Les locaux de la BEI sont connus de tous. Ses programmes, moins. (Photo: David Laurent / archives)

Les locaux de la BEI sont connus de tous. Ses programmes, moins. (Photo: David Laurent / archives)

On peut, visiblement, passer régulièrement devant les imposants bâtiments de la BEI (Banque européenne d’investissement) sur le plateau du Kirchberg sans savoir vraiment ce qu’on y fait. Voilà la principale leçon d’un séminaire organisé ce mardi soir dans les locaux, pourtant transparents, du bras bancaire de l’Union européenne.

Y était présenté son nouveau programme de financement, InnovFin, destiné comme son nom l’indique aux entreprises innovantes. Sur les sept prochaines années, 24 milliards d’euros de prêts à des taux favorables seront ainsi mis à disposition de projets européens répondant aux objectifs en matière de R & I de la stratégie Horizon 2020.

InnovFin prend en fait le relais de l’obscur MFPR (Mécanisme européen de financement avec partage des risques opérationnel de 2007 à 2013) avec plus de moyens et davantage de domaines couverts. Une puissance de frappe augmentée grâce à l’augmentation de capital voulue par les actionnaire de la BEI – les États membres de l’UE – pour relancer l’investissement sur le Vieux Continent.

48 milliards d’euros sur la table

48 milliards d’euros pourront ainsi être potentiellement levés, puisque la banque de l’Union européenne ne finance que lorsqu’elle est associée à une autre institution financière, et pour un maximum de 50%.

Il faut donc aux banques commerciales s’allier à la BEI. Problème au Luxembourg? Pour l’heure, aucune banque n’a franchi le pas. «Pourquoi?», a demandé candidement Jérôme Wittamer (Genii Capital), lors de la séance des questions du public. Nul ne semblait vraiment savoir.

La complexité apparente et la relative longueur des procédures – 3 à 6 mois sont nécessaires à l’étude et au bouclage d’un dossier à la BEI – pourraient expliquer ce manque de succès. Le partage de la croyance selon laquelle le Luxembourg ne disposerait pas d’une masse critique pour obtenir des financements de la part de la BEI contribuerait aussi au manque d’entrain des banquiers luxembourgeois à aller vers elle.

Glasnost de la BEI

Mais la «glasnost» de la banque européenne vise justement à briser cette barrière invisible et à faire savoir à ses contreparties – gouvernement, banques, sociétés d’investissement, incubateurs, sociétés de conseil – présentes ce mardi qu’elle est prête à aller vers elles. L’initiative InnovFin comprend même un volet «advisory» pour expliquer les détails des possibilités de financement.

Alors que le Luxembourg se cherche des relais de croissance dans des secteurs innovants – les bio et cleantechs, mais aussi l’ICT – cette main tendue est saluée, notamment par Yves Elsen, président du Fonds national de la recherche, CEO de Hitec et administrateur de la Fedil. C’est cette dernière casquette qu’il revêtait ce mardi soir pour notamment présenter l’intérêt d’une organisation patronale comme celle-ci de partager son portefeuille d’entrepreneurs et, in fine, leur présenter ces nouvelles possibilités de financement… alors que les banques ont fermé, regrette-t-il, le robinet pour les PMEs.

Oiseau de bon augure

En effet, seule une entreprise luxembourgeoise a bénéficié d’une infime partie des 11,3 milliards d’euros mis sur la table par le feu MFPR entre 2007 et 2013.

Nul doute cependant que les établissements de crédit luxembourgeois se convertissent au mécanisme. C’est une étape nécessaire, car elles doivent s’établir en front office pour gérer les crédits offerts avec la BEI. Elles bénéficieront en contrepartie d’une garantie et d’un allégement des besoins de fonds propres.

«Cela va calmer nos risk managers quand on financera un projet et c’est fantastique», a conclu Jean Pfeiffenschneidern, directeur public and corporate banking chez BGL BNP Paribas… banque qui sera d’ailleurs certainement la première institution luxembourgeoise à s’associer à la BEI qui a déjà financé plusieurs projets via ce programme (ouvert depuis janvier). L'un d'entre eux concernait, notamment, la société finlandaise Rovio, éditrice du jeu Angry Birds.