L’ancien président de LSK, Dominique Strauss-Kahn, a toujours soutenu ignorer la situation financière du groupe. (Photo: Sénat.fr)

L’ancien président de LSK, Dominique Strauss-Kahn, a toujours soutenu ignorer la situation financière du groupe. (Photo: Sénat.fr)

Nouvelle épreuve judiciaire pour Dominique Strauss-Kahn et le holding Leyne Strauss-Kahn (LSK) qu’il a présidé avant son naufrage à l’automne 2014. Le coup vient cette fois de Luxembourg et de Bâloise Vie Luxembourg, qui fut son «tombeur» à l’été 2014. L’assureur assigne une seconde fois en justice tous les anciens dirigeants de LSK et du gestionnaire d’actifs Assya Asset Management Luxembourg (AAML), ainsi que le liquidateur Me Laurent Fisch pour des fautes de gestion engageant leur responsabilité solidaire ainsi que pour l’exercice illégal d’une profession réglementée.

L’assignation devrait intéresser les juges français ayant ouvert en mars dernier une instruction judiciaire pour des soupçons de fraude et d’abus de biens sociaux contre LSK, en faillite le 7 novembre 2014. L’intérêt des magistrats français va sans doute se focaliser sur les dates: «Les agissements des conseils d’administration de LSK et AAML [ont été] effectués en parfaite connaissance de cause, ayant connaissance au moins depuis 2009 de l’ébranlement définitif de crédit et de la cessation des paiements du groupe LSK.» Voilà qui relativise la thèse de Dominique Strauss-Kahn, qui défend son ignorance de l’état de délabrement du groupe financier dans lequel il détenait une participation de 9,8%, aux côtés de son partenaire feu Thierry Leyne (32,4%).

L’assureur considère que le nombre des déclarations de créances, leur diversité et leur montant (100 millions d’euros pour LSK et 3 millions pour Assya) «prouvent que la situation financière de LSK et AAML était gravement compromise depuis plusieurs années, sans que les membres des conseils d’administration des structures concernées n’en tirent les conséquences». «Bien au contraire», écrit Karine Vilret, l’avocate de Bâloise, «ils ont tenté, par une attitude dolosive, de maintenir le navire à flot, ce qu’ils ont réussi tant bien que mal à faire jusqu’à ce que La Bâloise permette, par ces initiatives judiciaires couronnées de succès, de mettre fin à la supercherie.»

L’assignation détaille méthodiquement cette supercherie derrière la création de LSK, qui a émis à une échelle industrielle des titres obligataires en trichant sur son bulletin de santé, faisant croire au marché aux capacités de ce simple holding à devenir une banque d’affaires.

Autre étape de la mystification, lorsque le 18 octobre 2013, LSK envisage de se transformer en banque d’affaires et d’intermédiation financière. La résolution fut reportée à l’unanimité des actionnaires et le sujet ne fut jamais plus remis à l’ordre du jour, alors que le site internet de la société mentionnait le fait que «DSK [prenait] la tête de LSK pour développer une banque». Une présentation jugée «trompeuse, voire mensongère» sur la nature des activités de LSK.

En mars 2011, l’assureur confie à AAML la gestion des actifs de fonds d’investissement internes et externes, supports de contrats d’assurances-vie. Le gestionnaire reçoit mandat de gérer les actifs «en bon père de famille». En réalité, il investira l’argent des clients dans les sociétés du groupe LSK, en violation des règles de la diversification des portefeuilles. «Sur 39 fonds gérés par AAML, 24 étaient investis dans des titres rattachés au groupe LSK», signale Bâloise, qui pointe la «faute de gestion pour avoir procédé à des investissements sans aucune perspective de gain et en parfaite connaissance de cause».

Pour ne pas avoir procédé aux aveux de faillite dans le délai légal et en jouant les prolongations avec l’argent des clients de la Bâloise, les administrateurs de LSK et d’AAML pourraient voir leur responsabilité civile délictuelle engagée et devoir mettre la main au portefeuille. L’assureur réclame réparation à AAML, à LSK et à chacun des anciens administrateurs, et demande leur condamnation solidaire. La facture s’élève à 3,267 millions d’euros pour le préjudice matériel, auxquels s’ajoute un montant de 2 millions d’euros de préjudice moral pour «atteinte à l’image».