

Enfin, piliers essentiels d’une tentative de relance par la consommation, les systèmes de couverture sociale (santé, retraite…) seront améliorés et dans le même temps, une véritable action démographique de long terme sera menée, facilitant la mobilité urbaine et mettant fin à la politique de l’enfant unique.

Même si les détails des différentes mesures annoncées, ainsi que leur calendrier restent incertains, il semble que ces réformes de fonds vont dans le sens d’une remise en perspective du rôle de l’État et une liberté plus grande donnée aux acteurs privés: de quoi redonner sur le long terme un attrait certain au marché des actions chinoises.