La galerie Zidoun-Bossuyt présente une exposition de Keith Haring. (Photo: Rémi Villaggi)

La galerie Zidoun-Bossuyt présente une exposition de Keith Haring. (Photo: Rémi Villaggi)

Régulièrement, la galerie Zidoun-Bossuyt organise une exposition non commerciale d’un artiste emblématique au sein de sa galerie.

C’est ainsi qu’a déjà été présenté un ensemble d’œuvres de Jean Dubuffet (septembre 2018) et Jean-Michel Basquiat (mai 2016). Ces prochaines semaines, c’est l’artiste américain Keith Haring qui est mis à l’honneur, avec des œuvres issues de collections privées et sous le commissariat de Gianni Mercurio.

À peu près tout le monde connaît les petits personnages dansants de Keith Haring. Cet ami de Madonna ou Grace Jones, disparu prématurément à cause du sida, est devenu une figure emblématique de la contre-culture new-yorkaise des années 1980. Pourtant, celui qui œuvrait avant tout dans la rue ou dans le métro et prônait un art pour tous n’a pas rencontré un grand succès aux États-Unis.

C’est l’Europe qui lui a porté le plus de reconnaissance dans le milieu artistique. L’exposition qui est présentée au sein de la galerie Zidoun-Bossuyt est constituée d’une quarantaine d’œuvres issues de collections luxembourgeoises, françaises et belges, l’artiste affectionnant particulièrement la Belgique.

Un nouvel humanisme

L’art de Keith Haring peut sembler naïf au premier regard, avec des petits personnages simplifiés à l’extrême et des couleurs pop, mais son iconographie est bien plus profonde et complexe que cela. L’artiste utilise justement ce trait facile d’approche pour dénoncer des injustices, le racisme, l’homophobie, la pression du pouvoir, les ravages de la drogue ou les dérives de la religion.

Son engagement politique est fort et son art, une forme de lutte entre le bien et le mal. «La critique s’est largement concentrée sur cet engagement, mais ses racines se trouvent dans l’empathie pour l’être humain», explique le commissaire de l’exposition. «À travers ce petit personnage stylisé, c’est un homme universel qui est représenté. À ce titre, on peut rapprocher l’art de Keith Haring des humanistes florentins. Une synthèse de la vision positive de l’être humain. C’est ce que j’ai voulu faire ressortir dans cette exposition.»

Keith Haring, «Untitled», 1985,  acrylique sur toile  228,6x600cm (90x236inches), collection privée, Europe

Keith Haring, «Untitled», 1985, acrylique sur toile 228,6x600cm (90x236inches), collection privée, Europe.

Cette approche se retrouve pleinement dans l’œuvre magistrale exposée dans la salle principale («Untitled», 1985): un globe terrestre rayonnant est inséré dans un cœur lui-même protégé par deux mains qu’on pourrait qualifier de divines. Sous cet ensemble immédiatement lisible comme une transcription graphique du «prendre soin de la planète et de soi» danse une foule de petits personnages qui célèbrent le triomphe du bien, la joie et le partage.

Un art diversifié qui puise ses racines chez les maîtres

Il est aussi intéressant de voir comme dans certains tableaux il est possible de sentir l’influence d’autres grands artistes: Pablo Picasso dans sa période cubiste, l’héritage de l’«Hourloupe» de Jean Dubuffet ou encore la palette de couleurs de Fernand Léger. L’œuvre «Untitiled (Red, Yellow, Blue Tribute to Picasso)» de 1987 en est un exemple.

On y retrouve la figure à la fois de face et de profil qui est une référence directe à l’œuvre cubiste de Picasso, mais sa manière de dissocier la ligne et la couleur est aussi une référence à Léger, et le réseau de traits noirs ainsi que l’approche automatique du dessin évoquent davantage l’œuvre de Dubuffet. À n’en pas douter, Keith Haring a une grande culture visuelle et artistique.


Keith Haring, «Untitled (Red, Yellow, Blue Tribute to Picasso)», 1987, acrylique sur toile 183x153cm.

Il n’hésite pas non plus à multiplier les supports: la toile, mais aussi la bâche, «un de ses supports préférés, car il appartient au monde de la rue, est bon marché et tient bien la couleur» explique Gianni Mercurio. Mais aussi des vêtements, des voitures, des meubles, sur les murs… Ils lui offrent un support d’expression directe, une réponse immédiate à sa spontanéité et sa grande vitalité.

Vue de l'exposition. Photo : Remi Villaggi, Courtesy Zidoun-Bossuyt Gallery

Vue de l’exposition. (Photo: Remi Villaggi), Courtesy Zidoun-Bossuyt Gallery.

Les amateurs pourront poursuivre leur découverte à la Banque Degroof Petercam, qui organise les 2 et 9 mars des journées portes ouvertes pour découvrir une exposition de photographies de Keith Haring prises par le photographe Tseng Kwong Chi qui le suit et le photographie en permanence. Le film «Keith Haring, le petit prince de la rue», réalisé par Christina Clausen, sera projeté à cette occasion.

Exposition jusqu’au 9 mars. www.zidoun-bossuyt.com