Suite à la visite de Jean-Claude Juncker à Washington, les États-Unis n’imposeront pas l’importation des voitures européennes d’une taxe de 25% supplémentaire. Du moins pour l’instant. (Photo: EC - Audiovisual Service)

Suite à la visite de Jean-Claude Juncker à Washington, les États-Unis n’imposeront pas l’importation des voitures européennes d’une taxe de 25% supplémentaire. Du moins pour l’instant. (Photo: EC - Audiovisual Service)

Monsieur Burzynski, peut-on dire que la rencontre entre Donald Trump et Jean-Claude Juncker a été un succès?

«Oui. La déclaration de Donald Trump de poursuivre les négociations contredit les attentes plutôt pessimistes que nous avions. Nous pouvons donc dire avec certitude que Jean-Claude Juncker et l’Union européenne (UE) ont obtenu un succès à court terme. Et tant que les négociations se poursuivent, il y a une chance de trouver une solution bénéfique pour les deux parties, comme cela a été indiqué lors de la conférence de presse commune.

Par contre, les États-Unis semblent rester fermes lorsqu’il s’agit d’atteindre leurs objectifs en matière de protection de l’agriculture, de la métallurgie et de l’industrie automobile. Cela pourrait avoir un effet négatif dans les discussions pour arriver à un accord vraiment favorable.

Même si le résultat de la réunion a provoqué une petite euphorie sur les marchés mondiaux, nous entrons maintenant dans une période d’incertitude accrue, jusqu’à ce que les détails réels du ‘nouvel accord commercial UE-États-Unis’ soient négociés et annoncés.

L’UE s’est engagée à importer plus de soja et de gaz américains, alors que Donald Trump s’est gardé de tenir hors des négociations la question de la taxation de 25% des automobiles venues du Vieux Continent. Ce deal est-il vraiment avantageux pour l’Europe?

«Nous devrions considérer ces résultats comme bénéfiques, parce que le pire des scénarios ne se réalise pas. En acceptant de renégocier la position de l’UE sur le soja et le gaz liquéfié américains – qui constituaient respectivement 1 et 2 milliards de dollars d’exportations vers l’UE en 2016, selon l’UN Comtrade –, Juncker a donné la preuve de sa volonté de coopérer.

Le pouvoir de négociation de la Maison Blanche reste solide.

Michal Burzynski, chercheur à l’Uni

C’est un petit prix à payer pour ne pas avoir à supporter un tarif douloureux de 25% sur les voitures. Rappelons que les exportations de voitures vers les États-Unis équivalent à environ 40 milliards de dollars pour l’UE.

Le pouvoir de négociation de la Maison Blanche reste, certes, solide, mais la stratégie de négociation de M. Juncker pour relancer la coopération, tout en informant les États-Unis sur les politiques de représailles potentielles dans le pire des cas, s’avère raisonnable et, pour l’instant, fructueuse.

Le communiqué commun entre les États-Unis et l’UE parle de l’ouverture de négociations pour arriver à «zéro tarif douanier, zéro barrière et zéro subvention». Cet objectif est-il une bonne chose, selon vous?

«Tous les modèles commerciaux courants montrent que la réduction des obstacles à l’échange de biens et l’augmentation du commerce international sont meilleures pour les sociétés en termes agrégés. De nombreuses données empiriques appuient fortement cette conclusion théorique.

Par conséquent, la majorité des économistes sont en faveur de la libéralisation du commerce. La mise en œuvre de ‘zéro tarif douanier, zéro barrière et zéro subvention’, comme l’a annoncé Trump mercredi, est donc la voie à suivre. La question de savoir s’il est possible ou non de poursuivre la libéralisation du commerce reste une question de bonne volonté des deux dirigeants, qui ont convenu conjointement de travailler à une réforme de l’OMC.

Une incertitude permanente quant au fond et à la forme des futures relations commerciales entre l’UE et les États-Unis.

Michal Burzynski, chercheur à l’Uni

Le diable est cependant dans les détails. Les déclarations de Trump de mercredi ne correspondent pas aux mesures déjà prises par la Maison Blanche il y a quelques heures à peine. Il y a une dissonance évidente dans la volonté de Trump d’avoir un libre-échange dans certains secteurs, plus précisément les biens industriels non automobiles, et d’imposer – ou menacer d’imposer – d’autres barrières dans d’autres secteurs.

De plus, mardi, la Maison Blanche a annoncé un programme de subventions de 12 milliards de dollars pour les agriculteurs américains qui risquent d’être soumis à la concurrence des importations, provenant principalement de Chine. Par conséquent, la seule chose dont nous pouvons être sûrs dans le contexte politique actuel est une incertitude permanente quant au fond et à la forme des futures relations commerciales entre l’UE et les États-Unis.