La CCDH «regrette que le pays se situe avec un taux de 20% de femmes à la traîne en matière de représentativité à la Chambre des députés». (Photo: Nader Ghavami / archives)

La CCDH «regrette que le pays se situe avec un taux de 20% de femmes à la traîne en matière de représentativité à la Chambre des députés». (Photo: Nader Ghavami / archives)

«La sous-représentation flagrante des femmes à la Chambre n’est pas uniquement un problème de quotas, de communication ou de vote, mais résulte essentiellement de l’absence d’une politique cohérente et générale en matière d’égalité, telle que pratiquée depuis des décennies dans d’autres pays.» C’est le constat que fait la Commission consultative des droits de l’Homme (CCDH) dans un communiqué diffusé ce mardi

Alors que les élections législatives qui ont eu lieu le 14 octobre dernier étaient les premières où la désignation obligatoire de 40% de femmes par liste électorale avait été imposée, «il est évident que l’instauration de quotas et une campagne de motivation à l’égard des femmes – largement basée sur des stéréotypes féminins dépassés – ne sont qu’un cache-misère et n’ont pas porté leurs fruits», appuie la CCDH, qui «regrette que le pays se situe avec un taux de 20% de femmes à la traîne en matière de représentativité à la Chambre des députés».

«Les hommes politiques immunisés contre l’incompétence»

Un chiffre qui est d’ailleurs en baisse depuis 2009, où il y avait 25% de femmes élues, puis 23,3% en 2013. Le constat de la CCDH avait été réalisé également par le Conseil national des femmes du Luxembourg (CNFL) il y a tout juste un mois, qui décrivait ces résultats d’octobre dernier de «consternants. Le Luxembourg confirme son statut de mauvais élève en matière d’égalité hommes-femmes dans le domaine de la décision politique.»

Et la CCDH ne mâche pas non plus ses mots en précisant dans son communiqué qu’«au lieu de mettre en cause une politique d’activisme ponctuel et souvent paternaliste, on tente d’expliquer – comble de l’ironie – le faible score des femmes aux élections par la notion de ‘compétence’ comme si les hommes politiques élus étaient immunisés contre la médiocrité et l’incompétence».

Les femmes «réduites au silence»

La CCDH souligne qu’il est «d’ailleurs difficile de juger de la compétence des femmes, si elles sont privées de forum et réduites au silence». La commission commente également la composition des groupes de travail mis en place en vue de la formation du nouveau gouvernement, à majorité d’hommes, et qui «n’est qu’un exemple parmi d’autres, qui illustre parfaitement l’absence de volonté de la part des partis politiques et du gouvernement à réellement impliquer les femmes et à leur reconnaître leurs compétences».

La commission lance enfin un appel du pied au futur gouvernement: «Si nous souhaitons faire évoluer notre société dans le respect de sa diversité, il est urgent qu’(il) mette en place une véritable politique transversale en matière d’égalité: celle-ci sera axée sur l’éducation, la formation et la communication. Il s’agit de déconstruire des stéréotypes, souvent ancestraux, liés au rôle de la femme et de l’homme, et cela à tous les niveaux. L’objectif est de réaliser une société plus égalitaire qui permette à chacun et chacune de s’y retrouver.»

Le Luxembourg derrière ses voisins

Et comme souvent dans les domaines de l’égalité et de la parité, ce sont les pays scandinaves qui font office de bons élèves, puisque selon un rapport du Parlement européen sur la présence des femmes au sein des parlements nationaux des États membres, réalisé en mars dernier, elle est de 44% en Suède et 42% en Finlande. Nos voisins sont également bien placés, la Belgique dépassant de 18 points le Luxembourg avec 38% de femmes au sein de son Parlement, quasiment autant qu’en France (39%). Et au niveau international, c’est le Rwanda qui possède l’assemblée la plus féminine au monde, avec un taux de 61% (chiffres 2017).

Le Grand-Duché a donc encore du pain sur la planche pour rattraper son retard, et la CCDH de conclure en rappelant que le pays «a pris plusieurs engagements dans ce sens au niveau des Nations unies et du Conseil de l’Europe». Parmi les objectifs du développement durable à atteindre jusqu’en 2030, il s’agira de «(...) garantir l’égalité d’accès des femmes (...) à la représentation dans les processus de prise de décisions politiques et économiques, ce qui nourrira l’instauration d’économies durables et sera bénéfique aux sociétés et à l’ensemble de l’humanité (...)».