Jean-Paul Neu et Angelo Rossi (Dussmann Services) (Photo : David Laurent/Wide)

Jean-Paul Neu et Angelo Rossi (Dussmann Services) (Photo : David Laurent/Wide)

Monsieur Neu, Monsieur Rossi, vous êtes chacun directeur général de Dussmann Services. Il est plus habituel de ne voir qu’un seul « chef d’entreprise ». Comment se passe la répartition des rôles  ?

« En général, le chef d’entreprise qui assume seul la direction de son entreprise se voit confronté à beaucoup plus de contraintes et ne peut pas toujours être omniprésent. Le fait d’être à deux nous procure une certaine aisance, pour être plus proche de nos clients, et assurer à tout moment un suivi de ce qui se passe sur le terrain. Nous nous déplaçons chez le client pour expliquer de vive voix toutes les spécificités que comportent nos prestations de services dans les différents secteurs d’activités.

Vu que nous sommes tous les deux à la tête de notre entreprise, nous avons su partager la gestion des secteurs d’activités spécifiques qu’elle offre. Nous avons chacun plus de 20 années d’expérience professionnelle et nos compétences sont égales pour chaque département spécifique de notre société. Et nos fréquentes réunions nous permettent un échange de vues permanent.

Un autre avantage se présente lors de l’absence de l’un ou de l’autre pour quelque motif que ce soit. Ainsi, la présence permanente d’un des chefs d’entreprise est garantie tout au long de l’année. En conclusion, pour nous, être deux représente certainement un avantage pour l’actionnaire et pour la société, vu la diminution des risques, la surveillance permanente de la qualité des prestations offertes et la satisfaction du client. En outre, nous sommes deux directeurs généraux, mais en fait la société il y a un directoire de cinq personnes. Il y a également Carole Breuer, directeur financier, Tun Di Bari, directeur administratif et des ressources humaines, et enfin Patrick Schiltz, directeur de l’activité blanchisserie, Lavador.

Quelle est votre autonomie par rapport à votre maison mère ?

« Nous fonctionnons de manière relativement autonome. Le démarchage auprès des clients, les décisions commerciales, l’établissement des offres de prix et des contrats, l’achat, la facturation, la comptabilité… tout cela est entièrement géré à Luxembourg !

Qui dit société de service, dit du personnel en nombre… et d’une importance critique pour la qualité du service… Quels sont les plus grands défis dans ce domaine ?

« Nos employés sont en fait le capital le plus précieux de l’entreprise. Environ 1.000 de nos collaborateurs font partie de notre entreprise depuis plus de 20 ans. Et cette ancienneté reflète bien leur satisfaction… Cela prouve que les salariés ne restent certainement pas par sympathie, mais plutôt pour les moyens que nous leur offrons de pouvoir travailler en toute sécurité et dans le respect mutuel.

Notre personnel est parfaitement formé pour les spécificités de ses tâches. Que ce soit en nettoyage industriel, hospitalier, agro-alimentaire… ou encore les services de la sécurité, du catering, de la blanchisserie, tous nos collaborateurs agissent avec beaucoup de compétence professionnelle. Nous avons un staff de plus de 2.600 collaborateurs, et il est constitué de plus de 60 nationalités. Les nouvelles embauches se font très souvent par les recommandations des professionnels du recrutement, ainsi que par l’Adem. Il arrive que les postes à pourvoir soient déjà attribués par avance… Ce fut par exemple le cas en 2011, lors d’un départ en retraite où le poste a directement été occupé par un membre de la famille.

L’absentéisme ou le statut unique vous ont-ils posé des problèmes ? « Il y a eu beaucoup de propos dans les médias concernant l’absentéisme au travail. Pour nous, c’est effectivement une situation qui peut se révéler difficile à gérer… sans être répartie de manière égale entre toutes les catégories de nos salariés.

Par exemple, selon nos statistiques, les absences sont beaucoup plus nombreuses pour les contrats à temps partiel que pour les temps pleins. Il n’est pas rare de recenser un taux de plus de 12 % pour le personnel employé à mi-temps… L’absentéisme pour le personnel à temps plein dépasse à peine les 2 %.

Lors de l’instauration du statut unique, notre gouvernement a déclaré à plusieurs reprises que le coût serait neutre pour les entreprises. Nous pouvons affirmer aujourd’hui que, ni en 2010, ni en 2011, cette opération n’a été à coût neutre pour les entreprises du Luxembourg.

On se précipite lorsqu’il s’agit de régler les problèmes de grandes entreprises, qu’elles soient sidérurgiques ou d’autres secteurs industriels, tandis que notre métier de prestataire de service est rarement pris en considération… Nous sommes pourtant le septième employeur au Grand-Duché de Luxembourg !

Un des enjeux doit également être la formation et la rétention du personnel…

« Certainement. Pour réussir à garder notre personnel, et pour garantir une certaine durabilité dans les postes, nous portons beaucoup d’importance au volet des formations continues. Pour les différentes activités de Dussmann Luxembourg, nous avons mis en place une équipe qui se consacre exclusivement à la formation de l’ensemble du personnel et au contrôle qualité.

Il nous importe de maintenir et d’améliorer continuellement la qualité de nos services. Les formations sont répétées aussi souvent que nécessaire. Nous ne considérons pas leur coût comme une dépense, mais plutôt comme un investissement.

Notre qualité de prestation, dans tous nos secteurs d’activité, est appuyée par les certifications ISO 9001 dans le domaine de la qualité, BS OHSAS 18001 dans le domaine de la sécurité au travail et ISO 14001 pour la gestion environnementale. De plus, nous détenons le label ESR (responsabilité sociétale des entreprises). Pour le gardiennage, nous sommes reconnus PSF, sous la surveillance de la CSSF. Enfin, il y a le certificat RAL, qui est mondialement reconnu, pour nos activités blanchisserie et Horeca.

La gestion de la mixité des équipes ou de la pyramide des âges est-elle un problème ?

« Presque 80 % de nos collaborateurs sont de sexe féminin. Nous tenons à préciser que la mixité existe à tous les niveaux, aussi bien sur les métiers de base que sur les métiers d’encadrement. Pour ce qui est de la gestion des compétences, nous avons plusieurs approches. À l’heure actuelle, nous avons effectivement certains cadres qui s’approchent de l’âge de la retraite. Dans ces cas-là, nous mettons en place des binômes, avec des jeunes gens qui vont pouvoir assurer la relève dans cinq ou six ans. Toute personne ayant un potentiel a la chance de pouvoir évoluer dans sa carrière. Nous souhaitons être prévoyants, et de ce fait nous désignons et formons le remplaçant bien avant le jour J, afin qu’il puisse acquérir les compétences nécessaires pour assumer son poste à responsabilité.

L’autre approche est de ne pas hésiter à engager des quinquagénaires. Ces personnes ont certainement un bagage et une expérience importante à transmettre.

Le développement de la société est constant depuis plusieurs années… « Notre entreprise existe sous la dénomination ‘Pedus International’ depuis 1978 au Luxembourg. Nous avons gagné nos premiers clients en 1979, dans le domaine du nettoyage… et ces clients nous font toujours confiance aujourd’hui ! L’activité de restauration a commencé en 1982… En 1992, le groupe a racheté la société ICE. Au Luxembourg, cela a signifié le développement de l’activité blanchisserie. En 2000, nous avons pu créer l’activité de sécurité et de gardiennage, avec le rachat de la société Securel. Ce département est devenu aujourd’hui Dussmann Security.

Le nom de Pedus vient du fondateur : Peter Dussmann. En 2007, le groupe a décidé d’uniformiser son nom sur le plan international, en devenant Dussmann. Au Luxembourg, nous avons réorganisé nos activités en quatre entités distinctes, à savoir Dussmann Services, Dussmann Security, Dussmann Catering et Lavador pour la blanchisserie. Chaque activité est opérée par une personne morale différente. Cela permet d’avoir une véritable spécialisation, ciblée sur le métier spécifique. La séparation des secteurs est favorable dans la mesure où le client aura à faire à des spécialistes pour chaque métier. Il sera rassuré sur les compétences du personnel qui intervient sur le site et sur la gestion administrative.

Nous sommes un des rares prestataires à être actif dans des métiers multiples. Certains clients préfèrent avoir un interlocuteur unique pour leurs différents besoins. Les dirigeants de notre structure sont Luxembourgeois, avec une véritable connaissance du terrain, une forte appartenance au pays et il y a un réseau important. »

 

Parcours - Avenir bicéphale

Âgé de 50 ans, Jean-Paul Neu est
entré en service chez ce qui était encore Pedus il y a 21 ans. Angelo Rossi, pour sa part, est âgé de 52 ans et travaille pour Dussmann depuis 29 ans. Après des études de commerce et de gestion, tous les deux ont évolué dans l’hôtellerie, où chacun reconnaît avoir été rendu sensible à l’importance fondamentale de la qualité du service rendu au client. C’est après cette expérience qu’ils ont rejoint leur entreprise actuelle. Ils ont été promus au poste de directeurs généraux il y a maintenant cinq ans. « Notre expérience de direction bicéphale nous amène à affirmer qu’une telle organi­sation ne peut être que profitable pour les entreprises. Comme c’est déjà le cas dans beaucoup de pays, nous sommes persuadés qu’à l’avenir de plus en plus de sociétés fonctionneront avec deux CEO. »